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Société

Bubanza:Les violences envers les enfants inquiètent

25/11/2018 Commentaires fermés sur Bubanza:Les violences envers les enfants inquiètent
Bubanza:Les violences envers les enfants inquiètent
Un enfant soumis au travail forcé.

Des viols et violences physiques et psychologiques envers les enfants se multiplient dans la province Bubanza. Les défenseurs des droits humains s’inquiètent. Ils plaident pour une protection accrue de l’enfant.

E.C., une habitante de la colline Musenyi, commune Mpanda ne cache pas sa colère : «Au soleil couchant, ma fillette de 5 ans a été violée par un jeune de 20 ans la semaine dernière. Je n’ai pas pu porter plainte par peur de représailles.» La fillette a été transférée dans un centre de prise en charge des victimes de violences sexuelles. Son enfant a été traumatisée. Ce phénomène, déplore E.C., prend une ampleur inquiétante dans la localité. Six cas en l’espace d’un mois.

N.G., 8 ans, rencontré au marché de Musenyi, est déscolarisé depuis deux ans. Il raconte les mauvais traitements qui lui sont infligés par sa belle-mère. «Ma mère a été chassée. J’ai abandonné l’école suite au manque des frais scolaires. La femme de mon père me gronde à longueur de journée. Elle me soumet à des travaux durs, dont la culture du riz».

H.B., une autre victime, a quitté sa province natale de Karusi à l’âge de 12 ans à la recherche du travail. Il est employé comme domestique dans un quartier à Bubanza. Son patron lui promet un salaire de 15000 BIF. « J’ai travaillé pendant trois mois sans toucher le moindre sou. Quand j’ai réclamé mon dû, mon patron m’a répudié ». Il est dans l’embarras. Il ne peut pas regagner sa colline, faute de frais de transport.

Antoine Icihagazeko, chef d’antenne de RBP+ à Bubanza, un réseau burundais des personnes vivant avec le VIH/sida, affirme que beaucoup d’abus et de violences sont commis envers les enfants. Les causes sont variées. Certaines violences résultent de la mauvaise cohabitation entre les conjoints. Le concubinage expose les enfants à plusieurs maux: abandons scolaires, mauvais traitements, traumatismes.

Antoine Icihagazeko évoque aussi des cas de viols sur mineurs. Certains parents des victimes ne portent pas plainte ou abandonnent la procédure. Selon lui, il y a plusieurs raisons : les menaces des auteurs, le coût élevé ou la lenteur des procédures, l’ignorance des victimes.
Par ailleurs, poursuit-il, il existe des enfants qui ne sont pas enregistrés à l’état-civil. Et comme corollaires, regrette-t-il, ces enfants ne peuvent pas bénéficier de la gratuité des soins, non plus de scolarité par manque des extraits d’acte de naissance. «Leurs droits à la santé et à l’éducation sont bafoués».

En outre, cet activiste des droits humains indique que les abandons scolaires entraînent aussi des violences envers les enfants. Suite à la pauvreté qui sévit dans les familles, certains enfants quittent le banc de l’école. Tantôt, ils se retrouvent à la rue ou exercent des travaux forcés. Certaines fillettes s’adonnent au vagabondage sexuel.

De son côté, David Ninganza, directeur du centre de protection de l’enfance au sein de la Sojpae-Burundi, dénonce la situation de vulnérabilité dans laquelle de nombreux enfants ne cessent de tomber. Son constat est amer. Bon nombre d’enfants sont victimes de beaucoup de violations dont, l’exploitation sexuelle, les violences physiques dont les coups et blessures volontaires graves, les violences sexuelles domestiques accompagnées par des grossesses non désirées, la privation de repos et de liberté.

Il y a, poursuit-il, des enfants qui sont battus ou emprisonnés pour des délits mineurs. Pourtant, fait-il observer, il y a moyen de régler ce genre de délits dans la communauté. Et de marteler : « Il faut la réparation et non la répression.»

Prévenir, et puis réprimer

Antoine Icihagazeko propose des solutions pour rétablir les enfants dans leur dignité. D’emblée, il interpelle la communauté à dénoncer les auteurs des violences envers les enfants et à les traduire en justice. « Plus les auteurs ne sont pas punis, plus ils récidivent, plus les victimes et leurs familles se découragent et vivent dans l’angoisse». Pour lui, il faut un travail en synergie de la justice, la police et l’administration.

De son côté, David Ninganza suggère de réprimer les cas de viols. Pour lui, l’arrangement à l’amiable doit être banni pour ces infractions.

Quant aux abandons scolaires, M. Ninganza propose une loi rendant l’école gratuite et obligatoire. Enfin, il interpelle les parents à faire enregistrer les enfants à l’Etat civil.

L’administration promet de s’impliquer

Ignace Ntawembarira : «Un enfant constitue un patrimoine précieux pour l’avenir du pays.»

Ignace Ntawembarira, directeur du département de l’enfant et de la famille au ministère des Droits de l’homme, se dit satisfait de l’état de protection des droits de l’enfant. Même si quelques violations sont signalées ici et là. Sur le plan légal, dit-il, le Burundi est très avancé en ce qui concerne les outils juridiques de protection de l’enfant.

Pour lui, le problème ne se situe pas au niveau de la législation mais plutôt à un problème de changement de mentalité. « Il faut une sensibilisation envers la communauté pour le respect des droits des enfants. Ceux-ci constituent un patrimoine précieux pour l’avenir du pays ».
Par ailleurs, tient-il à préciser, un renforcement des structures de protection de l’enfant tel le forum des enfants et celui des femmes est nécessaire. « On ne peut pas prétendre protéger l’enfant sans d’abord protéger sa mère ».

Edouard Ndayisenga, conseiller chargé des questions administratives et sociales dans la commune Mpanda, interpelle les couples en union libre à régulariser les mariages et à faire enregistrer les enfants à l’état-civil. Pour lui, il faut protéger les familles et partant les enfants. D’après lui, tant qu’il y aura le concubinage, les enfants seront toujours exposés à des violences diverses. Cette autorité suggère de rendre opérationnels les comités de protection de l’enfance à tous les niveaux.

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