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CNC et CNS : l’imbroglio entretenu

05/06/2013 Commentaires fermés sur CNC et CNS : l’imbroglio entretenu

La composition et les missions des Conseils nationaux de sécurité et de la communication y sont pour beaucoup dans ce climat malsain. <doc2048|left>Le Procureur général de la République, la ministre de la Communication et le Conseil National de Communication(CNC) avaient interdit aux médias de traiter des informations en rapport avec le carnage de Gatumba, durant la phase pré- juridictionnelle du dossier, la période d’un mois qui avait été donnée à la commission d’enquête. Même le Chef de l’Etat avait promis que les coupables seraient arrêtés dans ce délai. Cependant, la phase pré-juridictionnelle compte trois étapes : celle des enquêtes, l’étape de l’instruction proprement dite et la phase de l’inculpation. Selon les spécialistes, aujourd’hui, le dossier est dans sa phase d’instruction. En fixant ce délai d’un mois, une erreur restrictive a été commise par le CNC, le Parquet général de la République et le ministère de la Communication. Ils ont commis la maladresse d’oublier, dans leur précipitation, une clause de demande de délai additionnel pour se ménager une voie de sortie, si le mois ne suffit pas. Ce délai est dépassé et l’administration aurait déjà dû tirer des conclusions et des suspects être emmenés en justice. « Selon le principe de base du droit administratif, dit principe de légalité, l’administration doit se soumettre à ses propres règles, qu’elle édicte en toute liberté », souligne le professeur Pascal Rwankara, constitutionnaliste. Les journalistes n’ont donc commis aucun impair, en traitant le dossier de Gatumba, après un mois de retenue. Ce qui explique, logiquement, que le CNC n’ait pas réagi. Même si ce silence sur les turpitudes de certains journalistes et organes de presse peut être interprété comme une lâcheté par ces derniers. Le silence gênant du CNC Dans ses prérogatives, le CNC peut agir par saisine, sur demande du ministère de la Communication, ou par auto-saisine, d’après la Loi sur la presse. Le principe général est que la liberté d’opinion et de presse est garantie par la Constitution, et sa restriction est une exception. « Chaque fois que le pouvoir prend des mesures coercitives ou contraignantes limitant cette liberté, il doit passer par le ministère de la Communication, en précisant un délai. Le Ministère doit avoir l’approbation du CNC, sinon la mesure est levée », indique le Pr Rwankara. Ainsi en a-t-il été pour Gatumba. Pour qu’il tranche entre les médias et le pouvoir, il faut que quelqu’un du pouvoir sollicite la saisine du CNC, en l’occurrence le parquet, en arguant que la phase pré-juridictionnelle court toujours. Mais la main du pouvoir serait trop visible dans ce cas. Alors intervient le CNS. Même s’il n’est pas au gouvernement, il semble être au-dessus de lui, puisqu’il a, à sa tête, le Président de la République et compte dans ses membres les ministres les plus importants du gouvernement, tels ceux de la Défense ou de la Sécurité publique. Logiquement donc, le CNC risque de prendre des mesures décidées par un conseil de ministres qui n’aura été qu’une passoire des décisions prises par le CNS. Et dans ce cas, il aura donné raison à ceux qui mettent en doute son indépendance. Un CNS partiel et partial Constitutionnellement, le CNS est un organe consultatif, et non délibératif, qui propose au Chef de l’Etat des recommandations à appliquer. Mais, au-delà, le CNS a été partiel et partial dans son dernier communiqué. Partiel parce qu’il n’a pas tenu compte de tous les acteurs de l’insécurité au Burundi. Et partial parce qu’il a pris position pour le gouvernement en condamnant seulement des acteurs non étatiques, notamment les médias, comme des facteurs d’insécurité au Burundi. Pourtant, fait remarquer un analyste, il y a des services de l’Etat qui produisent l’insécurité en éliminant des individus. La stratégie adoptée avec cette déclaration du CNS est donc d’amener l’Etat à museler de plus en plus cet espace public des libertés qui, en réalité, est en train de jouer un rôle important en démocratie : celui de redresseur des torts de l’Etat ou de ses institutions. Le CNS prend donc une position politique Les retombées de cette déclaration du CNS sont de plusieurs sortes ; la première étant l’injonction du ministère de l’Intérieur à certains médias de fournir des documents les régissant. L’autre hypothèse est que cette stratégie n’aboutisse pas, puisqu’il paraît quasi impossible et dangereux de fermer plusieurs médias à la fois. Car ce serait une caractéristique d’un Etat autoritaire et non démocratique. Surtout que les médias ont, avec eux, un large public convaincu par son message, comme l’a démontré la réponse au mot d’ordre de concert de klaxons de ce mardi. C’est dire que l’on peut s’attendre à d’autres formes de participation politique populaire.

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