Dimanche 19 mai 2024

Société

1er mai 2024 : Les syndicats ont tiré une sonnette d’alarme

1er mai 2024 : Les syndicats ont tiré une sonnette d’alarme
Evariste Ndayishimiye : « Un climat d’entente règne entre l’Etat, l’employeur et l’employé »

Dans la foulée du message à la Nation du chef de l’Etat, Evariste Ndayishimiye prononcé le 30 avril 2024 à l’occasion de la journée internationale du travail et des travailleurs, la Confédération des syndicats du Burundi, Cosybu, a dénoncé le calvaire que vivent les fonctionnaires burundais. Elle a demandé un dialogue social inclusif pour trouver une issue heureuse.

Par Pascal Ntakirutimana, Rénovat Ndabashinze, Emery Kwizera, Moïse Kampala et Devis Gateretse

Dans son message, le président Evariste Ndayishimiye a, d’emblée, rappelé que la célébration de cette fête est un rappel sur les obligations, à la fois, de l’employeur et du travailleur, dans l’optique de s’acquitter convenablement des tâches qui incombent à chacun.

Il a insisté surtout sur les grandes réalisations dans différents secteurs de la vie nationale tout en ciblant certains défis.

Harmonie entre le trio : Etat-Employeur-Employé

« Aujourd’hui nous sommes heureux de célébrer cette fête pendant que la paix et la sécurité règnent à travers tout le pays. Il existe aussi un climat d’entente entre l’Etat, l’employeur et l’employé. », a laissé entendre le chef de l’Etat.

Il a inventorié plusieurs réalisations dans le secteur de la Fonction publique. « Dans le secteur de la Fonction publique, beaucoup de choses ont été faites. Ce qui n’a pas été fait est sur la table pour trouver des solutions en tenant compte de la situation financière du pays. 90% des fonctionnaires de l’Etat ont déjà reçu leurs annales qui avaient été gelées dans le cadre de lutter contre les disparités salariales qui s’observaient au niveau de la Fonction publique. Même les fonctionnaires de l’Etat qui recevaient un salaire minimal, à savoir ceux du secteur de la défense, de la sécurité et bien d’autres ont vu leurs salaires revus à la hausse et d’une façon satisfaisante. »

Il a aussi signalé que même s’il n’y a pas eu de recrutement à proprement parler, les secteurs du pays ayant plus besoin des fonctionnaires en ont eu. C’est notamment le secteur de l’éducation où 2 874 enseignants ont été recrutés ainsi que le secteur de la santé publique avec 160 fonctionnaires recrutés.

Il a mis en garde tous ceux qui crient haut et fort qu’il n’y a pas eu de transparence dans le recrutement alors qu’ils ne se sont pas bien informés. Et pour cause, selon M. Ndayishimiye, le recrutement a été effectué dans la transparence. Bien plus, ceux qui se sont sentis lésés ont eu l’occasion de porter plainte et ceux qui avaient raison ont été rétablis dans leurs droits.

« La production a été considérable »

Selon Evariste Ndayishimiye, jadis, le secteur agricole était réservé exclusivement « aux pauvres ». Les intellectuels ne s’occupaient pas de ce secteur. L’agriculteur était considéré comme un citoyen de seconde zone. Mais, aujourd’hui, a indiqué le chef de l’Etat, même les nantis sont intéressés par ce secteur car ils ont compris que c’est un secteur qui augmente la production.

Le président Ndayishimiye a en outre fait savoir que la production a été satisfaisante. « Dans le secteur agricole, le rendement a été très considérable et cela n’est pas de l’hypocrisie. Ceux qui ont vendu le surplus le savent, ils sont en bonne santé. »

Et de lancer alors un appel vibrant aux investisseurs de se mettre au travail pour transformer la production pour pouvoir la conserver et la vendre sur le marché international.

Dans le secteur industriel, il a affirmé qu’il y a eu création de beaucoup de petites industries et de grandes industries. Il a ainsi l’espoir que ces industries vont être plus nombreuses dans les jours à venir.

Une situation plutôt alarmante selon les syndicalistes

« Le salaire au Burundi s’est avéré insuffisant pour les employés, le pays ne disposant pas d’une politique salariale proportionnelle à la flambée des prix. En conséquence, les salaires ne parviennent pas à suivre le rythme de l’augmentation du coût de la vie (problème de logement, problème d’achat, de soins de santé…), ce qui entraîne des difficultés financières pour de nombreux travailleurs. », a déclaré le 1er mai 2024, Célestin Nsavyimana, président de la Confédération des syndicats du Burundi (Cosybu).

Il a rappelé que la récente politique de l’harmonisation des salaires a suscité une déception généralisée chez les fonctionnaires, poussant certains à quitter le secteur public vers le secteur privé. Pendant ce temps, d’autres travailleurs continuent de quitter le pays à la recherche d’une vie meilleure ailleurs. Sur ce, « il faut que la loi sur l’harmonisation des salaires des fonctionnaires soit appliquée et dès le mois de mai. »

La Cosybu dénonce l’ingérence de l’État et de certains employeurs dans le fonctionnement des syndicats. Elle dénonce également la prise de décisions unilatérales par l’Etat et certains employeurs sans consultation préalable avec les syndicats concernés.

« Nous constatons des employeurs autoritaires qui ne donnent pas la parole à leurs employés. Ces derniers sont toujours frustrés et leurs employeurs restent insensibles. Est-ce que ce comportement honore les employeurs ? Comment peut-on augmenter la production avec ce genre de comportement ? C’est impossible. »
Elle appelle ainsi l’Etat au dialogue avec les syndicats avant qu’il ne prenne des décisions qui les concernent.

La Cosybu s’insurge contre les pratiques préjudiciables qui persistent dans certains milieux professionnels où les employeurs favorisent délibérément les membres de leurs familles ou de leurs cercles sociaux restreints. Ce qui est, selon cette confédération, à la base de l’inefficacité de l’activité publique et privée. « Cette forme de népotisme pervertit non seulement le principe de méritocratie en privilégiant les liens familiaux ou amicaux plutôt que les compétences et les qualifications professionnelles. »

L’Association des employeurs du Burundi (AEB), quant à elle se dit très préoccupée par la situation récurrente de carence de produits pétroliers et de devises ; la situation de crise énergétique avant de déplorer l’internet à faible débit. Selon son président, de telles questions doivent être étudiées par un groupe technique composé par tous les concernés.

Le chef de l’Etat tranquillise

« Un dialogue social en milieu du travail est à encourager », a promis Evariste Ndayishimiye lors des cérémonies marquant la fête du travail et des travailleurs qui se sont déroulées dans la province de Kayanza. Il a en effet remercié la Cosybu pour son engagement à coopérer en vue d’améliorer les conditions de travail pour une meilleure production.

« Les syndicats du Burundi devraient organiser des rencontres non seulement pour leur auto-évaluation mais aussi pour apporter significativement leurs contributions à l’Etat », a soufflé le président Ndayishimiye. Avant de marteler que tous les leaders ont le devoir de servir le peuple.


Réactions

Célestin Nsavyimana : « Nous saluons la réaction du président d’organiser ce dialogue »

« Nous avons bien accueilli la réaction du président de la République parce que nous, nous demandons un dialogue franc et sincère. Et lui, il a été d’accord que ce dialogue soit organisé sur toutes les questions et revendications qui ont été soulevées. Je pense que c’est une réponse satisfaisante », réagit Célestin Nsavyimana, président de la Cosybu.

Il estime que même s’il existe des problèmes face auxquels des solutions sont très difficiles à trouver, l’important c’est d’en discuter et de voir les pistes de solutions possibles dans l’immédiat et celles à chercher progressivement.

Interrogé s’il est optimiste pour l’aboutissement de ce « prochain » dialogue, il signale que lorsqu’on va dans un dialogue, il faut être toujours optimiste : « Sinon, quand on est pessimiste, c’est inutile d’y aller. Nous sommes optimistes pour deux raisons principales : le dialogue a eu lieu et je pense que l’autre partie qui accepte le dialogue est de bonne foi. »

Il est convaincu qu’ensemble, on peut trouver des solutions aux questions de l’heure. « Il y a des questions qui peuvent trouver des solutions dans l’immédiat et d’autres dont les réponses peuvent être lointaines. »

Néanmoins, il reconnaît qu’il ne faut pas trop attendre dans l’immédiat. Car, explique-t-il, les problèmes économiques que vit le pays sont très nombreux.

Ici, il cite l’inflation galopante, la perte vertigineuse de la valeur de notre monnaie, les problèmes d’approvisionnement en produits de première nécessité, etc.

D’après lui, il s’agit là de gros problèmes qui demandent l’engagement des autorités et dont, peut-être, les solutions peuvent venir progressivement.

En ce qui est de la cherté de la vie, il trouve qu’il faut desserrer l’étau que subissent les salariés en particulier et la population en général. « Ils ne peuvent plus subvenir à leurs besoins fondamentaux : se loger, se nourrir, se déplacer et se soigner. Pour le salaire d’un fonctionnaire, ce n’est plus possible. Là, je ne parle pas du simple paysan. Il faut mesurer pour alléger les souffrances de la population. »

Concernant les produits alimentaires, M. Nsavyimana propose par exemple la détaxation des produits de première nécessité. Et pour le déplacement des fonctionnaires, il suggère l’organisation du transport en commun.

Antoine Manuma : « Nous ne comprenons pas la façon dont les annales ont été octroyées »

Le président de la Fédération nationale des syndicats du secteur de l’enseignement et de l’éducation du Burundi (Fnaseeb), salut l’ajustement salarial qui a été bien clôturé. Mais Antoine Manuma souligne que l’avancement de grade n’est pas achevé, surtout pour les fonctionnaires aux statuts spéciaux. « Cela traine, en particulier pour les travailleurs de l’Université du Burundi. »

Manuma déplore la façon dont l’octroi des annales a été fait au regard des disparités très remarquables constatées. Certains n’ont eu que 10 mille BIF alors que d’autres ont eu jusqu’à 200 millions. « Nous ne comprenons pas comment l’activité a été mise en application. » Il réclame des explications de la part de l’autorité habilitée, car il y a même des fonctionnaires qui ont été classés dans un groupe auquel ils n’appartiennent pas.

Il parle par exemple des enseignants du secondaire qui se sont retrouvés dans la catégorie des enseignants du primaire. Cela, commente-t-il, fait régresser l’enseignant et exige de le revoir.

Pour ce syndicaliste, tous ces efforts ne sont en train de servir à quelque chose à la suite de la flambée des prix des produits de première nécessité. Il faut donc ajuster les salaires des fonctionnaires à la variation des prix sur le marché.

Il reconnait des avancées au niveau de la transparence lors des recrutements en effectuant des tests. Toutefois, il dénonce le népotisme dans le recrutement des bénévoles et le remplacement des fonctionnaires. Pour Manuma, le fait de privilégier les bénévoles dans le recrutement des enseignants cache aussi du népotisme et de la non-transparence.

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