Jeudi 18 avril 2024

Sécurité

Retro Droits de l’Homme /Les arrestations des militants du Cnl vont crescendo

05/01/2022 3
Retro Droits de l’Homme /Les arrestations des  militants du Cnl vont crescendo
Agathon Rwasa : «C’est dommage que les exécutions extrajudiciaires continuent de battre le plein.»

L’année 2021 a été marquée par la ré-accréditation de la Cnidh au statut A. De son côté, le Cnl a déploré les arrestations de ses militants suivies de disparitions.

Le principal parti d’opposition, le Congrès National pour la Liberté (Cnl) a évoqué plusieurs arrestations et des disparitions forcées de certains de ses militants. Ce qui a inquiété le président de ce parti, le député Agathon Rwasa.
Entre autre cas signalés par le Cnl figure le cas d’Augustin Matata, cadre militant du parti Cnl dans la commune Gihanga, en province Bubanza. Selon la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme (Cnidh), il est décédé le 15 décembre 2021 des suites de tortures lui infligées par des agents du Service national de Renseignement.
Selon les témoins, le disparu s’était déjà fait malmener plusieurs fois. Il a connu son lot de tortures et d’incarcérations dans différentes prisons, dont celle des SNR.

Les militants du Cnl ont dénoncé des actes de terrorisme dont le seul but est de décourager les Inyankamugayo. « C’est un climat de persécution qui engendre la peur auprès de nos militants dont beaucoup ont l’impression de revivre la chasse à l’Homme des années 2010 et 2015 », a déploré un des responsables du Cnl dans la commune Gihanga.

De la désolation

« C’est vraiment terrible de voir que dans un pays qui se dit démocratique, des gens subissent des sévices jusqu’à ce que la mort s’en suive juste pour leurs convictions politiques », a regretté Agathon Rwasa ayant assisté à l’inhumation du feu Matata.

Il a indiqué que le disparu a été torturé au SNR sur des fausses accusations comme quoi il détiendrait des armes à feu. « Comment imaginer qu’un homme vieux de 62 ans pourrait prendre part à de telles machinations. Les montages grotesques sont devenus un fonds de commerce dans ce pays et malheureusement ça fait trop de victimes ».

Le leader du Cnl a fait savoir que la situation devient de plus en plus alarmante. Il en a appelé au respect de la loi. Et de rappeler que le Burundi a ratifié la Convention contre la torture. Il a aboli la peine capitale. « C’est dommage que les exécutions extrajudiciaires continuent de battre le plein alors que normalement nul ne devrait être exécuté sous quelle que forme que ce soit pour un crime qu’il n’a pas commis. Juste parce que quelqu’un est soupçonné, on le torture jusqu’à ce que mort s’en suive, c’est scandaleux ».

L’intervention de la Cnidh

D’après son communiqué publié le 10 décembre 2021, la Cnidh a dévoilé s’être entretenu avec les responsables du SNR où elle a révélé que feu Matata a été torturé.

D’après la commission, les services secrets se sont montrés coopératifs et avaient déjà pris des mesures pour réprimer les responsables de ces actes. « En effet, des dossiers d’enquête judiciaire ont été ouverts par les services habilités pour traduire en justice les responsables de ces actes », a précisé le communiqué de la Cnidh.

Et d’encourager le SNR à privilégier la culture du professionnalisme et de responsabilité dans l’exercice de leurs missions. Une invitation adressée également aux autres institutions de l’Etat.

La Cnidh a ensuite plaidé pour une justice immédiate à l’encontre des auteurs de ces violences.
Du côté du ministère en charge de la Sécurité, l’on a été rassurant. Dans une conférence de presse tenue le 22 décembre 2021, Pierre Nkurikiye, porte-parole du ministère en charge de la Sécurité publique, a annoncé que l’un des bourreaux d’Augustin Matata, un agent du SNR, est dans les mains de la justice.
M. Nkurikiye en a profité pour indiquer que cet agent des renseignements a agi pour son propre compte et que cela n’implique pas tout le service.

D’autres disparitions

Un autre cas de disparition est celui d’Elie Ngomirakiza, le représentant du Cnl dans la commune de Mutimbuzi, de la province de Bujumbura. Selon le Cnl, il a été enlevé par des hommes en tenue militaire au bord d’un pickup dans la matinée du 9 juillet sur la route Bujumbura-Gatumba, sur le tronçon Chanic-Metalusa.

« Il a été conduit vers une destination inconnue », a précisé un communiqué de ce parti sorti le 13 juillet. Le Cnl a alerté l’administration et la Cnidh juste après cet enlèvement, mais sans succès.
Les espoirs de retrouver vivant ce responsable du parti Cnl dans la commune de Mutimbuzi se sont estompés. « Des sources non encore vérifiées ont confirmé qu’il aurait été sommairement exécuté par ses ravisseurs », a fait savoir ce parti dans son communiqué.

Les présumés auteurs restent inconnus

Le Cnl a demandé que les auteurs de cette disparition soient démasqués. Et d’appeler l’administration, la police, la justice et la Cnidh à s’impliquer pour éclairer l’opinion sur la situation du responsable de ce parti dans la commune de Mutimbuzi enlevé.

Dans la foulée, le Cnl a signalé d’autres arrestations dans différents endroits. Il s’agit d’Innocent Ndayiragije, enseignant à l’école fondamentale de Muraramire en commune Vugizo de la province Makamba. Il a été arrêté dans la matinée du 9 juillet 2021 à son domicile.

C’est le même cas pour Jean-Pierre Ntakirutimana et Célestin Nimubona, des ressortissants de la commune de Buyengero, en province de Rumonge. Leurs proches les ont recherchés sans l’espoir de les retrouver.
Il y a également le gérant de la maison de passage “City of Peace”, située au quartier Shatanya à Gitega. Merthus Mahoromeza est porté disparu. Il a été embarqué à bord d’une jeep dans la nuit du vendredi 9 juillet 2021 par des gens non encore identifiés.

Un officier de l’armée impliqué ?

Sixte Vigny Nimuraba : « Des dossiers d’enquête judiciaire ont été ouverts par les services habilités.»

C’est du moins la piste soulevée par Agathon Rwasa, le leader de la première formation politique de l’opposition. Selon lui, l’enquête devrait débuter par le propriétaire du véhicule qui a servi à l’enlèvement. Il s’est produit en pleine journée devant plusieurs témoins.

«Le véhicule appartient au lieutenant-colonel, Aaron Ndayishimiye, commandant du 212e bataillon opérant à Rukoko, natif de Kabumba en zone de Kanyosha, ex Fnl. Pour ceux qui voulaient débuter l’enquête ils devraient commencer par l’interroger», a estimé Agathon Rwasa. Il a perdu tout espoir de retrouver vivant Elie Ngomirakiza. Les informations en possession du CNL ont indiqué qu’il serait mort et enterré à la réserve de la Rukoko.
Interrogé, le porte-parole de la Force de Défense Nationale a dit avoir eu vent de cette affaire, mais a démenti toute implication de l’armée.

Le président de la CNIDH Sixte Vigny Nimuraba a dit être au courant de la disparition : « Nous continuons le suivi.» Le parquet général de la République a été saisi de l’affaire.

La Cnidh ré-accréditée au statut A

La Cnidh a annoncé, le 28 juin, qu’elle venait d’obtenir sa ré-accréditation au statut A, un label donné par l’ONU aux Commissions nationales qui ont prouvé leur indépendance par rapport aux pouvoirs en place.
Sixte Vigny Nimuraba, président de la Cnidh, s’est réjoui du « regain de confiance ». Il s’est dit plus engagé à bien accomplir sa triple mission : la protection, la promotion et le rôle consultatif dans le domaine des droits de l’Homme
A propos de ce que la Cnidh et le Burundi vont tirer de cette ré-accréditation, M. Nimuraba a répondu que sa commission va bénéficier de plus de crédibilité : «Si vous n’avez pas le statut A, c’est-à-dire que vous allez travailler sur l’injonction des organes étatiques, ou même d’autres personnes et organisations ».

Par ailleurs, a-t-il ajouté, la commission sera à mesure de participer à toutes les réunions qui impliquent les institutions des droits de l’Homme. En termes de partenariat, il nous sera facile d’avoir des partenaires et de faire des travaux en synergie avec des organisations internationales.

Quant au Burundi, M. Nimuraba a indiqué qu’un pays qui a une Commission avec le statut A est reconnu pour les efforts en ce qui est du respect de droits de l’Homme parce qu’il n’y a pas une main derrière des organisations pour dicter quoi faire et comment intervenir.

Pour rappel, la Cnidh burundaise a été rétrogradée au statut B, le 26 janvier 2018, au bout d’un examen spécial du statut d’accréditation de la Cnidh qui a commencé en 2016, à la demande de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH). Cette dernière avait estimé que depuis avril 2015, la Cnidh a minimisé voire passer sous silence les crimes commis par le régime en place.

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. Benit

    C’est deplorable qu’un citoyen meurt a cause de ses convictions politique, chaque personne a droit d’adherer dans un parti politique qu’il desire, mais ce qui m’etonne c’est la reaction du soit disant chef du principal parti d’oposition , sa reaction vis a vis aux disparitions de ses militants est tres minime .Avant et apres la campagne electorale ses militants etaient malmenes d’autres emprisonnes et tues mais sa reaction est vraiment minime, parceque si ses reactions etaient proporsionnelles a ses disparitions ce qu’il y a plus de tels actes .

  2. Igiheciza

    Quoi qu’il en soit, cela ne date pas d’hier et quel que soit le pouvoir en place, l’opposant est un ennemi à abattre. Le Burundi évoluant à son rythme, arrivera une génération d’hommes et de femmes politiques qui comprendra qu’un opposant est un adversaire avec qui il faut concourir afin que le meilleur gagne. De plus, les citoyens mûrirons pour effectuer librement leurs dirigeants.

  3. Kirosi

    Alors que compte faire le CNL face à cette situation??

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