Vendredi 26 avril 2024

Économie

Inquiétante baisse de production de l’huile de palme

14/07/2021 3
Inquiétante baisse de production de l’huile de palme
L’huilerie de la coopérative « Ingaburo» à Busebwa, commune Rumonge.

L’huile de palme est devenue rare sur le marché. L’exportation de ce produit vers les pays voisins expliquerait la pénurie. Mais pas seulement. Iwacu s’est rendu à Rumonge.

L’exportation de l’huile de palme serait à la source de la pénurie observée depuis quelque temps. « Des commerçants exportent l’huile de palme et ses produits dérivés vers les pays frontaliers » accuse le ministère en charge du Développement communautaire et de la Sécurité publique dans un communiqué du 28 mai dernier.

Lundi 5 juillet, il est 9h, nous sommes sur la colline Busebwa zone Gatete, commune et province Rumonge. La région est réputée pour ses cultures de palmiers à l’huile. Effectivement, de vastes cultures de palmiers à l’huile à maturité sont visibles tout le long de la route reliant la province et celle de Makamba à Nyanza-lac. Quelques personnes portent des régimes de fruits de palmiers frais vers le site de transformation. Une huilerie construite non loin d’une grande palmeraie. C’est une unité de transformation qui appartient à la coopérative « Ingaburo». Elle a une capacité de production quotidienne de 5 tonnes d’huile brute.

Seuls quelques régimes frais de palmiers sont en attente d’être transformés. La machine est à l’arrêt. Quelques membres de cette coopérative font la propreté. On voit plusieurs fûts plastiques et métalliques vides. Le stock est vide. « Il y a une pénurie de l’huile de palme jamais enregistrée. Dans le stock chaque fois on avait au moins deux tonnes en attente d’écoulement. Mais pour le moment il n’y a rien. C’est un problème sérieux», se désole Jean Bukuru, président de la coopérative « Ingaburo».

D’après lui,  la machine n’est pas en marche. Naguère, elle pouvait transformer 10 fûts de 250kg, soit 2,5 tonnes par jour, quand la production était encore normale. « Maintenant la situation a changé. Par semaine on ne produit même pas 250kg. La situation s’est compliquée», dit-il.

 

Une palmeraie en zone Gatete.

Pour lui, la pénurie et la hausse des prix de l’huile de palme n’ont rien à voir avec l’exportation. Il pense plutôt que c’est la production qui s’est nettement réduite. Il explique que la nouvelle variété de palmiers à l’huile appelée « Tenera» n’est pas très productive. La récolte ne se fait qu’une fois l’année tandis que l’ancienne variété que la société régionale de développement de l’Imbo (SRDI) avait amenée pouvait produire en octobre et en avril.

Ces palmiers hybrides demandent beaucoup de fumiers. Par ailleurs avant l’introduction de la nouvelle variété, les palmeculteurs bénéficiaient des engrais chimiques. M. Bukuru déplore que ce ne soit plus le cas. Cela influe sur la production. « Les familles se retrouvent dans la pauvreté ».

L’offre inférieure à la demande

Un membre de la coopérative « Ingaburo », devant les puits de traitement après en avoir extrait de l’huile de palme.

Même situation en zone et commune Bugarama. Là aussi la production est devenue très faible. La cause évoquée est la montée des eaux du lac Tanganyika. « Je pouvais acheminer 500kg de régimes frais au centre de transformation. Mais depuis février, je n’ai rien récolté », pleure Jean Misago.

En commune Nyanza-lac, la production a également été réduite ces derniers mois. Le responsable de l’usine de transformation de l’huile de palme en zone Mukungu n’en revient pas. Les palmeculteurs sont de plus en plus découragés.

Augustin Kabaragasa, directeur général de l’Office de l’huile de palme reconnait la faible production. La pénurie et la hausse des prix s’expliquent, dit-il par la loi de l’offre et de la demande. D’après lui, la production est encore faible et ne peut pas satisfaire la demande.

« Le palmier à l’huile a un cycle de production. La production augmente au début de la saison de pluie pendant les mois de septembre, octobre et novembre. Elle baisse pour les mois qui suivent. La production reprend en avril et mai ».

Outre la diminution de la production, M. Kabaragasa évoque la forte demande notamment par des usines pour la fabrication de certains produits. Il parle des entreprises comme Life et Savonor qui fabriquent des dérivés de l’huile de palme. « Les sous-produits fabriqués aujourd’hui à base de l’huile de palme sont considérés comme la base de la hausse du prix. Ces grandes sociétés s’approvisionnent en huile de palme ».

Pour Kabaragasa le potentiel des palmiers hybrides est énorme. Les fruits peuvent être récoltés au bout de trois ans et les palmiers atteignent leur pleine maturité à environ six ans, si l’on s’en occupe bien. Les palmiers adultes donnent environ 20 tonnes de régimes de fruits frais par l’hectare et par an. C’est une production de 5 tonnes d’huile par an et par hectare si toutes les conditions d’entretien sont réunies.

Pour relancer et « booster » la filière, il faut mutualiser des efforts. Il propose la vulgarisation de la culture de palmier à l’huile dans d’autres régions. « Des projets d’extension de la culture du palmier à huile à travers tout le pays et un programme de reconversion de celui-ci sont en cours.»

M.Kabaragasa assure qu’avec le début de la saison des pluies, le prix de l’huile de palme va chuter. Il se dit confiant que « l’offre sera supérieure à la demande».

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. Gervais

    « L’exportation de l’huile de palme serait à la source de la pénurie observée depuis quelque temps. « Des commerçants exportent l’huile de palme et ses produits dérivés vers les pays frontaliers » accuse le ministère en charge du Développement communautaire et de la Sécurité publique dans un communiqué du 28 mai dernier. »

    Ce Ministère n’est ni en charge de la production agricole ni du commerce aussi bien intérieur qu’extérieur. deux hypothèses: (i) ignorance des missions qui sont les siennes; (ii) chevauchement ou excès de zèle. Dans l’une ou l’autre des hypothèses, le risque est d’aboutir à un disfonctionnement et l’inefficience des institutions.

    Espérons que cet article du journal Iwacu et dans une moindre mesure, mon petit commentaire, pourront contribuer à éclairer la chaine de decisions.

    • Stan Siyomana

      @Gervais
      None ntaronka inzegeranyo/rapports ku bantu bagira urudandazwa rwa magendo ku mbibe z’igihugu bafatwa n’igipolisi c’Uburundi gikukira ubushikiranganji arongoye?

      • Gervais

        Cher Stan Siyomana,

        soma neza. Navuze Ministère sinavuze Ministre. Pour ta bonne compréhension, Ministère c’est une institution alors que Ministre c’est une personne, autorité importante.

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

Le Burundi confronté à une question de survie

Quatre enfants sont morts dans l’ effondrement d’une maison dans la zone Ntamba, commune Musigati, un enfant de trois ans est mort, plus de 300 maisons détruites  après un éboulement sur la colline Gabaniro, commune Muhuta, plus de cinq cents (…)

Online Users

Total 3 398 users online