Mercredi 19 novembre 2025

Société

Phytothérapie : « une pratique dangereuse pour les maladies chroniques »

Phytothérapie : « une pratique dangereuse pour les maladies chroniques »
Mwavita Nduwayezu, une diabétique qui avait abandonné le traitement moderne pour la phytothérapie.

Le Burundi se joint au monde entier chaque 14 novembre pour célébrer la Journée mondiale de lutte contre le diabète, l’une des maladies chroniques. Cependant, certains diabétiques préfèrent la phytothérapie. Ce qui empire à la longue leur état de santé. Pour Dr. Anthony Nsabiyumva, le recours à la médecine traditionnelle ou alternative est déconseillé.

Une rechute de la maladie, un gaspillage de l’argent et une perte de temps, un endommagement des autres parties internes du corps… Telles sont des conséquences auxquelles s’exposent certains diabétiques qui refusent de continuer le traitement moderne et recourent en revanche vers la médecine des plantes.

Rencontrée dans la zone Kinama, Mwavita Nduwayezu, la cinquantaine, est une diabétique. Elle témoigne que Dieu lui a donné la chance de revivre après qu’elle ait arrêté la prise des médicaments modernes pour se diriger vers la phytothérapie.
« On m’a diagnostiquée le diabète il y a 5 ans. Je prenais les médicaments prescrits jusqu’au jour où une personne est venue m’expliquer les bienfaits de la médecine des plantes. Il a témoigné que plusieurs personnes guérissent le diabète après la prise de ces médicaments. J’ai été tentée à l’idée parce que le médecin m’avait dit que le diabète est une maladie chronique qui ne guérit pas. »

Mme Nduwayezu ajoute qu’on lui a prescrit d’autres médicaments à prendre en l’assurant qu’elle ira mieux après la prise. « Je suis rentrée heureuse, croyant qu’après cette dose, je serais guérie. J’ai même jeté les médicaments que le diabétologue m’avait prescrit parce qu’on m’avait interdit de les combiner avec ceux de la médecine des plantes. »

Elle souligne qu’un mois après, son état de santé n’évoluait pas et qu’elle a dû retourner dans cette entreprise qui pratique la phytothérapie pour la consultation. On l’a informée que la première dose était pour le nettoyage du sang et qu’elle doit acheter une autre dose. « Je ne veux pas dire que la médecine des plantes ne guérit pas. Mais chez moi, cette médecine n’a fait qu’empirer mon état de santé. Je suis retournée à l’hôpital dans un état critique. Pour le moment, je suis sur les insulines. »

Une ruine financière des patients

Jean-Paul Ndayambaje, un autre diabétique rencontré dans la zone Kamenge, n’est pas loin du témoignage de Nduwayezu. Pour lui, les entreprises qui pratiquent la phytothérapie ruinent financièrement les malades. « Leurs médicaments sont chers, plus que les médicaments pharmaceutiques. On peut acheter un seul médicament à 500 000 FBu. Imaginez, dépenser autant d’argent et prendre plusieurs doses sans aucun effet positif. »

Un autre point qu’a soulevé Ndayambaje est que des fois, les médicaments ont des conséquences sur les autres parties du corps. « Lorsque je suis retourné à l’hôpital, j’ai été diagnostiqué du foie et le docteur m’a informé que c’était dû à des médicaments traditionnels que j’ai pris avec une forte dose. »

M. Ndayambaje ainsi que Mme Nduwayezu lancent un appel auprès du gouvernement. « Les maisons qui pratiquent la phytothérapie sont devenues nombreuses maintenant. Il y a des affiches et des publicités n’importe où. On ne sait pas qui croire. C’est vrai, ces maisons paient des impôts et taxes qui rentrent dans le Trésor public. Mais, le gouvernement devrait revoir leurs fonctionnements pour protéger le citoyen lambda. Bientôt, ils vont dire que leurs médicaments guérissent même le sida. »

Ils demandent également que le gouvernement s’implique davantage dans la prise en charge des personnes insulino-dépendantes et qu’il fasse des sensibilisations pour que la population sache les causes de cette maladie et ait le courage de faire des consultations.

Pas de médicament curatif

Dr. Anthony Nsabiyumva, médecin diabétologue consultant au Centre de lutte contre le diabète au Burundi (Celucodia), explique que le diabète est catégorisé comme une maladie chronique. « À ce titre, il n’existe pas à l’heure actuelle de traitement curatif connu ou prouvé par la science. »

Dr. Anthony Nsabiyumva : « Pour le diabète, il n’existe pas à l’heure actuelle de traitement curatif connu ou prouvé scientifiquement »

Il ajoute que la prise en charge du diabète se base sur trois piliers principaux, à savoir une alimentation saine et équilibrée, une activité physique régulière et une prise de médicaments. Ces trois piliers sont à adapter en fonction du profil de chaque patient (âge, poids, présence ou non de maladies associées au diabète, etc.). Le type de diabète est aussi pris en compte (diabète de type 1, 2, diabète gestationnel, etc.).

En plus des mesures hygiéno-diététiques centrées essentiellement sur l’alimentation et l’activité physique, poursuit-il, les recommandations de l’OMS et d’autres organisations savantes internationales préconisent la prise de médicaments sous la forme de comprimés (antidiabétiques oraux), d’injections et d’insulines injectables ou inhalées.
« Toutes ces mesures sont mises en place dans l’optique de stabiliser la glycémie (taux de glucose dans le sang) afin d’éviter l’apparition des complications liées au diabète. Le traitement doit être souvent adapté et intensifié au fil du temps en fonction de l’évolution de la maladie ou de la présence d’autres pathologies concomitantes. »

Il fait également savoir que l’espérance de vie d’une personne vivant avec le diabète est relativement proche de celle de la population en général, à condition d’avoir un contrôle glycémique strict et un contrôle des facteurs de risque cardiovasculaires, notamment la tension artérielle et le cholestérol.

Des complications redoutables

Dr. Nsabiyumva souligne que le risque majeur d’un diabète insuffisamment traité est le développement de complications redoutables, handicapantes et parfois même fatales.
« Le fait de passer plusieurs mois ou années avec des glycémies instables peut entraîner des atteintes graves à long terme au patient, principalement au niveau du cœur et des artères (infarctus, insuffisance cardiaque), des yeux (cécité), des reins (insuffisance rénale), des nerfs (altération de la sensibilité surtout au niveau des pieds), des pieds (problème de cicatrisation des plaies entraînant des amputations) et du cerveau (AVC). »

Il exhorte la population en général à se faire dépister car le diabète est une maladie qui peut s’attaquer à n’importe qui. Et pour les personnes déjà atteintes, Dr. Nsabiyumva recommande la consultation médicale auprès des médecins spécialistes pour une prise en charge précoce et un suivi optimal de la maladie. « L’adhésion à des groupes de soutien ou autres associations de patients est aussi une garantie d’un partage d’expériences et de connaissances fiables sur le diabète pouvant aider les concernés à mieux vivre leur maladie au quotidien. »

Pour lui, le recours à une médecine traditionnelle ou alternative n’est pas conseillé car, à ce jour, il n’existe pas d’argument fondé sur les preuves scientifiques pour recommander l’utilisation de traitements non conventionnels afin de traiter le diabète.

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