À l’occasion de la Journée internationale de lutte contre la corruption, célébrée chaque 9 décembre, l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques (OLUCOME) a lancé, ce 4 décembre, une campagne de 16 jours d’activisme contre ce fléau. Lors d’une conférence de presse, son président, Gabriel Rufyiri, a dressé un tableau sombre de l’état de la corruption au Burundi, devenue selon lui « endémique » et profondément enracinée dans les pratiques institutionnelles.
D’entrée de jeu, Rufyiri a rappelé qu’un pays gangrené par la corruption ne peut espérer aucun progrès durable. « Là où il y a la corruption, on ne peut pas prétendre avoir le développement, on ne peut pas prétendre avoir la démocratie, on ne peut pas prétendre avoir l’intégrité des dirigeants. Donc c’est vraiment les antivaleurs qui sont développées dans la société s’il y a la corruption. » D’après lui, le lien entre gouvernance transparente, démocratie et développement est aujourd’hui ignoré par ceux qui profitent du système.
Le président de l’OLUCOME a également rappelé que le Burundi avait pourtant posé des jalons importants en matière de lutte contre la corruption. Dès janvier 2005, sous la présidence de Domitien Ndayizeye, le pays a ratifié la Convention des Nations unies contre la corruption.
En avril 2006, une loi nationale sur la prévention et la répression des actes de corruption a également été adoptée. Mais près de vingt ans plus tard, Rufyiri déplore l’inefficacité de ces textes. Selon lui, « il est clair que les corrompus sont devenus plus forts que l’État, c’est clair, c’est visible qu’aujourd’hui les corrompus continuent à influencer même les lois qui sont votées ».
Il cite notamment l’obligation constitutionnelle et légale pour les hauts responsables publics gestionnaires d’institutions, comptables, mandataires publics de déclarer leur patrimoine ainsi que celui de leurs conjoints et enfants mineurs.
Une obligation inscrite dans l’article 95 de la Constitution et dans les articles 29 à 38 de la loi anticorruption de 2006. Pourtant, elle n’est jamais appliquée. « Je suis sûr que si vous allez dans n’importe quel tribunal de résidence ou cour d’appel, ils vont vous dire qu’ils ne connaissent même pas ce genre de choses », regrette-t-il.
Absence d’une stratégie de lutte contre la corruption
Pour Rufyiri, le problème vient aussi de l’absence d’une stratégie nationale cohérente et opérationnelle de lutte contre la corruption. Il rappelle qu’une retraite gouvernementale organisée du 21 au 22 février au palais de Kiriri devait aboutir, dans un délai de trois mois, à l’adoption d’une telle stratégie.
« Il devait y avoir l’adoption de cette stratégie. Mais jusqu’à aujourd’hui, ça fait plus de cinq mois, la stratégie n’a pas encore vu le jour », s’étonne le président de l’OLUCOME.
Dans son intervention, il a également replacé le combat contre la corruption dans une perspective internationale. Il a rappelé les mots de Kofi Annan, ancien secrétaire général des Nations unies, qui qualifiait la corruption de menace directe contre la démocratie, le développement et la justice sociale, affectant surtout les populations les plus vulnérables.
La Convention des Nations unies contre la corruption, adoptée en octobre 2003 et ouverte à la signature le 9 décembre de la même année, compte aujourd’hui 192 États parties, ce qui en fait l’un des instruments internationaux les plus largement ratifiés.
Malgré l’existence de cette architecture juridique, Rufyiri estime que la corruption au Burundi est devenue quelque chose d’insidieuse, s’entretenant à travers les pratiques quotidiennes, les influences politiques et l’impunité.
Toutefois, il garde un optimisme prudent : « La corruption est devenue endémique. Tout le monde le revoit. Seulement, nous avons l’espoir, à travers les mesures qui sont en train d’être mises en place ».
Il appelle à un sursaut collectif. Pour lui, la lutte contre ce phénomène ne peut reposer sur une seule institution : « La lutte contre la corruption doit être en synergie. Tout le monde doit s’y retrouver. Les citoyens, les médias, la justice, le Parlement, le pouvoir exécutif, tout le monde. »








Charte des utilisateurs des forums d'Iwacu
Merci de prendre connaissances de nos règles d'usage avant de publier un commentaire.
Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes, antisémites, diffamatoires ou injurieux, appelant à des divisions ethniques ou régionalistes, divulguant des informations relatives à la vie privée d’une personne, utilisant des œuvres protégées par les droits d’auteur (textes, photos, vidéos…) sans mentionner la source.
Iwacu se réserve le droit de supprimer tout commentaire susceptible de contrevenir à la présente charte, ainsi que tout commentaire hors-sujet, répété plusieurs fois, promotionnel ou grossier. Par ailleurs, tout commentaire écrit en lettres capitales sera supprimé d’office.