Vendredi 26 avril 2024

Sécurité

Horreur à Gitega

Horreur à Gitega
Un pick-up ramène certains blessés de l’hôpital de Gitega.

38 morts et 69 détenus grièvement blessés. Tel est le bilan officiel de l’incendie à la prison centrale de Gitega, survenu ce mardi 7 décembre 2021 vers 4 heures du matin. Selon le gouvernement, la cause de cet incendie est un court-circuit. Une explication qui ne convainc pas tout le monde. Sans aucune nouvelle des leurs depuis la tragédie, certains proches des prisonniers sont dévastés.

Par Fabrice Manirakiza, Rénovat Ndabashinze et Jean-Noël Manirakiza

Des informations recueillies sur place confirment que les victimes de l’incendie ont été enterrés au cimetière de Kavumu, zone Mungwa, commune Gitega. Des personnes qui habitent tout près du cimetière, rencontrées à Future Hope School, une école primaire de Masenga, ont confirmé l’information. Les employés et les infirmiers de l’hôpital de Gitega précisent que les corps sans vie ont été enlevés le soir même de l’incendie.
Les mêmes sources affirment que c’est la police aidée par certains travailleurs de la commune ainsi que quelques habitants de Mungwa qui ont inhumé les cercueils contenant les corps enroulés dans des tentes. Selon nos sources, les croque-morts improvisés réclament d’ailleurs, de l’argent à l’administrateur communal.
Rencontré, ce jeudi, à la prison centrale de Gitega, Pierre Claver Miburo, directeur général des affaires pénitentiaires, a décliné tout commentaire en rapport avec la situation dans cet établissement carcéral, les travaux en cours, les funérailles des victimes, etc. « Nous sommes en train de mettre en exécution les ordres du vice-président de la République et des ministres qui étaient ici. C’est à eux qu’on donne le rapport des activités et pas aux journalistes », a-t-il souligné. Et en cas de nécessité, a-t-il ajouté, il reviendra à la vice-présidence de faire un communiqué.

« Nous voulons enterrer les nôtres dans la dignité »

C’est le cri de détresse des familles des prisonniers. Aucune information ne filtre sur le sort des leurs. Des proches estiment que les disparus méritent un enterrement digne en présence des parents et des amis. « Damas, était un ami à moi. Je me souviens quand la première fois j’ai été jeté en prison injustement. Je pleurais, je ne voulais pas manger mais il est venu me réconforter », raconte un ancien détenu en cachant mal sa douleur. D’après lui, il serait inhumain qu’il ait été enterré sans que personne ne l’accompagne dans sa dernière demeure.

Même sentiment chez la cousine de Jules, un ancien réparateur de pneus, au centre-ville de Gitega. Selon cette mère de famille, elle avait entendu que les corps étaient calcinés et qu’ils étaient méconnaissables, mais il fallait attendre que ses parents et ses proches viennent à l’enterrement. « Il avait des parents et des frères. Bien qu’il soit prisonnier, il avait ses droits jusqu’ à la dernière minute », explique-t-elle en étouffant un sanglot.

« Nous venons de perdre deux personnes sur notre colline. Toutes ont péri dans les flammes et nous n’avons pas vu les corps. Leur emprisonnement était déjà discutable et ils avaient même interjeté appel, mais voilà qu’ils partent sans être acquittés », déplore une habitante de la commune Nyarusange.

Même sentiment de colère chez le fils qui a perdu son papa. D’après lui, très tôt le matin, il avait appris que son père n’a pas pu survécu à ce drame. Comme personne ne pouvait entrer voir les corps, il s’empêchait de croire à cette information. Plus tard, il a dû se rendre à l’évidence. « C’est triste. Les mots me manquent pour qualifier ce que je ressens », a crié cet orphelin de Zege.

« J’ai demandé un congé pour monter enterrer mon père et faire le deuil. J’étais surpris quand mes oncles m’ont dit qu’il n’aura pas d’enterrement, car ils n’avaient pas son corps. J’étais très triste et en même temps furieux », confie P.M., un habitant de Mubuga en commune Gitega. Son père avait plus de 65 ans. Il n’a pas vu le corps de son père. « Mes oncles ont cherché dans tous les hôpitaux sans trouver son corps. Ça s’est passé dans des conditions obscures. C’est triste et frustrant. »

Une journée cauchemardesque

Vidéos, messages audios, messages écrits, … ont commencé à circuler sur les réseaux sociaux dès l’aube. Tous annonçaient l’horreur, la catastrophe. Les vidéos étaient insupportables. Le brasier effrayant. Les prisonniers, en détresse, s’interpellaient. On parlait déjà d’une centaine de morts. Une tragédie.

A 10h ce mardi dans la ville de Gitega, la ville avait changé de visage. On remarquait plusieurs petits groupes de gens. Les discussions étaient animées. Aux alentours de la prison centrale de Gitega, un attroupement s’observait. Les mines renfrognées. Impossible de s’approcher à 100 mètres de la prison. Les policiers avaient érigé des check-points. « On ne sait pas ce qui est arrivé à nos proches », se lamente une maman. « Aucune information ne filtre. Ils ne font que nous chasser », explique un homme, la cinquantaine. Son fils est emprisonné. Plusieurs sentiments se lisaient sur leurs visages : peur, colère et puis résignation.

Devant la prison, une armada de policiers. Une multitude de camions anti-incendie. Ces derniers sont venus de presque tout le pays. De nombreuses voitures des personnalités stationnent devant les bâtiments calcinés. A part des infirmiers et des agents de la Croix-Rouge, difficile d’accéder dans les enceintes de la prison. Les ambulances font des va-et-vient vers l’hôpital de Gitega. Les journalistes font le pied de grue devant la prison. Ils ont l’interdiction de prendre des images. Ils prennent leur mal en patience.

Quatre ministres sont sur place : celui de l’Intérieur, Gervais Ndirakobuca, celles de la Justice, Domine Banyankimbona, la chargée de la Solidarité, Imelde Sabushimike et enfin la ministre de la Santé publique, Dr Sylvie Nzeyimana. Ils passent plus d’une heure à l’intérieur de la prison avant de repartir.

Aux environs de 12h15, les journalistes sont finalement autorisés à prendre des images. Seulement l’extérieur de la prison. Devant l’entrée, un pick-up ramène de l’hôpital une dizaine de blessés. Les agents de la Croix-Rouge s’activent. On remarque également quelques agents de la police criminelle.

A quelques centaines de la prison, des badauds observent la scène. Eberlués. Probablement les proches des prisonniers. « J’étais venue voir mon mari. Un blessé qui est à l’hôpital vient de me dire qu’il a péri dans l’incendie », raconte une femme, en larmes, avec un bébé dans le dos.

Une scène de désolation

Les dortoirs des prisonniers ravagés par l’incendie.

A 12h45, les 4 ministres reviennent. Le Vice-président de la République, Prosper Bazombanza, viendra par après. En entrant dans la prison, on est frappé par les bâtiments en cendre. Les prisonniers rescapés ont été rassemblés dans la cour intérieure. Devant les caméras, ils lancent : « On a péri », « On a vécu un calvaire », « Donnez-nous quelque chose, car nous avons tout perdu.»

Les autorités ont visité les différents blocs. Les sapeurs-pompiers avaient essayé de nettoyer et de débrayer mais la scène était difficile à voir. Des matelas et des habits brulés jonchent encore le sol et flottant cela dans une mare d’eau.

Dans les différentes chambrettes, c’est la même scène. Les toits se sont effondrés. Les stocks de nourriture sont calcinés. Certains prisonniers ont pu récupérer quelques biens. Un matelas et quelques casseroles de haricots cuits. « Nous allons les manger comme ça », lancent-ils. Les autorités ont fait le tour de tous les blocs ravagés. Un haut gradé de la police expliquait au Vice-président ce qui s’est passé. Ce court-circuit à l’origine de l’incendie. Les autorités ont visité l’infirmerie où des blessés légers étaient en train d’être soignés. Et elles ont quitté la prison sans s’adresser aux rescapés. Ce qui a laissé perplexe plus d’un.

Direction l’hôpital de Gitega. Deux tentes sont érigées dans la cour. Les infirmiers et les agents de la Croix Rouge s’activent. Dans la foulée, le ministre de l’Intérieur a interdit les journalistes de prendre les images des blessés. « Gare à celui qui va les diffuser ! », a-t-il lancé aux journalistes. Penauds, ces derniers ont éteint leurs caméras. Les policiers scrutaient chaque geste des journalistes. La vue de ces blessés graves donne la chair de poule. Certains ont des brûlures sur tout le corps : le visage, les bras, les jambes. Tout son visage brûlé, un jeune garçon, la vingtaine, regardait les arrivants avec un regard vide, hébété. D’autres avaient été brûlés aux bras et aux jambes seulement. Difficile de déchiffrer les sentiments sur leurs visages.

Un lourd bilan humain

« Sur les 1500 prisonniers, nous déplorons malheureusement 38 morts, dont 12 asphyxiés et 26 morts par brûlure profonde. Nous constatons aussi que 69 personnes sont blessées dont 34 qui sont ici en traitement médical ici à l’hôpital régional de Gitega et 35 qui se sont fait soigner directement à la prison parce que c’étaient des brûlures pas profondes ».

Tel est le bilan officiel fourni par Prosper Bazombanza, Vice-président de la République, mardi 7 décembre. Il a ajouté que les 35 blessés légers ont déjà rejoint les autres prisonniers. « Et sur les 34 hospitalisés, les médecins les ont groupés en deux catégories : il y en a qui ont des brûlures profondes et d’autres avec des brûlures moins graves. Ils sont dans les tentes. Nous avons espoir qu’ils vont certainement se rétablir très rapidement. »

D’après lui, l’incendie s’est déclaré vers 4 h 05 du matin, suite à un court-circuit : « plus de 1500 personnes sans beaucoup d’occupations, les gens s’adonnent à des petits bricolages, des raccordements anarchiques. Chacun, veut faire un petit raccordement pour charger son téléphone, installer une ampoule pour l’éclairage. Ces genres d’installations supplémentaires faites anarchiquement causent souvent des dégâts énormes. »

Le Vice-président de la République a promis que toutes les factures relatives à leur prise en charge médicale vont être supportées par le gouvernement. Dans un proche avenir, le ministère ayant les infrastructures dans ses attributions va faire l’état des lieux en vue d’une réhabilitation totale de cette prison qui date de 1926.

Comme mesures urgentes, M. Bazombanza a indiqué que la ministre de la Solidarité nationale va tout faire, très rapidement, pour que les besoins immédiats des prisonniers tels la nourriture, les couvertures, les matelas, … soient disponibles afin que cette population carcérale soit dans une situation acceptable. « Il y a aussi la disponibilisation des tentes, des équipements dont ils sont besoin. »

Et de rappeler aux prisonniers que les installations anarchiques des câbles électriques sont porteuses de tous les dangers. « Parce qu’en cas d’incendie, c’est tout l’établissement qui prend feu et eux sont évidemment les premiers à souffrir. Je lance le même cri d’alarme à toutes les communautés militaires, policières, scolaires, etc. de ne pas s’adonner à ce genre de raccordements. Aux responsables de tels établissements, de redoubler de vigilance pour décourager ces installations. »

Un incendie de trop

Certains prisonniers ont pu récupérer quelques biens.

Le 21 août 2021, ce même établissement pénitentiaire avait pris feu. Les flammes ont éclaté aux environs de 8h30. La cause de cet incendie était toujours un court-circuit. Les lits, les matelas, les habits, les ustensiles de cuisine et la toiture des chambres avaient été dévastés par l’incendie. Aucun dégât humain n’avait été déploré.

En visitant les lieux, la ministre de la Justice de l’époque, Jeanine Nibizi, n’a pas ménagé certains magistrats qui, selon elle, ne respectent pas les droits de la personne humaine. « Vous faites honte à la Nation ! Vos jours sont comptés et ne croyez pas pouvoir cacher vos agissements pendant longtemps », a-t-elle martelé sous les applaudissements de l’audience.

Pour la ministre Nibizi, il était temps qu’il y ait un changement dans le traitement des dossiers des prévenus. D’après elle, il est inconcevable que quelqu’un qui est censé rendre justice soit la source des injustices subies par des innocents. « Parfois je me demande si les magistrats savent réellement la souffrance des prisonniers qu’ils envoient ici. Si c’était possible, chaque magistrat devait effectuer au moins un séjour dans une prison peut-être qu’il penserait quatre fois avant de condamner une personne pour une faute qu’elle n’a pas commise. » Elle avait exhorté le procureur général de la République de garder toujours un œil sur ses subordonnés.

Rappelons que la prison de Gitega comptait, avant l’incendie, plus de 1500 prisonniers alors qu’elle a une capacité d’accueil de 400 prisonniers.

Des messages de condoléances fusent de partout

Sur son compte Twitter, le président de la République, Evariste Ndayishimiye, a exprimé ses sincères condoléances aux familles éprouvées et a souhaité un prompt rétablissement aux blessés.
« Le Parti a appris avec grande tristesse la tragédie. Nous présentons nos profondes condoléances aux familles éprouvées par l’incendie meurtrier et souhaitons un prompt rétablissement aux blessés », a réagi le parti Cndd-Fdd sur son compte Twitter.

Au nom de l’Assemblée nationale, Gélase Daniel Ndabirabe, son président, a exprimé ses sincères condoléances. « L’Assemblée nationale demande aux services habilités de faire tout son possible pour que les causes de cet incendie soient connues. »

Le Sénat a demandé au gouvernement de prendre toutes les dispositions possibles pour éviter de telles catastrophes dans les prisons et dans d’autres endroits où vivent plusieurs personnes.

« Les ambassadeurs de l’UE et de ses Etats-membres au Burundi expriment leurs sincères condoléances et sympathies aux familles des trop nombreuses victimes de l’incendie à la prison de Gitega ce matin et leurs vœux de prompt rétablissement aux blessés », a réagi la Délégation de l’Union européenne au Burundi.


>>Réactions

Agathon Rwasa : « La piste d’un incendie criminel ne devrait pas être écartée»

« Nous exprimons notre sympathie envers les familles qui ont perdu leurs proches suite à cet incendie. Les familles des victimes ont la sympathie de tous les Burundais. Nous leur disons de tenir debout. C’est triste », a réagi Agathon Rwasa, président du parti Congrès National pour la liberté (CNL). Selon lui, il est temps que les consciences des Burundais soient interpelées « Un incendie se déclare à 4 heures matin. Nous sommes dans la capitale politique du pays. Et on vient pour éteindre plus de deux heures après. C’est une négligence incommensurable. Parce qu’après tout, c’était la vie des humains qui était menacée. Quand bien même prisonnier, on reste avec des droits notamment le droit à la vie. »

Agathon Rwasa demande à l’Etat de toujours penser à protéger ses citoyens libres ou en détention. Il déplore le retard de communication officielle sur cet incendie : « Pourquoi attendre l’après-midi pour savoir quoi que ce soit de la part du gouvernement ? Sous d’autres cieux, on devrait nous informer régulièrement comment la situation évolue. »

Ce politique soulève quelques zones d’ombres et des inquiétudes : « L’incendie se déclare un jour après la disparition des dossiers du Tribunal de Gitega. Un tribunal situé dans un lieu très gardé. Qui est ce bandit qui va vandaliser un tribunal juste pour prendre les dossiers ? Qu’en ferait-il ? Et pourquoi prendrait-il du plaisir à falsifier les registres s’il n’y a pas quelque chose en gestation ? »

D’après lui, on ne peut accuser personne mais la piste d’un incendie criminel ne devrait pas être écartée. Revenant sur les déclarations du vice-président de la République évoquant des installations électriques anarchiques des prisonniers, M. Rwasa se demande comment les prisonniers se sont procurés du matériel pour faire leurs installations dans un établissement pénitentiaire ? « Au cas où l’incendie serait lié à la vétusté des installations, l’Etat aura des comptes à rendre aux familles des victimes et à la Nation. »

Concernant le bilan officiel, réel ou pas, selon lui, même la perte d’un seul citoyen est quelque chose qu’on ne peut pas prendre à la légère. Pour lui, le gouvernement du Burundi, à commencer par le magistrat suprême, doit se pencher sur la question de sécurité des prisonniers. « Même ceux qui sont en prison ont droit à cette sécurité. Equiper des prisons avec du matériel anti-incendie, des ’extincteurs, cela doit devenir une priorité. »

Vu le surpeuplement des prisons, M. Rwasa trouve que l’exécutif devrait faire un effort pour entendre le cri de détresse des Burundais : « Il y a des multitudes des citoyens qui sont emprisonnés injustement. Il faut que la justice soit libre, indépendante. Si quelqu’un gagne le procès, qu’il n’y ait pas d’autres injonctions. Le directeur de prison doit suivre exclusivement les ordres de l’appareil judiciaire. » Il plaide aussi pour l’enterrement digne des victimes et la prise en charge de toutes les factures de soins de santé pour les blessés.

Gabriel Banzawitonde : « Des enquêtes approfondies »

« Le parti APDR a appris avec regret l’incendie et console les familles des victimes et les blessés », réagit Gabriel Banzawitonde, son président. Il demande des enquêtes approfondies pour avoir toute la lumière sur cette catastrophe. Revenant sur le surpeuplement des prisons, il suggère de mettre fin aux emprisonnements abusifs et de traiter rapidement les dossiers.  Cela permettrait le désengorgement des prisons. Sur les installations anarchiques évoquées comme cause de l’incendie, il demande à la Regideso de suivre de près et quotidiennement ses installations électriques.

Kassim Abdul : « Communiquer officiellement toutes les victimes »

« Au parti Upd-Zigamibanga, nous avons été sidérés par l’incendie qui s’est déclaré à la prison centrale de Gitega. Nous rendons un hommage aux victimes et souhaitons un prompt rétablissement aux blessés », confie Kassim Abdul, son président. Pour lui, il faudrait d’abord faire des enquêtes approfondies sur les causes de l’incendie. « Et après, il faut communiquer officiellement toutes les victimes dans le Bulletin officiel du Burundi (BOB). »

D’après lui, l’enquête sommaire mérite un complément. « Par exemple, qui fait ces installations ? Et pourquoi ? », s’interroge-t-il. Ainsi, le président du parti Upd-Zigamibanga demande au gouvernement de prendre des mesures de sécurité pour prévenir de telles catastrophes.

Gustave Niyonzima : « Comment conclure sans enquêtes approfondies et en une demi-journée ? »

« Si l’on s’en tient aux propos tenus par l’un des prisonniers à la RFI comme quoi les policiers ont refusé de procéder à l’ouverture des portes pour secourir les victimes de cet incendie, on en déduit que la thèse de l’incendie naturel fait défaut », indique Me Gustave Niyonzima, juriste et défenseur des droit humains. Juridiquement et sur base de ces propos, poursuit-il, le Parquet Général de la République aurait déjà mis en place une commission chargée d’enquêter sur ce qui s’est passé afin d’établir la responsabilité et afin que les victimes puissent avoir justice et recouvrer leur dignité.

Pour ce juriste, dire que l’incendie a été causé par un court-circuit ne convainc pas. « Comment conclure sans enquêtes approfondies et en une demi-journée ? C’est vraiment biscornu ! » Selon lui, L’Etat devra indemniser les victimes sur base du principe général de droit de la responsabilité de protéger de toute catastrophe naturelle. « L’Etat doit s’acquitter de cette obligation afin de prévenir tout danger. Tout prisonnier a droit d’être protégé, d’être traité humainement et d’avoir également le droit à la vie. »

D’après Me Niyonzima, les conséquences de cet incendie sont multiples. « D’abord, pour ceux qui sont morts alors que leurs dossiers judiciaires étaient en cours, il y aura extinction de l’action publique à leur égard. Pour les survivants, leurs dossiers prendront une lenteur sans nom au niveau de la procédure alors que leurs dossiers étaient proches d’être soumis en audience publique. »

Gérard Hakizimana : « Il faut un contrôle minutieux de l’état des maisons de détention»

« FOLUCON-F souhaite un repos éternel à ces victimes et adresse ses condoléances à leurs familles. Il souhaite également une prompte guérison aux personnes blessées », indique Gérard Hakizimana, président et Représentant légal de l’association FOLUCON-F. Cependant, il demande aux services de protection civile et gouvernementale de faire des enquêtes approfondies pour trouver les causes exactes. FOLUCON-F demande également aux services pénitentiaires de faire un contrôle minutieux de l’état des maisons de détention ainsi que des conditions sociales dans ces dernières pour que de tels incidents ne se reproduisent plus.

Tatien Sibomana : « Il faut que les victimes soient officiellement connues »

Pour Tatien Sibomana, politicien, c’est un sentiment de déception et de désespoir : « Parce qu’à entendre la disparition en nombre important des personnes, ça donne quand même à réfléchir en tant qu’humain, homme de droit et politicien. » Il présente ses tristes condoléances à toutes les familles des personnes disparues.

Sur l’installation anarchique comme cause de l’incendie, M. Sibomana se demande si cette assertion est étayée par des éléments de preuves tangibles. Et si c’est vrai, commente-t-il, ça dénote une légèreté, un manque de clairvoyance dans la gestion des établissements carcéraux. « Même en cas d’installations anarchiques des câbles électriques, je doute fort si l’incendie pouvait tout détruire sans que la police, les autorités puisse intervenir pour limiter les dégâts. Les doutes ne manquent pas quant à l’origine exacte de cet incendie.» Il demande une enquête bien fouillée.
Au moment où des informations disent que les victimes auraient été enterrées en cachette dans la soirée de ce mardi, Tatien Sibomana trouve que c’est illogique : « C’est un incendie qui n’est pas à cacher. Quelles que soient les causes, il faut savoir gérer les conséquences pour limiter les soupçons. » Et de poursuivre : « Voilà comment les régimes créent les soupçons des observateurs des droits de l’homme. Pourquoi vouloir cacher le nombre des victimes alors que tout le monde sait que l’incendie a causé des dégâts aussi bien humains que matériels ? »

Selon lui, ça ne sert à rien parce que la vérité est là : « Il y a des survivants, des blessés qui connaissent la réalité. » Il regrette qu’avec cette option de cacher la vérité, les gens vont continuer à répandre des rumeurs parce que le gouvernement a voulu gérer la situation de façon opaque. « Pour moi, il faut que les victimes soient connues parce qu’elles ont leurs familles. Leur liste devrait être affichée publiquement et les victimes devraient être enterrées de la façon plus officielle possible », insiste-t-il.

Forum des lecteurs d'Iwacu

1 réaction
  1. Mbazumutima

    … »Il regrette qu’avec cette option de cacher la vérité, les gens vont continuer à répandre des rumeurs parce que le gouvernement a voulu gérer la situation de façon opaque… »
    Et voilà : hier, aujourd’hui : que tirons-nous des leçons de tout ce qui nous tombe sur la tête depuis le départ des colons ?

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