Il y a… 30 ans, le Professeur Stanislas RUZENZA était assassiné !
Par Alain Blaise Rukundo
Il y a exactement 30 ans, jour pour jour, le Professeur Stanislas RUZENZA était lâchement assassiné par balles, au sein même de l’Université du Burundi.
Trente longues années me séparent désormais de lui. Trente ans de douleur, de silence pesant, et d’attente inlassable pour connaître la vérité sur cet assassinat — ou, tout au moins, s’en approcher. Certes, une enquête a bien été ouverte. Mais elle fut, hélas, profondément biaisée… Une enquête où les véritables commanditaires ne furent jamais inquiétés, jamais dévoilés.
Ce mercredi 21 juin 1995, vers 9 heures du matin, un homme armé entre sans difficulté sur le campus de l’Université du Burundi, pourtant gardé par des gendarmes. Il monte à l’étage du Rectorat, pénètre dans le bureau du Directeur de la Recherche, et ouvre le feu avec acharnement sur le Professeur Stanislas RUZENZA, mon père.
Il vient d’être exécuté à bout portant.
Dix jours plus tôt, un massacre effroyable avait endeuillé cette même université. Des centaines d’étudiants hutu y furent sauvagement assassinés, dans une tragédie perpétrée avec la complicité passive — sinon active — des forces de l’ordre de l’époque.
Face à l’horreur, mon père fit preuve d’un courage rare : il décida d’organiser des funérailles dignes pour ces jeunes victimes. Je me souviens des jours précédant son assassinat : ils furent rythmés de coups de téléphone, de recherches discrètes, pour retrouver les rares rescapés qui pourraient participer à l’hommage.
Il en paiera le prix fort. Le lendemain de son assassinat, il fut inhumé aux côtés de ces étudiants qu’il avait voulu honorer.
Aujourd’hui, nous, membres de sa famille, exprimons le souhait qu’un hommage institutionnel puisse lui être rendu. Peut-être qu’une salle pourrait porter son nom, ou qu’une plaque commémorative soit apposée dans le bureau où il a été assassiné. Ce serait, à nos yeux, une manière juste et digne de rappeler son engagement, son humanité et son courage — afin que sa mémoire ne s’efface pas avec le temps.
Chaque 21 juin, alors que le monde célèbre l’été, la musique et la lumière, je me réveille avec un goût amer. Non pas uniquement à cause de son départ brutal, mais surtout face au silence, à l’indifférence qui entoure encore aujourd’hui la quête de vérité. Quand d’autres dansent, chantent et célèbrent, nous, sa famille, nous portons le deuil. Nous pleurons, car ce jour ne sera jamais, pour nous, une fête. Il restera marqué à jamais par l’écho des balles et le vide immense qu’il a laissé.
Repose en paix, cher Papa.
Alain Blaise
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