Mercredi 25 juin 2025

Économie

Pavage du chef-lieu de la province de Cankuzo : A quand la fin du feuilleton ?

25/06/2025 0
Pavage du chef-lieu de la province de Cankuzo : A quand la fin du feuilleton ?
Des pavés abandonnés au milieu de la route, trois ans après le lancement du projet de pavage du chef-lieu de la province de Cankuzo

A Cankuzo, seuls 2,4km de route à paver ont été terrassés sur les 4 prévus. Les travaux peinent à avancer, malgré les annonces officielles de leur achèvement. La population dénonce un chantier abandonné et les désagréments quotidiens qui en découlent.

Arrivé au chef-lieu de la province de Cankuzo appelée à devenir le centre administratif de la future province élargie de Buhumuza, le constat est alarmant : des pierres entassées sur les routes, des caniveaux inachevés, des travaux de terrassement non terminés sur certaines voies, des pavés abandonnés et, surtout, des routes si étroites qu’il est impossible à deux véhicules de croiser.
« Les travaux de pavage devaient être terminés en six mois, mais ils en sont maintenant à leur troisième année d’exécution. », s’est indigné le gouverneur de la province de Cankuzo Boniface Banyiyezako.

« Nous demandons au ministère en charge des infrastructures de fournir des efforts pour terminer ce projet car, la province de Cankuzo va devenir le chef-lieu de la province élargie de Buhumuza. Je souhaite qu’il y ait une décentralisation de ces travaux qui sont aujourd’hui planifiés uniquement au niveau ministériel », plaide-t-il. Pour lui, la situation est difficilement justifiable au vu de l’importance stratégique de la route sous analyse.

Le gouverneur regrette que même les opérations d’achat de matériaux de construction soient centralisées à Bujumbura. « Il est paradoxal que les travaux soient exécutés ici à Cankuzo alors que l’achat du gravier, du sable et d’autres matériaux se fasse à Bujumbura. Cela engendre un retard considérable dans l’exécution du projet. »

Il soulève également des irrégularités dans l’exécution technique du chantier. « Un autre hic, c’est que celui qui trace les caniveaux n’a même pas de contrat à fournir. Vraiment, nous ne sommes pas fiers de cet arrêt. D’ailleurs, nous ne cessons jamais de demander qu’ils envoient des camions pour enlever les tas de terre qui bloquent les routes et nuisent à la circulation. »

Le gouverneur pointe en outre le manque de moyens logistiques notamment le carburant et le ciment. « Nous avons déjà payé le carburant à la Sopebu mais nous n’avons pas encore été ravitaillés. Parfois, on nous donne 1 000 l. Ce qui est insuffisant. »

La population est lassée

Anicet Minani, menuisier au chef-lieu de Cankuzo, fait partie de ceux qui subissent les conséquences de la suspension des travaux de pavage. Visiblement déçu, il témoigne. « Les travaux avaient bien commencé et avec de l’énergie. Mais, avec le temps, le rythme s’est perdu. Je souhaite que ce chantier soit enfin terminé et je lance un appel aux autorités compétentes pour qu’elles aillent toujours jusqu’au bout de ce qu’elles commencent, surtout qu’il y a encore beaucoup de choses à faire. »

Pour ce menuisier, l’impact négatif est direct. « Vous voyez bien que la route est bloquée. Les véhicules et les motos qui transportent des commandes ne peuvent plus arriver directement jusqu’à nos ateliers. Cela entraîne des pertes. »

Il se souvient de l’espoir qu’avait suscité le projet auprès de la population. « Au début, on était heureux. On croyait vraiment qu’on allait avoir de belles routes. Mais jusqu’à présent, rien n’est achevé. Depuis qu’ils ont déposé les pavés, aucun autre travail de pavage n’a été fait. On ne comprend même pas d’où vient le blocage. »

Pour Hussein David Ntamavukiro qui travaille au chef- lieu de la province, le chantier de pavage a viré à la désillusion. « Les voitures ne passent plus. Les travaux sont complètement à l’arrêt. Et nous, simples citoyens, nous ignorons la raison de cet arrêt brutal », confie-t-il, debout dans une route couverte de poussière pendant cette saison sèche.

Il se souvient de l’enthousiasme lors du lancement des travaux. « Ils avaient commencé le terrassement, mais les travaux se sont arrêtés à mi-chemin. Tout au début, nous étions aux anges. On pensait que le moment du développement était enfin arrivé à Cankuzo. Mais, cette joie n’a été que de courte durée. »

En montrant la route impraticable, il soupire. « Regardez, il y a de la poussière et des tas de terre partout. Avec ce projet, j’avais espéré qu’on en finirait avec ça, qu’on pourrait respirer un air plus propre. Mais, vous voyez bien que ce n’est pas le cas. »

Les automobilistes ne cachent pas non plus leur frustration. L’un d’entre eux, conducteur de camion, témoigne. « Notre travail est sérieusement impacté. Les tas de terre abandonnés en pleine route bloquent le passage. Ce qui rallonge notre trajet. En tant que chauffeur, je suis très touché par cet arrêt. On dirait que ceux qui dirigent les travaux ne savent pas ce qu’ils font. Ils commencent, puis s’arrêtent brusquement, parfois en plein milieu de la route. »

En traversant une route poussiéreuse et remplie de tas de terre, une habitante n’a pas caché sa déception. Pour elle, les conséquences vont au-delà des problèmes de circulation. « Il y a beaucoup de bureaux ici. C’est regrettable de devoir se rendre dans des institutions publiques tout poussiéreux. Imaginez, même accéder au bureau du gouverneur devient compliqué. Ce n’est pas bon pour l’image de la province. »

Elle ajoute que « pendant la saison sèche, c’est encore pire. La poussière devient insupportable et les conditions de déplacement se détériorent davantage. »

Les hôtels également pénalisés

Tas de terre obstruant la voie, compliquant la circulation des Devis Gateretse usagers dans le centre de la province de Cankuzo

Les établissements hôteliers ne sont pas épargnés. Un employé de l’hôtel Ruvubu a confié qu’« au début, nous étions enthousiastes face à ce projet ambitieux. En tant que manager d’hôtel, j’y voyais une opportunité de développement pour notre secteur. Mais, vous voyez bien que les travaux se sont arrêtés. Le pire, c’est pendant la saison des pluies. L’accès devient très difficile. Et même en saison sèche, nos clients fuient parfois à cause de la poussière qui envahit les enceintes de l’hôtel. L’image que cela renvoie n’est vraiment pas agréable. »

Face au mécontentement croissant, le gouverneur tente de rassurer. « Les moyens de l’État ne sont pas permanents. Parfois, des urgences surviennent et exigent des ressources immédiates. Mais nous restons optimistes », a-t-il déclaré.

Il convient de noter que l’Agence routière du Burundi (ARB) prévoyait initialement de paver 4 km de route. Mais seuls 2,4 ont été entamés. Malheureusement, ils ne sont toujours pas achevés.

Pour rappel, le 10 avril dernier, devant les représentants du peuple, le Premier ministre Gervais Ndirakobuca avait affirmé que les travaux de pavage du chef-lieu de la province de Cankuzo, dotés d’un budget de 1,4 milliard de FBu, affichaient un taux d’exécution de 100 %. Une rhétorique loin de la réalité constatée sur le terrain.

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