Jeudi 25 avril 2024

Politique

Neva/Rwasa : Agathon Rwasa nie tout contact avec Red-Tabara

25/02/2022 2
Neva/Rwasa : Agathon Rwasa nie tout contact avec Red-Tabara
Le président Evariste Ndayishimiye et le président du Cnl, Agathon Rwasa.

Irrité par la manifestation à Bruxelles de Burundais membres de l’opposition en exil, le chef de l’Etat a accusé le Cnl d’en être l’instigateur en complicité avec le groupe rebelle Red-Tabara. Des accusations graves que nie le leader du Cnl, Agathon Rwasa.

C’est le communiqué auquel le Cnl n’aurait jamais voulu être associé. Rédigé le 15 février, il appelait l’ensemble de la diaspora burundaise d’Europe à venir manifester contre la présence du président Evariste Ndayishimiye au 6e sommet Union Européenne-Union Africaine programmé les 17 et 18 février à Bruxelles.

Ce rassemblement s’était donné pour objectif de pointer du doigt les violations massives des droits de l’Homme imputables au pouvoir actuel de Gitega (tortures, disparitions forcées, assassinats…), la chasse aux opposants politiques, le verrouillage de l’espace démocratique, l’instrumentalisation de la justice, l’impunité, la corruption… mais également l’Union européenne coupable, selon les signataires, d’avoir fait le choix de lever ses sanctions malgré « tous ces travers ».

Et d’exiger de la part de Gitega la tenue d’un dialogue « inclusif inter-burundais », la réhabilitation de l’Accord d’Arusha, l’acceptation du pluralisme politique, levée des poursuites contre des leaders de partis politiques, de médias et organisations de la société civile, etc.

En bas de la feuille, plusieurs formations politiques et organisations de la société civile ont signé ce communiqué. Parmi eux, le parti Cnl représenté par un certain Aimé Magera. Quelques jours plus tôt, ce personnage se présentant comme un représentant du Cnl en Belgique, avait appelé lui-même à cette manifestation via sa page Facebook. Du pain béni pour les détracteurs du parti d’Agathon Rwasa qui voient là l’occasion de montrer à quel point cette formation politique serait liée « aux ennemis du pays ».

Ainsi, le Cnl réagit deux jours plus tard et prend le soin de préciser que « des informations qui circulent ces derniers jours sur les réseaux sociaux n’impliquent pas le parti ». Et d’ajouter que les communications officielles du Parti se font à travers « ses organes et canaux officiels reconnus ».

Un message qui ne réussira aucunement à calmer ses détracteurs les plus virulents. Sur Twitter, Willy Nyamitwe, ancien conseiller à la présidence et actuellement ambassadeur du Burundi à Addis-Abeba, indique que les organes et canaux officiels de communication d’une organisation politique ou d’une personnalité politique incluent aussi le porte-parolat. « Par conséquent, ce qui est dit par un porte-parole engage forcément l’organisation ou la personnalité concernée ».

Le président attaque le Cnl

Aimé Magera, grosse écharpe sur l’épaule, représentant autoproclamé du Cnl en Belgique, était aux avant-gardes de la manifestation organisée devant le Conseil de l’UE à Bruxelles.

La manifestation organisée devant le siège du Conseil de l’Union Européenne par des membres de la communauté burundaise en exil opposés à Gitega contre le pouvoir d’Evariste Ndayishimiye a vite fait des remous du côté de Ntare Rushatsi.

En témoigne d’abord ce tweet envoyé par Evelyne, porte-parole du chef de l’Etat : « Le Chef de l’État déplore que des acteurs politiques aient organisé des manifestations contre la levée de ces sanctions. Par la voix de son porte-parole, le CNL se range du côté des ennemis du peuple burundais, nous attendons de voir quelle suite sera donnée à ce triste épisode.»

Plus tard, à son retour sur le sol burundais, le chef de l’Etat a tiré à boulets rouges sur le parti Cnl. Il a parlé de membres du Cnl « ayant pris l’avion pour aller manifester à Bruxelles ».

« C’est déplorable de voir un parti reconnu légalement aller se joindre au groupe terroriste Red-Tabara pour organiser des manifestations à Bruxelles », a fait remarquer le chef de l’Etat.

Le président Ndayishimiye indique, dans ce discours, que le silence du Cnl face aux actes de « ses représentants » vaut complicité. Le président Ndayishimiye explique, par ailleurs, que le Forum des partis politiques est là pour favoriser le dialogue entre les partis politiques et qu’en cas de désaccord, les différentes formations politiques disposent du droit de manifester.

 


Agathon Rwasa : « Le président s’est livré carrément à du complotisme »

Dans une interview accordée à Iwacu ce mardi 22 février, le président du Cnl réfute en bloc tout lien avec la manifestation anti-Ndayishimiye de Bruxelles et accuse à son tour le parti au pouvoir de brimer constamment l’opposition.

Le chef de l’Etat a accusé votre parti de connivence avec le groupe rebelle Red-Tabara pour initier une manifestation anti-Gitega à Bruxelles. Votre commentaire ?

Les propos du président de la République cachent mal des intentions négatives envers le parti Cnl. La diaspora burundaise résidant en Belgique n’est pas composée exclusivement de militants ou de sympathisants du Cnl. De plus, j’ai entendu dire de la bouche du président que les Inyankamugayo auraient quitté le Burundi par voie aérienne pour aller manifester à Bruxelles.

C’est une accusation gratuite. Si Magera comme Burundais résident en Belgique est soi-disant parmi les responsables de ces manifestations, cela ne veut en aucun cas dire qu’il a quitté Bujumbura pour Bruxelles parce qu’il n’habite plus le Burundi depuis les années 1990.

De toute façon, les migrations sont contrôlées, les services concernés peuvent vérifier les départs du Burundi, que ce soit par voie maritime, terrestre ou aérienne, pour connaître ces militants du Cnl qui ont quitté Bujumbura pour aller manifester à Bruxelles. Encore que, si des Burundais ont manifesté à Bruxelles, ils l’ont probablement fait avec l’autorisation préalable des autorités belges.

Je pense qu’une personne majeure répond de ses actes et ses paroles. Ce n’est pas au Cnl de répondre aux actes d’un quelconque membre de ce parti. Comme juriste de formation, le chef de l’Etat devrait le savoir très bien. Par ailleurs, dans son propos, le président s’est livré carrément à du complotisme. Lorsqu’il dit que nous sommes associés à des groupes qui sèment la terreur à l’Est de la RDC, je me dis que, soit ses services de renseignement lui font de faux rapports pour qu’ils continuent de bousiller l’argent des caisses de l’Etat, soit, il y a un agenda caché par rapport à cette question sécuritaire.

D’aucuns savent que la société civile congolaise déplore les actes de ces groupes terroristes. Et la liste que dresse cette société civile-là n’a jamais fait mention du Cnl. Par contre, elle parle de la présence des Imbonerakure et des forces armées burundaises.

Pour ce second groupe, le ministre de la Défense a démenti cette information et ce n’est pas moi qui vais le contredire. Après tout, s’il faut déployer ses troupes, il faut l’aval du Parlement et ce dernier n’a jamais été saisi par rapport à cela.

Alors si le président de la République veut que le Cnl s’exprime par rapport à ces manifestations, qu’il sache que le Cnl est à l’œuvre sur le terrain ici au Burundi. Ses organes y sont et son rapport actualisé a été fourni au ministre de l’Intérieur qui gère les partis politiques.

L’appel à manifester d’Aimé Magera qui se dit membre du Cnl n’engage-t-il donc pas votre formation politique ?

Cela ne peut nullement engager le Cnl. Par ailleurs, son nom ne figure nulle part sur la liste des responsables politiques du Cnl et ce, depuis sa création.

C’est un citoyen comme tant d’autres. Combien m’insultent ? Combien prennent le micro sur Rema Fm pour le faire ? A-t-on entendu le Gouvernement réagir ? Si on doit respecter la dignité des uns et des autres, on ne doit faire aucune exception. On doit respecter ceux du parti présidentiel comme ceux de l’opposition.

Et si quelqu’un enfreint la loi, il ne doit avoir affaire qu’à la loi. Le parti ne peut être responsable d’actes qu’il n’a pas commandités. Pourquoi devrions-nous répondre sur une manifestation spontanée à laquelle le parti n’a rien à voir ?

Si un Burundais résident à l’étranger se faisait attraper en possession de la drogue, serait-il du devoir du Gouvernement burundais d’intervenir ou n’appartient-il pas à ce burundais d’en répondre conformément à la loi en vigueur dans le pays dans lequel il vit ?

Alors, le président ne doit pas céder à la panique face à de mauvaises informations que lui véhiculent son parti ou ses services toujours enclins à semer la zizanie entre le pouvoir et ses citoyens. Par ailleurs, le Gouvernement burundais a des relations avec le Gouvernement belge. S’il y a quelque incident qui se produit sur le sol belge et qui ennuie le Gouvernement burundais, ce dernier traite cette question avec le Gouvernement belge. Pas avec un parti qui se trouve ici ou là.

D’ailleurs, c’est d’autant plus contrariant que le président demande des comptes au Cnl au regard de la façon dont il a lui-même a minimisé l’ampleur de cette manifestation. Au même moment, nous, nous étions ici à Bujumbura occupés à préparer la fête d’anniversaire de notre parti. Donc, nous étions très peu concernés par cette manifestation survenue à des centaines de milliers de kilomètres de là où nous étions.

Le président Ndayishimiye a émis le souhait que les conflits entre le pouvoir et des partis politiques soient réglés dans le cadre du Forum des partis politiques. Qu’en dites-vous ?

En prêchant cela, le chef de l’Etat essaie de fuir ses responsabilités : il dit que si une question est préoccupante, le débat doit avoir lieu au sein du forum politique. Est-ce que ce forum des partis politiques est une institution pour répondre à des questions plutôt dévolues à l’organisation administrative, par exemple ? Nos permanences ont été brûlées, saccagées, détruites, etc. Ce forum est-il jamais intervenu ? A-t-on vu une réaction de ce forum quand nos militants se font malmener et persécuter ?

L’interlocuteur d’un parti agréé, ce n’est pas le forum, ce sont les organes de l’Etat. Si nous devons fonctionner comme parti politique, nous nous référons à la Constitution, à la loi sur les partis politiques, à la loi sur les manifestations sur la voie publique et la loi sur les réunions dans l’espace public.

Le forum n’est mentionné nulle part dans la loi. Donc, si nous avons des sujets à débattre ou des problèmes à soumettre, nous en parlons à qui de droit c’est-à-dire avec les institutions de l’Etat. Comment devrait-on accepter que les problèmes des partis politiques soient gérés par un organe qui n’est régi par aucune loi burundaise ?

Quid du droit de manifester au Burundi en cas de désaccord également évoqué par le chef de l’Etat ?

Ce droit est consacré par la Constitution burundaise. Malheureusement, si on malmène des gens rassemblés pour une simple réunion dans une permanence, on n’accepterait pas non plus qu’ils manifestent sur la voie publique.

Par contre, s’il faut manifester pour soutenir le pouvoir, il n’y a aucune entrave. Mais si c’est pour exprimer un grief, c’est une autre histoire. Preuve en est les manifestations de citoyens durement réprimées dans les années 2013, 2014 et 2015. Des journalistes bastonnés car ayant osé revendiquer leurs droits, etc.

Qu’il y ait le droit de manifester est une chose, mais après, pouvoir le faire c’est autre chose.

Propos recueillis par Alphonse Yikeze

Forum des lecteurs d'Iwacu

2 réactions
  1. Mbariza

    Mu Burundi kuvuguruza uwutwara ntivyoroshe kuva kera na rindi. Samandari wenyene niwe yararekuriwe. Mu bihe tugeze mwo, reka imigambwe itari kubutegetsi ariko ishaka kubushishikako ibe samandari ! Kuvuga ibitagenda neza si ugutryoza uwutwara mbere vyomufasha gutwara neza gusumba.
    Mwomenya wa mugambi w-umukuru w-igihugu wo gutora abazokwumvikanisha bagatorera n-inyishu muvyo benshi bakunda kuza barashwanira ugeze he ?

  2. Mike

    Intéressant

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