Jeudi 11 septembre 2025

Société

Liberté de culte : Foi pour soi, Dieu pour tous

28/02/2014 et Commentaires fermés sur Liberté de culte : Foi pour soi, Dieu pour tous

L’enseignement comme cheval de bataille des missionnaires

Le président Bagaza n’a pas été tendre avec l’Eglise Catholique ©dr
Le président Bagaza n’a pas été tendre avec l’Eglise Catholique ©dr

Mgr Madaraga déclare que les colons font recours aux missionnaires pour la mise en place des écoles. Objectif : former des enseignants et fonctionnaires de l’Etat.
Ainsi, mentionne-t-il, des programmes scolaires sont élaborés, des conventions signées avec le Congo pour commencer la construction des écoles. Mgr Madaraga se rappelle qu’en 1948, ces conventions sont renouvelées pour permettre aux Pères Blancs de continuer à aider dans le secteur de l’éducation : « Ils deviennent des délégués diocésains. »

Et quand les Belges arrivent, Mgr Madaraga fait savoir que l’Eglise catholique reste dans les bonnes grâces du pouvoir colonial : « Ils mettent en place des lois qui favorisent la multiplication des infrastructures de développement comme les écoles, les églises et les dispensaires. »
Pr Gahama dénonce ce caractère discriminatoire des Allemands et Belges envers d’autres religions : « Ils empêchent les musulmans de fréquenter l’école à moins qu’ils soient baptisés. Ils se rabattirent sur les écoles coraniques.» Ce n’est que sous le roi Mwambutsa, qui lui-même avait refusé le baptême, avec la création des écoles officielles que les premiers musulmans connaissent le banc de l’école.

Quant aux protestants, Pr Joseph Gahama précise qu’ils sont venus à l’époque des Allemands : « Ils avaient érigé leurs églises à Rubura, Buye, Musema (Kayanza), à Kibimba (Gitega) et Matana (Bururi). Ils avaient aussi leurs propres écoles.»
Pour les combattre davantage, regrette Pr Gahama, en 1906, le pape signe un pacte d’alliance avec les Belges : « Toutes les écoles sont mises sous convention catholique. Sponsors et aides étatiques sont supprimés, seuls des subsides leur sont octroyés. »

La fin de la récréation

Jusque dans les années 1980, Joseph Gahama avoue que l’Eglise catholique avait gardé un grand pouvoir sur la population majoritairement analphabète : « Celle-ci accordait plus de respect à l’Eglise qu’à l’administration. Entre l’évêque et le gouverneur, le choix du peuple était clair. »
Pour casser ce mythe, se souvient Mgr Madaraga, le Chef de l’Etat Jean Baptiste Bagaza ferme les églises, les séminaires, les écoles et les journaux sous convention catholique. Les croix qui bordaient les rues sont déterrées, les Pères Blancs chassés… On ne peut pas servir deux maîtres à la fois et pas de perte de temps, se dit le président Bagaza : « Il faut s’atteler aux travaux de développement. »

Alors qu’une certaine opinion a accusé M. Bagaza de vouloir privilégier la religion musulmane suite aux relations de coopération existant entre le Bujumbura et Tripoli, sous le Colonel Mouammar Kadhafi, cheikh Ndijeje proteste : « Le président Bagaza a aussi interdit la prière de la mi-journée aux musulmans. »

Mgr Pierre-Antoine Madaraga ©Iwacu
Mgr Pierre-Antoine Madaraga ©Iwacu

Et la liberté de culte devint réalité

Depuis les années 90, le Pr Gahama soutient que les églises se sont multipliées à grande allure. Pour certains, avance-t-il, la religion est devenue du business en vue de récolter la dîme. Cependant, force est de constater que nul n’est aujourd’hui poursuivi pour son appartenance religieuse.
« Avec les fidèles des autres églises, nous cohabitons pacifiquement et entretenons de bonnes relations », soutient André Minani, fidèle de l’Église Méthodiste Libre de Migera. Selon ce quadragénaire, personne n’oblige autrui à aller prier là où il ne veut pas.
Toutes les religions, constate pasteure Léonie Nshimirimana, convergent sur l’amour du prochain : « Le respect mutuel s’impose. » Cheikh Ndijeje concède de consacrer plus d’énergie sur ce qui rassemble au lieu de ce qui divise.

Pourtant, Bernard Wakana, 64 ans, de la sous colline Hayiro en commune Mutaho (Gitega) n’est pas de cet avis : « Toutes ces religions qui ont vu le jour après l’église catholique sont des sectes, une émanation de la modernité. » Et d’insister : « Bien que mes enfants soient libres de prier où ils veulent, seul le baptême qu’ils ont reçu de l’Église catholique compte. Il est indélébile. »
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