Vendredi 26 avril 2024

Editorial

Les minerais en question

07/04/2023 7

La catastrophe survenue dans la commune Mabayi, province Cibitoke où treize orpailleurs de la mine d’or de Gafumbegeti sont morts surpris par les eaux pluviales m’a fait réfléchir longuement sur l’organisation du secteur minier au Burundi.

Par Léandre Sikuyavuga
Directeur du groupe de
presse Iwacu

Dans la vision 2025 via son Cadre stratégique de croissance et de lutte contre la pauvreté, deuxième génération (CSLPII), le secteur minier devrait constituer la base de l’économie burundaise à hauteur de 30% du produit intérieur brut (PIB). Ceux qui défendent cette thèse affirment que la contribution du secteur minier au PIB peut dépasser celui des filières Thé, Café et Coton.

Cela laisse entendre que le sol burundais regorge d’importantes réserves de minerais. Pourquoi alors malgré la grande richesse du sous-sol, la contribution à l’économie reste faible ?

Selon les géologues, les principales ressources naturelles du Burundi comprennent le cuivre, l’uranium, le nickel, l’étain, la tourbe, les terres rares, la platine, le tantale, le cobalt, ainsi que de petites quantités d’or, d’étain, de tungstène et de calcaire. Pour la Banque Mondiale, l’étain, le tantale et le tungstène constituent avec l’or, les principales exportations de minerais du pays.

Présenté de cette façon, le secteur minier présenterait une opportunité d’accroître sensiblement les recettes de l’Etat. Questions : Y a-t-il une politique minière au Burundi ? Le pays dispose-t-il de la carte minière pour savoir exactement la localisation des minerais exploitables ?

Les experts dénoncent surtout l’opacité du secteur artisanal, la contrebande, le manque de transparence et de coordination, la corruption, la mauvaise négociation des contrats comme principaux freins au développement du secteur minier.

Par ailleurs, plus d’un se demandent pourquoi l’Etat octroie des concessions des périmètres miniers au lieu de prendre en mains le secteur et tout superviser depuis la recherche des minerais jusqu’à l’exploitation et l’exportation.

L’Office burundais des mines et carrières était créé en vue de « mettre fin au chaos en la matière » pour un suivi régulier et une coordination des exploitations minières.

Dans l’un des conseils des ministres, le gouvernement a manifesté une volonté de prendre à bras-le-corps le dossier. Il a notamment été recommandé de prévoir des mécanismes permettant à l’Etat d’exploiter l’or, le conserver et le commercialiser. « Le Gouvernement, à travers les ministères en charge des finances et des mines, doit se donner un objectif et un chronogramme sur les quantités de réserves en or et en devises à disposer sur une période bien déterminée… La Banque de la République du Burundi devrait mettre en place une raffinerie permettant de transformer l’or en lingot ». De bonnes recommandations. Quelle est la réalité sur terrain ?

Somme toute, le secteur minier, s’il est bien géré, constitue un tremplin pour le développement de notre pays. Cependant, beaucoup reste à faire pour y mettre de l’ordre. Le gouvernement est appelé à faire des pieds et des mains et s’impliquer davantage.

Il ne suffit pas d’avoir la bonne volonté et jouer seulement le rôle de régulateur. Les pauvres orpailleurs engloutis par les eaux pluviales rappellent que c’est un secteur menacé. Et pas seulement par les eaux de pluies.

Forum des lecteurs d'Iwacu

7 réactions
  1. Jereve

    Où va cet or que nous obtenons des fois au prix des vies humaines, comme celles des orpailleurs de Gafumbegeti? Est-ce qu’il reste dans les banques burundaises pour justement soutenir la valeur de notre monnaie. Car je ne comprends pas pourquoi les burundais préfèrent acheter au prix fort les dollars et les euros alors qu’il y a moyen d’acheter de l’or qui reste dans tous les cas une valeur de refuge quand la monnaie est sujette à des fluctuations incontrôlables. Est-ce qu’on peut déposer de l’or dans une banque burundaise et au bon moment le récupérer pour acheter des devises par exemples? Peut-être que je laisse mon imagination divaguer, mais je sens qu’il y a quelque chose à faire avant d’expédier notre or je ne sais où pour enrichir l’étranger.

    • Stan Siyomana

      @Jereve
      Ce que vous dites est meme confirme par les traders des metaux precieux.
      « Advantages of gold trading
      There are certain reasons why traders prefer gold for trading. And here are the reasons why.
      Gold has historically been a good hedge against inflation. Inflation is the number 1 enemy of investors because it reduces the purchasing power of money. In times of turbulence, when the stock market is in trouble and cash is losing value due to low interest rates, gold can be an attractive asset… »
      https://fbs.com/analytics/tips/trading-gold-in-2023-37205

  2. Kabizi

    Un article a aussi été publié sur la mort de Manirumva.
    La justice n’a jamais voulu se saisir de l’affaire.
    Pourquoi?
    La réponse ou une partie de la réponse.
    Pourquoi n’a t on jamais trouvé les Egorgeurs des soeurs italiennes?

  3. Voltaire Kaziri

    Nous savons nous tous les bihangange qui étaient derrière l’exploitation des mines à Muyinga.
    Il y en a qui voient dans le secteur minier, une vache à lait pour la nomenklatura qui nous dirige. Comme au Congo voisin.
    Une bonne planification couperait les mamelles à têter.
    Pour avoir une concession minière, nous connaissons les intermédiaires qui amenaient les investisseurs (rapaces) jusqu’au sommet de l’Etat
    Unfortunately it is almost the same thing in corrupt countries. Evidemment à des degrés divers.
    Diversion à propos: La femme la plus riche d Afrique n’est autre que la fille du Pésident Angola.
    Question pour un champion: origine de cette fortune colossale

    • Stan Siyomana

      J’ai l’impression que tout simplement le Burundi est deja dans l’ere de la « Malediction des ressources naturelles » puisque nos bihangange/grands generaux/grands fonctionnaires deviennent grands proprietaires fonciers et grands proprietaires des cooperatives d’orpailleurs.
      « La « malédiction des ressources naturelles », parfois appelée malédiction des matières premières, est une situation économique paradoxale, caractérisée par la difficulté que rencontrent les nations possédant des ressources naturelles en abondance, en particulier le pétrole. Elle a été décrite la première fois en 1990, dans le livre de Richard Auty1…
      La captation de la rente générée par la vente des matières premières conduirait à des luttes de pouvoir qui déstabilisent l’activité économique des pays riches en ressources naturelles3… »
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Mal%C3%A9diction_des_ressources_naturelles

  4. Rududura Claver

    Le problème majeur du Burundi et de l’Afrique en général se situe au niveau de la planification et du respect de la chose publique. Comment un pays indépendant depuis 60 ans peut manquer de politique de politique minière alors que cela devrait être son atout pour se développer de par ses exportations? Une catégorie de gens profite de cette absence de vision. Le seul pays africain qui profite réellement de ses minerais suite à la transparence et le patriotisme des dirigeants est le Botswana. Que nos dirigeants s’en inspirent.

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Online Users

Total 4 946 users online