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Le parallélisme [1972/ Assassinat de Léandre Bukuru] fait par M. Nininahazwe est assez intriguant

05/05/2013 Commentaires fermés sur Le parallélisme [1972/ Assassinat de Léandre Bukuru] fait par M. Nininahazwe est assez intriguant

Le parallélisme fait par M. Nininahazwe est assez intriguant et met facilement mal à l’aise celui qui lit ses propos (il suffit de parcourir les commentaires précédents pour en prendre la mesure). En effet, comment comprendre, comment expliquer, logiquement, que quelqu’un qui a souffert puisse faire souffrir pareillement ?{ Par Nishelo}

Est-il possible de faire une tentative d’explication "scientifique" du pourquoi d’un tel déchainement de violence ? de cruauté ? Ce qui se passe ces derniers temps au Burundi, ne serait-il pas cette alchimie, expliquée par la psychologie et la sociologie, de la victime à se transformer en bourreaux ?

S’il est exact de dire que toutes les victimes ne deviennent pas forcément des bourreaux, il faut reconnaitre selon certains travaux que tous les bourreaux ont été victimes d’une façon ou d’une autre.(*)

Pour s’en convaincre, si on laisse la sphère politique burundo-burundaise, le parallélisme fait par M. Nininahazwe, trouve des similitudes dans d’autres domaines. De façon très rapide, j’en cite trois très différents l’un de l’autre, mais assez simple à saisir.

Cas No.1- Le milieux universitaire : Université du Burundi

Il est de notoriété publique (burundaise), surtout ces derniers temps, que la réussite et le succès dans son parcours à l’U.B. est un vrai parcours du combattant. Le portrait est donné du professeur qui semble faire "tout" pour que réussisse le plus petit nombre. Le caractère à la fois "redouté", "craint" et "respecté" du professeur réside dans sa capacité à te faire échouer. Est un "héros", l’étudiant qui a réussi à passer entre les mailles du filet du professeur x ou y. [Bien entendu, tous les professeurs, ne sont pas ainsi, ceci n’est qu’une caricature, qu’un cliché, lequel ne manque pas de vérité non plus…].

Curieusement, l’étudiant qui « survit » et arrive à émerger, malgré toute l’adversité, s’il a la chance d’obtenir une bourse et de décrocher son doctorat, à son retour à l’U.B comme professeur reproduira consciemment ou inconsciemment, le modèle par lequel il aura passé. L’on se serait dit que puisqu’il a souffert autant, il devrait accorder à ses futurs étudiants de bien meilleures conditions… Très curieusement, non. [Ici, je souligne une tendance générale, bien évidemment des exceptions existent au modèle du "professeur-bourreaux".]

Cas No.2- Les mutilations sexuelles : l’excision

Peut-être est-ce l’exemple type de la mécanique "victime" devenant "bourreaux".

Comment comprendre de façon "logique", "rationnelle" qu’une femme ayant subit une telle horrible souffrance pendant son tendre jeune âge en arrive à faire subir à sa fille, sa nièce, sa voisine les mêmes atrocités ? Le plus ahurissant encore, c’est que ce ne sont que les femmes qui le font. Les hommes le pratiqueraient que l’on "comprendrait" que c’est parce qu’ils ne ont pas connu, dans leur propre chair, cette souffrance. Et pourtant, triste vérité, les victimes d’hier, sont devenus les bourreaux d’aujourd’hui.

Cas No.3- Le ménage : les violences conjugales

La probabilité est très grande qu’un enfant, à l’âge adulte, traite son conjoint de manière similaire au traitement de son père vis-à-vis de sa propre mère. Bien évidement, cela n’est pas le seul paramètre, ni la seule explication à la violence domestique. Cependant, ce type de réplication ou de reproduction du même comportement passe des parents à l’enfant devenu adulte.

Pour revenir au cas qui nous intéressent, bien que semblant peu « rationnel », peu « logique » et hors de tout « bon-sens » et malgré l’extrême gêne sentie par plusieurs suite au parallélisme fait par M. Nininahazwe, son propos aurait donc une explication.

C’est pourquoi, dans la confrontation actuelle entre les deux parties, à savoir le Pouvoir (principalement le parti CNDD-FDD) et l’ADC Ikibiri (principalement le FNL et le MSD), il serait plus que catastrophique de laisser les adversaires à eux seuls. En effet, dans un retour de « victime » à « bourreaux », seule une autorité externe peut faire cesser la descente aux enfers. Dans le cas du Burundi, cette autorité (formelle ou informelle) pourrait trouver corps dans des structures ou des organisations pouvant disposer d’une certaine capacité d’influence sur les acteurs en conflit. Il s’agirait donc de la Communauté des bailleurs, (disposant d’une influence financière considérable) et des médias et la société civile, (disposant d’une capacité à influencer l’opinion nationale et international). Également, et c’est ce qui devrait être le plus naturel, ce « sens d’autorité » viendrait de celui en qui toute la nation burundaise a confié sa destinée d’ici 2015.

Le rapprochement fait par M. Nininahazwe entre des situations séparées de quatre décennies l’une de l’autre reste très troublant et, malheureusement, ne serait pas une nouveauté dans les comportements individuels et sociaux.
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(*)Pour plus de développements :

1. Schechter DS, Willheim E (2009). The Effects of Violent Experience and Maltreatment on Infants and Young Children. In CH Zeanah (Ed.). Handbook l’Infant Mental Health—3rd Edition. New York : Guilford Press, Inc. pp. 197-214.

2. Daniel Schechter, Erica Willheim (2009). Disturbances of attachment and parental psychopathology in early childhood. Infant and Early Childhood Mental Health Issue. Child and Adolescent Psychiatry Clinics of North America, 18(3), 665-687.

3. http://fr.wikipedia.org/wiki/Maltraitance

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