Mercredi 13 novembre 2024

Politique

L’administration burundaise à l’épreuve de la vision 2040-2060 : Entre défis et perspectives

13/06/2024 4
L’administration burundaise à l’épreuve de la vision 2040-2060 : Entre défis et perspectives

Lors d’une séance de moralisation à Gitega, le Président Evariste Ndayishimiye a dévoilé sa vision pour un Burundi développé d’ici 2060. Cependant, la mauvaise gestion des ressources humaines, la corruption et la centralisation des services publics posent de sérieux défis. Atteindre cette vision exigera des réformes profondes et une forte volonté politique.

Pour le chef de l’État, Evariste Ndayishimiye, l’objectif de la vision 2040-2060 est d’améliorer la qualité de vie des Burundais d’ici 2040 et d’atteindre le statut de nation développée d’ici 2060. Cette vision se concentre sur le bien-être social, économique et l’épanouissement général de la population. Il assure que cette vision transformera le Burundi en une nation riche et saine, où les citoyens jouiront d’une bonne qualité de vie en termes de revenus et d’accès aux services sociaux. Ces aspirations se traduisent par une espérance de vie prolongée et une croissance économique durable.

Lors d’une séance de moralisation qu’il a animée à Gitega pour les membres du gouvernement, les hauts cadres et les cadres nommés par décret le 8 juin 2024, le président a souligné l’importance de l’administration pour atteindre cette vision.

Normalement, l’administration publique moderne, selon Max Weber, repose sur une action rationnelle où la logique de l’efficacité et de la méritocratie prédomine sur celle du sentiment. Cependant, l’administration publique burundaise est confrontée à des problèmes comme la non-décentralisation des services publics, le manque de soutien des partenaires au développement, la corruption, ainsi que le déficit des capacités humaines et institutionnelles.

Une politique de gestion des ressources humaines très défaillante

La mauvaise gestion des ressources humaines se manifeste souvent par des recrutements, affectations et promotions qui ne sont pas toujours basés sur des critères objectifs et transparents. Même si les bailleurs de fonds et les partenaires au développement peuvent faire progresser certains secteurs socio-économiques, la question de la compétence reste problématique dans l’administration publique burundaise et dans de nombreux secteurs étatiques. La plupart des fonctionnaires sont accusés de manquer d’expérience et de professionnalisme dans la gestion des affaires publiques, et ils ignorent souvent les cadres professionnels recrutés sur des bases légales et rationnelles.

Par conséquent, le bon fonctionnement des institutions, crucial pour la mise en œuvre des réformes, est entravé par un manque de connaissances sur le service public et une faible volonté politique de rendre des changements concrets. Dans ce contexte, les obstacles majeurs à la réforme de l’administration publique restent le manque de planification stratégique et de rationalité.

Le phénomène de corruption dans l’administration publique

Selon le dernier classement de l’ONG Transparency International, le Burundi occupe la 171e place sur 180 pays. Bien que la corruption ait semblé être mieux contenue avant la crise de 1993, le dérèglement de l’autorité et les dysfonctionnements de l’État post-crise ont favorisé la prolifération des comportements corruptifs.

Ces comportements ont progressivement gangrené le système administratif et politique, constituant aujourd’hui l’un des principaux obstacles au développement, à la stabilité politique et au fonctionnement normal de la démocratie. La lutte contre ce fléau représente donc un enjeu majeur pour le pays. Selon Julien. Nimubona et Christophe Sebudandi, pour opérer des réformes efficaces ayant un réel impact sur la gouvernance, cette lutte doit reposer sur une analyse minutieuse de la corruption, de ses causes profondes, de ses dimensions et de ses conséquences.

Les citoyens perçoivent les secteurs publics de l’éducation, de la santé, de la justice, de la police, de l’administration et de la distribution de l’aide humanitaire comme étant les plus affectés par la corruption. D’autres secteurs, tels que les marchés publics, les services des douanes ou des impôts, sont également touchés. La corruption dans l’administration publique ou communale est une réalité bien connue.

Ainsi, la corruption entretient une carence en ressources humaines performantes et professionnelles, rendant l’État burundais incompétent et souvent classé parmi les États ayant failli à leurs missions régaliennes de base. Dans cet esprit, il sera difficile pour le Burundi de devenir un pays émergent en 2040 et un pays développé en 2060.

Lors de la séance de moralisation, le président de la République a souligné : « Comment peut-on expliquer que des lettres d’autorisation pour un entrepreneur désirant construire une usine ou une autre entreprise restent des mois, voire des années dans les tiroirs, simplement parce que l’entrepreneur n’a pas satisfait les exigences de la personne chargée de signer ce document ? » Stigmatisée pour son incapacité à servir le peuple en raison de pratiques corruptives, l’administration burundaise est devenue de plus en plus fragile, faible et caractérisée par un manque d’équité.

Deux poids deux mesures dans le traitement des dossiers administratifs

La manière dont le dossier des salaires indûment payés à certains dignitaires a été traité révèle la pratique des « deux poids deux mesures » dans le traitement des dossiers administratifs par l’autorité. Selon les sources du MFPTE,(
Ministère de la Fonction publique, du Travail et de l’Emploi)  1801 fonctionnaires fictifs étaient payés doublement chaque mois jusqu’en 2010. Fin mars 2023, le MFPTE a suspendu temporairement les salaires de 432 fonctionnaires suspectés d’être fictifs. « Nous suspectons des fonctionnaires fictifs payés régulièrement sans travailler depuis plusieurs années, » a déclaré un fonctionnaire du MFPTE sous couvert d’anonymat. Ce dernier explique qu’il s’agit de personnes en poste technique avant d’accéder à des postes politiques, ainsi que de morts, retraités et personnes en abandon de poste. Cette magouille ne peut se réaliser sans la complicité des gestionnaires du personnel et des finances.

L’existence de tels dossiers mal gérés affecte la capacité de l’État à faire face aux dépenses de personnel et pèse sur les administratifs chargés de la prise de décision sur les réformes nécessaires pour le développement du Burundi.

Problématique de la décentralisation de certains services publics

La décentralisation administrative consiste à transférer des compétences importantes aux autorités locales pour la gestion des services publics et des ressources. Dans le cadre de la réforme de l’administration publique, le gouvernement a commencé à mettre en œuvre la politique de décentralisation de certains services publics à travers les Guichets Uniques Provinciaux (GUP). Cependant, à ce jour, presque toutes les démarches administratives restent centralisées à l’exception de l’état civil, centralisé au niveau communal.

Cette centralisation implique des déplacements plus longs et coûteux pour les citoyens résidant loin de la capitale, sans garantie de la durée du séjour nécessaire pour finaliser les démarches. Les guichets étant faiblement dimensionnés, les temps d’attente peuvent dépasser une journée. Cette situation pénalise les plus vulnérables. Un enseignant résidant dans la province de CANKUZO, commune MISHIHA, rencontré au bureau du MFPTE, confie qu’il est à Bujumbura depuis plus de deux semaines et attend toujours la résolution de son dossier.

Ce nombre croissant de demandeurs de services publics alimente certaines pratiques corruptrices dans l’administration burundaise.

Des réformes ont été initiées dans le secteur de l’administration publique et devraient contribuer à atteindre la vision 2040-2060 en consolidant l’État burundais. Cependant, des aspects nécessitent encore des interventions et des réponses adaptées.

Forum des lecteurs d'Iwacu

4 réactions
  1. Stan Siyomana

    Le president Evariste Ndayishimiye recommande les burundais de lire le Livre du deuteronome, chapitre 7, paragraphes 7-11) pour mieux comprendre la Vision 2040-2060.
    « Mugende musome mugitabo c’amategeko, kukigabane 7, kukarongo 7 gushika 11. Murabe igihugu Imana yasezeraniye bene Israel, murabe ko kidasa n’igihugu cacu… »
    https://www.youtube.com/results?search_query=mashariki+tv+burundi
    « 07 Si le Seigneur s’est attaché à vous, s’il vous a choisis, ce n’est pas que vous soyez le plus nombreux de tous les peuples, car vous êtes le plus petit de tous.

    08 C’est par amour pour vous, et pour tenir le serment fait à vos pères, que le Seigneur vous a fait sortir par la force de sa main, et vous a rachetés de la maison d’esclavage et de la main de Pharaon, roi d’Égypte.

    9 Tu sauras donc que c’est le Seigneur ton Dieu qui est Dieu, le Dieu vrai qui garde son Alliance et sa fidélité pour mille générations à ceux qui l’aiment et gardent ses commandements.

    10 Mais il riposte à ses adversaires en les faisant périr, et sa riposte est immédiate.

    11 Tu garderas donc le commandement, les décrets et les ordonnances que je te prescris aujourd’hui de mettre en pratique…. »
    https://www.aelf.org/bible/Dt/7

  2. Stan Siyomana

    C’est Dieu lui-meme qui a dit au president Evariste Ndayishimiye que le Burundi sera un pays emergent en 2040 et un pays developpe en 2060.
    « N’ukuvuga IMANA YARABITWERETSE KO UBURUNDI TUGIRA DUTUNGE, BUKOMERE.
    Irabitwereka neza. Duhejeje gushira kurupapuro neeza ivyo Imana yatweretse neza mubwenge bwacu, turerekana ingene Uburundi buzotera imbere mu 2040 buzoba ari igihugu cifashe, mu 2060 igihugu giteye imbere… »
    https://www.youtube.com/results?search_query=mashariki+tv+burundi

  3. Stan Siyomana

    1. Vous ecrivez: « Lors d’une séance de moralisation à Gitega, le Président Evariste Ndayishimiye a dévoilé sa vision pour un Burundi développé d’ici 2060…
    Lors d’une séance de moralisation qu’il a animée à Gitega pour les membres du gouvernement, les hauts cadres et les cadres nommés par décret le 8 juin 2024, le président a souligné l’importance de l’administration pour atteindre cette vision… »
    2. Mon commentaire
    Dernierement j’ai vu une video sur Youtube ou le professeur Palamagamba John Kabudi (ancien ministre des affaires etrangeres de la Tanzanie) a explique comment Mwalimu Julius Kambarage Nyerere en est arrive a la Declaration d’Arusha: Nyerere a fait le tour du pays, il a fait un discours dans un village de Singida (Region au nord-centre de la Tanzanie) et la Declaration d’Arusha reprend l’essentiel qui etait dans ce discours.
    Dans certaines bibliotheques a travers le monde, ou sur la toile, vous pouvez lire cette declaration.
    « La Déclaration d’Arusha est un discours prononcé le 5 février 1967 par Julius Nyerere, alors président de la Tanzanie : cette déclaration fixe les objectifs du TANU, le parti au pouvoir en Tanzanie, et définit les grandes lignes de l’Ujamaa, c’est-à-dire l’idée que se faisait Nyerere du socialisme pour développer l’économie du pays. La déclaration appelle à développer l’économie à travers un socialisme africain et la mise en place d’une administration de village via un programme de villagisation… »
    https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9claration_d'Arusha

    TANU, Dar es Salaam. (1967). The Arusha Declaration and TANU’s Policy on Socialism and Self Reliance. Dar es Salaam:Tanzania. Published by the Publicity Section, TANU, Dar es Salaam.

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