Samedi 09 novembre 2024

Économie

La rareté du sucre, une problématique récurrente  

04/09/2023 Commentaires fermés sur La rareté du sucre, une problématique récurrente  
La rareté du sucre, une problématique récurrente  
Le sucre reste introuvable.

Le prix du sucre a été revu à la hausse à la grande surprise des consommateurs dans tout le pays. Mais cette denrée de première nécessité reste introuvable, surtout en mairie de Bujumbura. La problématique est connue et assumée par les institutions. Mais l’autorité habilitée peine à trouver une solution durable.

Au centre-ville de Bujumbura, le sucre est très rare.  Quelques sacs de sucre ont été donnés à une boutique de la coopérative Sangwe sur l’avenue de France ce lundi 28 août 2023.

Les consommateurs ont accouru de partout pour acheter. Après quelques dizaines de minutes, toute la quantité était écoulée sous les yeux impuissants des acheteurs sur une longue file d’attente.

Les grossistes du centre-ville grincent les dents. Ils disent qu’ils ne sont plus approvisionnés en sucre. « Je ne me souviens même pas la date où j’ai reçu le sucre de la part de la Sosumo », affirme un grossiste interrogé lundi 28 août 2023. Il était partenaire de la Sosumo depuis très longtemps et se demande pourquoi maintenant, il n’est pas sur la liste des grossistes qui s’approvisionnent à la Sosumo.

Il est en colère contre la nouvelle directrice commerciale de la Sosumo qui a son bureau à Bujumbura. « Depuis son entrée en fonction, il y a des mois aucun grossiste au centre-ville n’a jamais eu même un sac de sucre à commercialiser ».

Manque de communication

Il regrette de plus que la Sosumo ne communique pas. « Nous ignorons quand le sucre sera distribué, nous ignorons même les grossistes qui s’approvisionnent à la Sosumo.

Ce commerçant fait savoir qu’il a été visité par un cadre de la Sosumo pour voir s’il a un espace suffisant et respectant les normes pour être grossiste. Selon lui, le cadre avait bien apprécié son magasin, pourtant, il ne figure pas sur la liste et se pose des questions.

 

Il est découragé et ne va plus faire des réclamations. Or, ce commerçant fait savoir qu’avant il avait droit à 80 sacs de 50 kilos à chaque approvisionnement.

Une autre grossiste au centre-ville confie que son dernier approvisionnement date du mois de mai 2023. Sans dire beaucoup de chose, elle pense que la Sosumo n’a pas de sucre suffisant, car pour le peu du sucre qui est distribué, seules les alimentations sont privilégiées.

Plaidoyer d’un administratif à la base

Ces commerçants démentent les déclarations de certaines autorités qui disent que les grossistes refusent de s’approvisionner. « Ce sont ces autorités mêmes qui spéculent sur le sucre », accuse une grossiste au centre-ville.

Les grossistes au centre-ville de Bujumbura s’interrogent sur la capacité de production de la Sosumo. Certains pensent que le renouvellement des cannes à sucre que la Sosumo avait annoncé n’a pas réussi. Ils demandent à la Sosumo de rendre disponible la quantité suffisante pour la population.

Eric Ndayiziga, chef de quartier « Centre-ville » révèle qu’en août, seul un commerçant et la coopérative Sangwe de ce quartier ont pu avoir du sucre, une tonne chacun. Une quantité qu’il juge très peu dans ce quartier très fréquenté dans les heures de services. Il déplore que beaucoup de commerçants du quartier ne reçoivent plus de la part de la Sosumo.

« Nous ignorons pourquoi. Si réellement à la Sosumo, il y a du sucre, nous souhaitons qu’il soit mis de nouveau sur la liste », plaide cet administratif à la base. Chaque consommateur, soutient-il, pourrait trouver où acheter le sucre.

Selon lui, la coopérative Sangwe avait droit à deux tonnes à chaque approvisionnement, une dizaine de commerçants grossistes du quartier Centre-ville pouvaient s’approvisionner jusqu’à 2, 3, voire 4 tonnes mais aujourd’hui, ils ne reçoivent rien. La question étant connue par sa hiérarchie, il espère qu’une réponse pourra être apportée.

Certains administratifs à la base indexés

Pierre Nduwayo : « Certains administratifs ont été surpris en train de cacher le sucre »

La pénurie du sucre concerne tout le pays et inquiète Pierre Nduwayo, président de l’Association burundaise des consommateurs (Abuco). Il déplore un rôle avéré de certains responsables administratifs. « Certains ont été surpris en train de cacher ce produit », accuse-t-il. Nduwayo doute de plus que la promesse de l’autorité compétente d’importer le sucre pour compléter la production de la Sosumo n’a pas été tenue.

Il demande à la Sosumo d’expliquer pourquoi la mesure n’a pas été mise en application alors que la réalité sur terrain montre que cette société n’est pas capable de satisfaire la demande.

Et de recommander que la volonté de la plus haute autorité du pays qui prône que les entreprises ou usines de transformations alimentaires importent eux même le sucre dont ils ont besoin soit respectée.

Les élus du peuple préoccupés

Les élus du peuple ne cachent pas   leurs préoccupations par rapport à la rareté du sucre lors des questions orales avec débat adressés au ministre du Commerce.

Pour Jean-Claude Hasabintwari, député, le constat est que la production de la Sosumo ne peut plus satisfaire la demande. « La puissance installée de la Sosumo est de 20 mille tonnes alors que le Burundi a besoin de 35 mille tonnes », a-t-il livré avant de regretter que la production de la Sosumo varie actuellement de 15 à 16 mille tonnes.

Or, explique cet élu du peuple, les unités de transformation des jus à base du sucre se sont multipliées. Il donne un exemple d’une qui a besoin de 48 tonnes par an. Donc, la Sosumo n’est pas en mesure de satisfaire la demande et propose que toutes les usines qui font la transformation aillent importer elles-mêmes le sucre dont elles ont besoin.

Faisant allusion aux informations selon lesquelles certains grossistes refusent d’aller s’approvisionner craignant de perdre, Evariste Kayobera, lui, propose à la Sosumo de hausser le bénéfice du commerçant par kilo de sucre pour les motiver à s’approvisionner.

Il plaide notamment pour les commerçants de Karusi qui lui ont expliqué qu’ils gagnent très peu : « Un sac de sucre acheté à la Sosumo à 159 000 BIF est transporté à 2000 BIF jusqu’à Karusi. Le chargement et le déchargement coûtent 600 BIF. Si par exemple ce sac est conduit en commune de Gitaramuka de cette province, le commerçant ajoute 2000 de transport. »

D’après le député Hasabintwari le Sac arrive à Gitaramuka à 164 100. Détaillés à 3300 BIF, prix officiel, le député explique que le commerçant a un bénéfice de 900 BIF estimé très peu, d’où le désintéressement des grossistes.

Des mesures de redressement de la situation

Le président de l’Assemblée nationale a demandé à la ministre en charge du Commerce de rayer sur la liste des grossistes du sucre tous les commerçants spéculateurs. « C’est incompréhensible que des gens privilégiés s’arrogent le droit de cacher le sucre pour le donner à qui ils veulent », s’est indigné Daniel Gélase Ndabirabe.

Il pense que si le sucre était partagé de façon équitable, il n’y aurait plus de problème. Il a demandé à la ministre du Commerce de mettre en place des mécanismes pour que le sucre et d’autres produits puissent être partagés équitablement aux consommateurs. Et de déplorer que certains exportent frauduleusement le sucre alors que le marché local n’est pas satisfait.

Marie Chantal Nijimbere : « Celui qui était chargé de suivre que la distribution soit faite pour l’intérêt du citoyen devient complice»

Le ministre Marie Chantal Nijimbere a, dans ses réponses, pointé du doigt les spéculateurs. Et d’expliquer : « Après que le sucre est produit ou importé par la Sosumo, celle-ci présente au ministère la liste des grossistes et la quantité de sucre qui sera donnée province par province pour informer à notre tour les responsables administratifs qui aident dans le suivi de la distribution. Le ministère est aussi représenté au niveau des provinces. »

Mais, déplore-t-elle, l’obstacle est que les questions dans le domaine du commerce sont d’ordre structurel. « Celui qui était chargé de suivre que la distribution soit faite pour l’intérêt du citoyen devient complice. »

La question du sucre est préoccupante jusqu’à la plus haute autorité du pays. Le 31 août 2023, une retraite des grossistes du sucre présidé par le chef de l’Etat a eu lieu dans la capitale politique Gitega.

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