Vendredi 27 juin 2025

Politique

Droit dans ses bottes, l’opposition persiste et signe

Droit dans ses bottes, l’opposition persiste et signe
Évariste Ndayishimiye : « La vie d'un pays ne se limite pas aux postes politiques, rassurez-vous, nous n'oublierons personne ! »

Réunis à Gitega sous la présidence du Chef de l’Exécutif burundais, les acteurs politiques, les membres de la CENI, les anciens chefs d’État et quelques délégués de la société civile ont évalué le processus électoral du 5 juin. Même si la CENI défend la régularité des scrutins, l’opposition dénonce toujours des « irrégularités majeures ». Des voix sages en appellent à l’apaisement et à la responsabilité.

C’est dans la capitale politique du pays, Gitega, que s’est tenue ce mercredi 25 juin l’évaluation à mi-parcours des législatives et des communales du 5 juin dernier.

Cette rencontre de haut niveau, organisée sous les auspices du président Évariste Ndayishimiye, a vu la participation de plusieurs personnalités dont les représentants de l’opposition, quelques diplomates ainsi que deux figures historiques : les anciens présidents Sylvestre Ntibantunganya et Domitien Ndayizeye.

Dans la salle archicomble, tous les regards étaient tournés vers les partis d’opposition, en l’occurrence les représentants des partis CNL et UPRONA. Bon nombre d’invités doutaient de leur participation à cette sorte de conclave.

Dans cette « évaluation », la CENI, par la voix de son président Prosper Ntahorwamiye, n’a pas fait dans la dentelle : il a tenu à montrer, documents à l’appui, que toute la procédure électorale a respecté scrupuleusement la loi du début à la fin du processus.
« Ceux qui affirment que la CENI a été partiale veulent seulement montrer qu’ils existent toujours politiquement, sinon personne ne pourra nous contredire sur notre indépendance. S’il y avait eu quelques imperfections, sachez bien que cela ne peut conduire en aucun cas à contester les élections et les résultats », a-t-il plaidé.

D’après lui, de la planification jusqu’à la proclamation des résultats, la CENI a agi dans le strict respect de la loi. Il indique qu’ils étaient toujours en étroite collaboration avec toutes les parties sans distinction aucune.

Au moment où la Commission électorale nationale indépendante (CENI) dressait un bilan plus que reluisant que son président a même qualifié « d’historique et de globalement satisfaisant », chez les partis d’opposition le ton est tout autre.

Les partis CNL, UPRONA, Sahwanya Frodebu, entre autres, ont encore une fois dénoncé une série d’irrégularités ayant entaché toutes les étapes du processus.
Ils n’ont pas tardé à sortir de leurs gonds en parlant « d’irrégularités majeures qui ont faussé les résultats dans tout le pays ». Tout un réquisitoire : des observateurs expulsés, des mandataires refoulés et des dépouillements opaques.
« Si vous empêchez nos mandataires de faire leur travail, si les CECI rejettent sans explications les listes de nos mandataires, si les présidents des bureaux de vote font le dépouillement après avoir fait sortir nos mandataires et les différents observateurs, même les journalistes, vous qualifiez cela de juste et de régulier ! », a fulminé Nestor Girukwishaka, président du parti CNL. « C’est très étonnant que dans un bureau où j’ai moi-même voté, le parti CNDD-FDD gagne avec 100 % des votants. Je me demande où est passée ma voix ».

Même sentiment de frustration chez l’UPRONA où son président, Olivier Nkurunziza, n’a pas caché son désespoir. « C’est comme si cette évaluation cherche à cautionner les irrégularités et les manquements graves des agents et représentants de la CENI et ses démembrements ».
Selon lui, il ne peut pas y avoir d’élections libres et transparentes quand d’honnêtes citoyens sont forcés de voter pour un parti qui n’est pas de leur choix. « Les membres des bureaux de vote entraient dans les isoloirs avec les votants ».

Il a aussi déploré que beaucoup de membres des partis d’opposition n’ont pas eu leurs cartes d’électeurs alors qu’ils se sont fait inscrire. « Quand nous contestons les résultats, vous nous taxez de perturbateurs, de mauvais perdants. Nous n’allons pas appeler nos militants à contester les élections mais sachez bien que nous continuerons à réclamer pacifiquement que des enquêtes soient faites et nous avons des preuves accablantes de tout le pays ! »

Une victoire légitime du CNDD-FDD saluée par ses partisans

D’après les résultats de cette évaluation, le CNDD-FDD a confirmé son emprise totale sur la scène politique nationale en raflant l’ensemble des sièges. Une victoire totale que le parti au pouvoir justifie par sa proximité avec le peuple.

« Cette confiance massive montre que notre action répond aux attentes de la population. Nous respectons les règles, et nous gagnons par les urnes. Si vous n’allez pas sur le terrain, si vous préparez les élections pendant seulement ces deux semaines de campagne, comment voulez-vous que les gens votent pour vous ? », a demandé Révérien Ndikuriyo, le secrétaire général du CNDD-FDD.
Prenant la parole, le président de la République a fait savoir que beaucoup d’eau a déjà coulé sous les ponts. Selon lui, les vainqueurs et les vaincus sont tous des Burundais et partagent le même destin.

Il a indiqué sa disponibilité à écouter l’opposition, mais la renvoie à ses responsabilités : « Les vrais démocrates acceptent aussi la défaite ! Je suis sûr que vous ne croyez pas en ce que vous [dites]. Vous le faites pour nous distraire seulement. Mais tranquillisez-vous, la vie d’un pays ne se limite pas aux postes politiques, nous avons besoin de tout le monde. Je vous assure, nous n’oublierons personne ! »

Des mots que certains ont pris comme une occasion de faire leur plaidoirie pour leur survie en suppliant le Numéro Un burundais de se souvenir de ceux qui n’ont pas gagné les élections mais qui ont tout laissé pour l’intérêt de la Nation.

Après ce message, la plupart des intervenants ne faisaient que féliciter le parti vainqueur en jurant la main sur le cœur de « respecter les résultats des scrutins et de soutenir la Vision déjà mise en œuvre d’un pays émergent en 2040 et d’un pays développé en 2060 ».

Un appel à la responsabilité lancé par les anciens chefs d’État

Dans la capitale politique, l’évaluation à mi-parcours des législatives et des communales remportées haut la main par le CNDD-FDD a mis en lumière deux récits parallèles : celui d’un scrutin maîtrisé, brandi par le pouvoir, et celui d’un rendez-vous électoral raté, dénoncé par l’opposition.

Entre ces deux versions, la voix des anciens présidents appelle à la tempérance et à l’esprit républicain. Moment fort de cette évaluation : l’intervention conjointe des présidents Sylvestre Ntibantunganya et Domitien Ndayizeye.

Dans une rare prise de parole publique à deux voix, les ex-chefs d’État ont exhorté à l’unisson tous les acteurs à la retenue et au sens de l’intérêt supérieur de la Nation.
« Le Burundi a trop souffert de crises post-électorales. Ce qui nous unit doit être plus fort que ce qui nous divise. L’image du pays ne doit pas être abîmée par des pratiques ou des discours irresponsables », a déclaré Domitien Ndayizeye.

Et à Sylvestre Ntibantunganya d’ajouter en soulignant l’importance du dialogue : « En tant qu’anciens chefs d’État, nous avons le devoir moral de rappeler à tous la nécessité du respect mutuel et du recours aux voies légales pour toute contestation ».

La société civile, de son côté, appelle à un cadre de dialogue renouvelé et inclusif. « L’heure est à l’écoute, pas à l’arrogance. Nous appelons le président de la République à ne pas tomber dans la politique partisane. Qu’il nous donne des personnes dignes, des hommes et des femmes qu’il nous faut et aux places qu’il faut », a averti Gabriel Rufyiri, représentant de l’OLUCOME.

Selon lui, l’avenir dépendra désormais de la capacité des institutions à garantir l’équité, de la maturité politique des acteurs et de la volonté réelle de consolider la paix sans sacrifier la transparence.


Le Code électoral ignoré ? La controverse enfle après le verdict de la Cour constitutionnelle

La décision de la Cour constitutionnelle, rendue ce vendredi 20 juin, validant les résultats des élections législatives du 5 juin, a suscité incompréhension et colère au sein de l’opposition. Cette juridiction a en effet jugé « non fondés, pour absence de preuves » les multiples recours déposés par des partis politiques réclamant l’annulation du scrutin.
La Cour constitutionnelle a estimé que les recours de certains partis ne sont pas fondés par absence de preuves

Dans leurs recours, les irrégularités documentées et dénoncées par une large coalition incluant des partis comme la CNL, l’UPRONA, le CDP, la Coalition Burundi Bwa Bose, peignent le tableau d’un processus électoral entaché de violations flagrantes et systématiques du Code électoral.

Le principal motif d’irrecevabilité invoqué par la Cour, l’absence des formulaires F2 censés attester des observations, se heurte frontalement aux accusations d’expulsion violente des mandataires chargés justement de produire ces preuves.

Les recours déposés auprès de la Cour constitutionnelle, notamment par le CDP, l’UPRONA, la Coalition Burundi Bwa Bose ainsi que le CNL, dressent une liste de manquements observés à travers le pays, constituant autant de violations d’articles clés du Code électoral.

Il y a atteinte aux principes fondamentaux du suffrage (Article 2) : Les plaignants affirment sans détour que « le scrutin du 5 juin 2025 n’a été ni secret, ni libre, ni transparent ».
Ils notent également le non-respect des horaires et de la durée du scrutin (Article 36) : « Or, plusieurs bureaux de vote ont ouvert à 4 heures du matin, avant l’arrivée de nos mandataires et ont fermé à 14 heures, avant que tous les électeurs ne votent », a expliqué le parti CDP. Les autres partis politiques ainsi que l’Église catholique avaient déjà évoqué ces cas avant la proclamation des résultats provisoires des élections.

Article 37. (…), « Avant l’ouverture du scrutin, le bureau électoral doit s’assurer que le nombre de bulletins de vote est suffisant pour couvrir les opérations de vote en tenant compte des détériorations éventuelles. » Cet exercice n’a pas eu lieu, certaines urnes étant remplies déjà de bulletins de vote avant 6 heures. Les présidents des bureaux de vote ne permettaient pas de faire ce genre d’exercice », a avancé le parti CDP dans son recours auprès de la Cour constitutionnelle.

Le principe fondamental du vote secret, garanti par l’article 39 du Code électoral, a été systématiquement bafoué. Le parti CDP a dénoncé dans son recours : « Plusieurs bureaux de vote dont ceux de Rubirizi, Tenga, Nyamitanga, Marangara… exigeaient des électeurs qu’ils votent devant tout le monde ou étaient accompagnés dans les isoloirs pour leur imposer un choix ». Des pratiques également relevées par l’Église catholique dans son communiqué du 12 juin.
L’article 41, qui garantit aux mandataires des partis politiques le droit de surveiller l’ensemble des opérations électorales, a été rendu inopérant par des manœuvres d’intimidation et d’exclusion.

Le CDP a souligné que cet article a été « doublement violé », il explique : « Il y a eu d’abord un retrait forcé de 16 cartes d’accréditation à nos mandataires, d’autres ont été expulsés des bureaux de vote, soit pendant la journée ou au moment du dépouillement ».

Selon ce parti, ces expulsions violentes et répétées, confirmées par plusieurs partis comme le CNL, ont empêché tout contrôle indépendant du scrutin.
Certains observateurs internationaux, fait savoir l’Association ALUCHOTO, comme ceux de l’Union africaine, n’ont pas été épargnés, se voyant interdire l’accès à des bureaux comme celui de l’école internationale de Bujumbura.

Impossibilité de documenter les irrégularités et refus de remise des procès-verbaux

L’article 43, qui prévoit que les mandataires doivent pouvoir consigner leurs observations sur les procès-verbaux, n’a pas été respecté. Les témoignages concordent sur ce point : « Il n’a pas été permis à nos mandataires d’inscrire leurs observations, aucun exemplaire de PV n’a été remis », fustige le parti CNL.

Cette entrave délibérée à la documentation des irrégularités a privé l’opposition de preuves matérielles essentielles pour étayer ses recours devant la Cour constitutionnelle. « Il y a eu des procès-verbaux bricolés à travers le refus à certains de nos mandataires de mentionner les observations et commentaires et l’obligation de signer sur les procès-verbaux comportant des signatures des personnes présumées mandataires en lieu et place de leurs mandataires expulsés d’où le bricolage des procès-verbaux et des résultats », lit-on dans l’arrêt rendu par la Cour Constitutionnelle aux plaintes avancées par le parti CNL.

D’autres pratiques observées sont notamment l’absence de vérification des urnes vides (Article 48) : le CDP affirme que « cet article a été violé sur tout le territoire national, il a été très rare que les présidents des bureaux de vote fassent ce devoir. » Et d’ajouter que de nombreux autres articles (49, 50, 51, 53, 54, 56, 63, 65, 66, 68, 69, 71) ont été « systématiquement violés ».

Des pratiques récurrentes et généralisées

Au-delà des violations précises du Code électoral, les recours déposés par les partis politiques, la société civile et les organisations religieuses avaient déjà décrit un ensemble de pratiques généralisées qui ont gravement compromis la crédibilité du scrutin du 5 juin 2025.

Parmi les irrégularités les plus fréquemment évoquées figure le soupçon de bourrage des urnes. Celui-ci aurait été observé, selon plusieurs témoignages, non seulement avant l’ouverture officielle des bureaux de vote, mais également au cours de la journée électorale, parfois après l’expulsion de mandataires de l’opposition, et même au moment du dépouillement.

Les partis d’opposition ont fourni des listes précises de bureaux où leurs mandataires ont été arbitrairement expulsés ou empêchés d’accéder, rendant impossible la surveillance des opérations, notamment le dépouillement.

Le recours du CDP cite notamment : « Mukungu, Muyange, Kazirabageni, Nyanza-Lac, Gisenyi, Vugizo Centre et Myumba (province Makamba), ainsi qu’à Marangara, Kigoma, Nyakararo, Giheta et Cindoyi (province Butanyerera). En province Burunga… Nyanza Lac, Kibago 1 et 2, Kivoga, Kigongo BV1 et BV2, Jimbi BV1, Mbizi BV1 et BV2 ».

Un autre cas jugé particulièrement préoccupant concerne la disparition inexpliquée de certaines voix attribuées à certains partis de l’opposition. « Par exemple, dans la commune de Marangara, le centre de vote de Gihororo aurait comptabilisé 317 voix pour le CDP ; à Kagoti, 203 ; à Kidobori, 151 ; et au centre Access School à Kayanza, 97 voix. Pourtant, lors de l’annonce des résultats provisoires par la CENI, ces chiffres ont été ramenés à zéro, sans explication officielle », témoigne le parti CDP dans son recours.

Par ailleurs, de nombreux témoignages font état d’intimidations exercées sur les électeurs. Plusieurs jeunes, identifiés comme proches du parti au pouvoir, ont été vus aux abords et à l’intérieur des bureaux de vote, voire dans les isoloirs.

Leur présence aurait eu pour objectif d’orienter le choix des votants, souvent en connivence avec certains membres des bureaux de vote. Cette atmosphère de pression et de contrainte a également été signalée par l’Église catholique, qui dénonce un manque manifeste de neutralité de certains responsables électoraux, accusés d’avoir contraint des électeurs à opter pour un candidat donné, parfois en les accompagnant personnellement dans l’isoloir.

D’autres formes de fraude sont rapportées dans les plaintes. Il est question de signatures forcées sur les procès-verbaux avant même le début du scrutin, de votes multiples effectués notamment par des membres des bureaux de vote, de suffrages exprimés à la place d’électeurs absents, du retrait de cartes d’électeurs à des citoyens considérés comme proches de l’opposition, ou encore de distribution de bulletins de vote préalablement marqués.

Certaines arrestations ciblées de membres de l’opposition ont également été dénoncées. L’organisation ALUCHOTO a, quant à elle, mentionné des cas où certaines personnes se seraient présentées avec plusieurs procurations, tandis que la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme (CNIDH) a relevé des situations où des électeurs portaient plus d’une carte d’électeur, ainsi que la présence de bulletins de vote déchirés dans certaines localités.

Une autre plainte récurrente porte sur le refus, dans de nombreux cas, de remettre aux mandataires de l’opposition les procès-verbaux F2, documents indispensables pour la formulation d’un contentieux électoral. Cette privation a empêché les partis politiques de réunir les éléments formels exigés par la Cour constitutionnelle, ce qui a compromis la recevabilité de leurs recours.

Ce qui frappe le plus dans l’analyse de ces griefs, soulignent la plupart des partis politiques de l’opposition, c’est la convergence des témoignages provenant de sources variées.
L’Église catholique, qui a pu déployer ses mandataires dans environ 30 % des bureaux de vote répartis sur l’ensemble du pays, a publié un communiqué dès le 12 juin faisant état de graves irrégularités.

Elle y confirme l’ouverture anticipée de plusieurs bureaux de vote, survenue avant même l’arrivée des observateurs et des représentants politiques, la présence d’urnes déjà remplies à l’entame des opérations électorales, l’exclusion injustifiée de mandataires et d’observateurs, ainsi que des cas d’accompagnement d’électeurs dans les isoloirs ou de votes répétés effectués par une même personne.

Ces constats recoupent en tous points les dénonciations émises par les partis politiques d’opposition, ce qui donne à l’ensemble une dimension particulièrement préoccupante.

Le paradoxe des F2 : l’exigence impossible

C’est précisément sur ce point central – l’incapacité des mandataires à remplir leur rôle de contrôle et de consignation des irrégularités – que les partis d’opposition estiment que la Cour constitutionnelle a fait preuve d’une sévérité disproportionnée.

Dans sa décision, la Cour constitutionnelle a pourtant rappelé des éléments de droit que nul ne conteste : « Considérant que seules les observations enregistrées sur les formulaires F2 sont prises en considération à l’appui d’une requête ultérieure introductive d’un contentieux électoral comme le dispose l’article 43 alinéa 3 du Code électoral ».

Ce n’est pas tout : « Considérant que selon l’article 43 in fine du Code électoral, la non-signature ou l’absence d’empreinte digitale de l’un ou l’autre mandataire sur le procès-verbal n’invalide pas les résultats, considérant que les moyens présentés par le requérant manquent notoirement de preuves et ne pourraient emporter la conviction du juge », sur cette base, la Cour conclut : « Qu’en conséquence, les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ».

Mais pour les requérants, cette position ne tient pas compte du contexte : les mandataires de plusieurs partis politiques affirment n’avoir jamais pu accéder à ces formulaires ou y inscrire quoi que ce soit, du fait de leur expulsion prématurée des bureaux de vote, parfois dès l’ouverture du scrutin ou au moment du dépouillement. Dès lors, l’absence des F2 ne serait pas une négligence, mais une conséquence directe des entraves qu’ils disent avoir subies.

Après le rejet de leurs recours par la Cour constitutionnelle, des partis comme le CNL, le CDP et la coalition Burundi Bwa Bose ont adressé une lettre au président de la République, dans laquelle ils lui demandent de prendre en main la question du contentieux électoral, afin de préserver la démocratie burundaise.


Réaction

Anicet Niyonkuru : « Ce sont plutôt les arguments de la Cour Constitutionnelle qui ne sont pas fondés »

Le président du parti CDP, Anicet Niyonkuru, a vivement réagi au rejet des recours électoraux par la Cour constitutionnelle. Pour lui, cette décision était prévisible.
« La réponse était attendue, c’est plutôt le contraire qui nous aurait étonnés. » Il précise que le dépôt du recours visait avant tout à empêcher le pouvoir de prétendre que l’opposition avait accepté les résultats du scrutin.

Face à l’argument de la Cour selon lequel les preuves avancées étaient insuffisantes, Anicet Niyonkuru affirme que les mandataires de son parti ont été empêchés d’accomplir leur mission. « Les Présidents des Bureaux de vote (par consigne générale) avaient expulsé nos mandataires. Ils sont tous rentrés sans les F2. Ils n’ont même pas eu l’occasion d’écrire leurs observations ».

Et de conclure : « Ce sont plutôt les arguments de la Cour Constitutionnelle qui ne sont pas fondés. C’est comme s’il y avait un jeu : une institution nous refuse un document, une autre Institution nous le demande ».

Après ce rejet, M. Niyonkuru indique que le CDP, le CNL et la coalition Burundi Bwa Bose ont adressé une lettre au président de la République, lui demandant d’intervenir. D’après ces partis, « en tant que Juge Suprême et garant de la stabilité. Le chef de l’État doit prendre la question du contentieux électoral en main ».

Les trois partis demandent notamment l’ouverture d’un dialogue avec les parties prenantes, une enquête neutre sur le double scrutin du 5 juin 2025, ainsi que la libération des personnes arrêtées injustement ce jour-là. Ils disent attendre désormais une réaction officielle du Président.

Léopold Hakizimana : « Pour le cas de figure, les F2 ne sont en aucune façon une preuve »

« Le parti CNL regrette que la Cour constitutionnelle vienne de valider les résultats du scrutin des législatives du 5 juin émaillé de nombreuses irrégularités que le parti CNL a mentionnées dans sa requête », fait savoir Léopold Hakizimana, le secrétaire général du CNL.

Il s’étonne du fait que la Cour constitutionnelle justifie son argumentaire par des observations figurant sur les F2. Or, tient-il à le préciser, la quasi-totalité des mandataires du CNL avaient été expulsés des bureaux de vote pendant le déroulement du vote et le dépouillement des résultats. « En aucune façon, ils ne pouvaient avoir accès aux F2 pour y mettre leurs commentaires et observations ».

Par ailleurs, clarifie le porte-parole du CNL, en matière de procès, le requérant présente les preuves qui justifient la nature de l’objet de la requête.

Selon Léopold Hakizimana, la requête du parti CNL est constituée par les éléments tels que la privation du droit de vote et le manque de liberté. « Il s’agit de faits comme la confiscation des cartes de certains électeurs pour voter en leur lieu et place, obliger l’électeur à voter pour le parti au pouvoir, intimider les électeurs dans les rangées ».

Il évoque la violation flagrante du secret de vote par l’accompagnement des électeurs dans les isoloirs pour leur montrer qui voter ou voter en plein air.
Il cite aussi la fraude et manipulation, notamment par le bourrage des urnes avant l’ouverture officielle des bureaux de vote ou votes multiples sans procuration ainsi que le refus des accréditations pour l’observation des élections. « Le F2 n’est pas un document qui constitue une preuve pour justifier ces faits délictueux mentionnés par le CNL ».

Pour lui, on pouvait prendre le document F2 comme une preuve si le CNL avait donné comme argumentaire que les chiffres se trouvant sur les F2 ne correspondaient pas à ceux présentés au moment de la proclamation.

Olivier Nkurunziza : « La Cour constitutionnelle n’a pas été à la hauteur de son travail »

Le président du parti Uprona se dit déçu par la décision de la Cour constitutionnelle qui, selon lui, n’a pas fourni de raisons convaincantes.

Pour Olivier Nkurunziza, les irrégularités étaient flagrantes à telle enseigne que la Cour constitutionnelle pouvait elle-même faire l’auto-saisine sans même attendre les plaintes des parties prenantes aux élections. « Elle n’a pas été à la hauteur de son travail ».

Il dénonce le fait que leurs mandataires politiques n’ont pas eu accès au F2, précisant que ces derniers ont été chassés des bureaux de vote et pendant le dépouillement.

« Ils n’ont pas eu le droit de vérifier et faire leurs observations. Le F2 était erroné. C’est la raison pour laquelle le parti UPRONA a demandé d’annuler ces élections ».
De ce qui précède, met en avant le président du parti du héros de l’Indépendance, la démocratie au Burundi est en péril tout en plaidant pour la sauvegarde des valeurs du pays comme l’honnêteté.

Et de renchérir : « Le parti Uprona n’a pas besoin de participer seulement dans les instances, mais a besoin de sauvegarder cette démocratie que les Burundais ont acquise au prix d’une longue lutte »
Il se montre découragé par le verdict des urnes. « C’est la fin de la démocratie au Burundi, on ne s’attend plus à des élections libres et transparentes ».

Il propose un dialogue franc pour voir comment organiser des élections libres et transparentes qui reflètent la volonté de la population burundaise.

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