« Une amende sera infligée à toute personne qui pose un acte perturbant l’hygiène du milieu public ». Tels sont les propos du Premier ministre Nestor Ntahontuye lors d’une réunion avec les responsables administratifs et les opérateurs économiques de la province Bujumbura du 6 octobre 2025. Les habitants suggèrent au gouvernement de construire des latrines publiques pour leur éviter certaines amendes.
M. Ntahontuye a souligné que parmi les personnes qui perturbent l’hygiène du milieu public figurent des gens qui se soulagent sur les voies publiques. Certains habitants rencontrés sur le terrain voient qu’il faut d’abord disponibiliser des toilettes publiques avant de penser aux sanctions.
Dans différents quartiers et parkings visités, un manque de latrines publiques s’observe en effet. Sur le parking dit « Cotebu », les personnes interrogées indiquent qu’elles se soulagent dans des toilettes appartenant aux restaurants d’à côté avec une condition d’achat de la nourriture. « Même si nous utilisons ces toilettes, elles ne sont pas propres. Elles sont aussi peu nombreuses comparativement aux personnes qui fréquentent le parking. L’administration devrait installer des toilettes publiques avec l’eau potable. »
Selon les passagers, faute de toilettes publiques, ils montent avec le besoin de se soulager pour le faire dans les arbres en chemin vers l’intérieur du pays. « Normalement, tous les parkings devraient avoir des toilettes publiques. Il y a une désorientation, on ne voit pas de toilettes. Il y a des passagers qui voyagent avec les enfants. Des fois, les enfants se soulagent dans les immondices qui se trouvent derrière le parking », se désole Claude Nibigira, l’un des passagers.
Pour lui, même si le Premier ministre a instauré une amende, il devrait y avoir une mesure qui accompagne la décision afin que sa mise en œuvre soit facile. « Avoir un besoin c’est normal mais, lorsqu’on n’a pas de toilettes où on peut se soulager, on se débrouille. Il devrait y avoir des toilettes dans des endroits précis. Comme ça, une personne qui voyage se mettra en tête qu’elle va se soulager à cet endroit et non dans la nature. »
Pas d’hygiène sans eau potable.

Certains habitants rencontrés dans le quartier Nyabagere de la zone Kamenge expliquent que même si les toilettes publiques manquent, le plus important est d’avoir de l’eau potable.
Margueritte Munezero, une quarantaine, témoigne que la majorité des personnes qui y habitent utilise l’eau de la rivière Nyabagere dans la période de carence d’eau potable. « L’eau de cette rivière est tellement sale. Il y a des personnes qui se soulagent dedans. C’est vrai, il nous faut des toilettes publiques pour éviter des personnes qui se soulagent dans des endroits publics. Mais l’eau potable est aussi un besoin urgent afin de lutter contre les maladies qui proviennent du manque d’hygiène. »
Une commerçante de fruits rencontrée dans le quartier Mirango I de cette même zone indique elle aussi qu’il ne peut pas y avoir une bonne hygiène sans eau potable. Elle trouve qu’il faut des sensibilisations envers la population pour faire comprendre les conséquences de se soulager dans des endroits publics.
« Nous avons besoin des sensibilisations. Il faut que les Burundais arrêtent le comportement de pisser n’importe où, surtout les hommes. Les femmes le font souvent pour éviter les infections urinaires. Par exemple, je ne peux pas utiliser une latrine sale. C’est pourquoi la question revient toujours sur l’eau potable qui manque. »
Interrogé sur l’installation des toilettes publiques dans des lieux publics, le gouverneur de la province de Bujumbura, Aloys Ndayikengurukiye informe que cela fait partie des projets que l’administration va mettre en œuvre. Il appelle l’administration locale à coopérer avec la population pour garder une bonne hygiène.
Réaction
Innocent Banigwaninzigo : « La défécation en plein air est un problème majeur de santé publique et environnementale. »
M. Banigwaninzigo, expert consultant en matière de l’environnement et président de l’association « Ensemble pour la Protection de l’Environnement », explique qu’il y a plusieurs conséquences avec la défécation en plein air. Il cite notamment la contamination de l’eau qui s’explique par le fait que les excréments humains sont emportés par les eaux de pluie et contaminent les sources d’eau comme les lacs, les rivières, etc. « Cela a un impact direct sur la qualité de l’eau, notamment celle du lac Tanganyika, mais aussi celle des affluents qui l’alimentent. Il y a aussi des conséquences sur la pollution des sols. »
Il ajoute que les excréments déposés dans la nature affectent directement les sols et nuisent à la santé de la microfaune, qui, de plus en plus, est indispensable dans la fertilisation et dans le travail du sol. « L’environnement contaminé par les matières fécales favorise la transmission des maladies graves par contact direct avec l’eau ou la nourriture. »
Il fait savoir que la présence des excréments dans les lieux publics et autour des habitations dégrade le cadre de vie. Elle porte atteinte à la dignité et à la sécurité, notamment pour les femmes et les filles qui doivent chercher des lieux isolés pour se soulager.
M. Banigwaninzigo suggère une construction des latrines écologiques qui peuvent produire du fumier naturel pour l’agriculture ou des briques qui sont combustibles. « Il faut qu’il y ait l’assainissement dans les écoles, les centres de santé, afin de s’assurer que les établissements publics disposent de latrines pour les filles et les garçons. »
Selon lui, il faut qu’il y ait une sensibilisation, l’organisation des campagnes d’information et de communication pour le changement, de comportement. A cette fin, il faut mettre à contribution les agents de santé communautaire et l’administration locale. Il souligne que le gouvernement doit renforcer l’engagement politique et les investissements dans le secteur de l’eau et de l’assainissement.
Selon lui, les autorités communales et municipales doivent exercer leur rôle de contrôle et d’application des normes d’assainissement en place, sans oublier l’innovation et la valorisation de ces déchets en les transformant en biogaz ainsi qu’en compost pour l’agriculture
Charte des utilisateurs des forums d'Iwacu
Merci de prendre connaissances de nos règles d'usage avant de publier un commentaire.
Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes, antisémites, diffamatoires ou injurieux, appelant à des divisions ethniques ou régionalistes, divulguant des informations relatives à la vie privée d’une personne, utilisant des œuvres protégées par les droits d’auteur (textes, photos, vidéos…) sans mentionner la source.
Iwacu se réserve le droit de supprimer tout commentaire susceptible de contrevenir à la présente charte, ainsi que tout commentaire hors-sujet, répété plusieurs fois, promotionnel ou grossier. Par ailleurs, tout commentaire écrit en lettres capitales sera supprimé d’office.