Mardi 19 mars 2024

Société

Rétro Justice : Un avocat et défenseur des droits humains acquitté

04/01/2023 Commentaires fermés sur Rétro Justice : Un avocat et défenseur des droits humains acquitté
Rétro Justice : Un avocat et défenseur des droits humains acquitté
L’avocat Tony Germain Nkina est enfin libre.

Affaire Tony Germain Nkina, des magistrats révoqués, plus de 4 mille détenus déjà graciés, mise en place des notables collinaires et abolition de l’institution des Bashingantahe ont, entre autres points, marqué l’année 2022.

Le 8 décembre 2022, la Cour suprême burundaise a annulé la condamnation de cinq ans du défenseur des droits humains et avocat Tony Germain Nkina, qui avait été précédemment confirmée le 29 septembre 2021 par la cour d’appel de Ngozi. Cette affaire a été renvoyée devant la cour d’appel de Ngozi pour être rejugée.

Le défenseur des droits humains était détenu à la prison centrale de Ngozi depuis le 13 octobre 2020.

Le 20 décembre, cette cour l’a acquitté, lui et ses coaccusés, de tous les chefs d’accusation.

Malgré son acquittement, l’avocat Nkina n’a pas été libéré directement parce que le procureur prévoyait de faire appel du jugement de la cour de Ngozi auprès de la cour suprême.

Or, la loi burundaise prévoit la libération immédiate de toute personne ayant été acquittée, indépendamment de la procédure d’appel. Il a été finalement libéré le 27 décembre 2022.

Pour rappel, Tony Germain Nkina, avocat dans la province de Kayanza avait été arrêté le 13 octobre 2020 dans la commune de Kabarore dans la même province alors qu’il rendait visite à son client. Il a été accusé de collaboration avec des groupes armés.

Le premier juge l’avait condamné à cinq ans d’emprisonnement et à une amende d’un million de BIF. Et son client qui avait été interpellé avec lui avait été déclaré coupable de complicité de la même infraction et condamné à deux ans de prison en plus d’une amende de 500 mille BIF.

40 magistrats révoqués de la magistrature

Le président Evariste Ndayishimiye a sorti, le 10 août 2022, un décret révoquant 15 magistrats des juridictions supérieures et 25 magistrats des juridictions de base.

Ledit décret n’a pas mentionné les chefs d’accusation portés à l’endroit de chaque magistrat.

Mais au niveau des visas dudit décret, il a été mentionné qu’on a considéré les dossiers personnels et administratifs des intéressés. Et qu’on a pris acte de la décision N°96/840 du 29 juillet 2022 du Conseil supérieur de la Magistrature portant avis de révocation de certains magistrats.

Pour rappel, le président Evariste Ndayishimiye avait ouvert, le 28 juillet 2022, une retraite de 2 jours du Conseil supérieur de la Magistrature tenue à Burasira dans la commune de Ruhororo, en province Ngozi. Il a été une occasion d’étudier les problèmes qui gangrènent le secteur de la justice.

Au terme de la retraite, le président Ndayishimiye avait annoncé la révocation de 35 magistrats corrompus qui déshonorent le système judiciaire du pays.

Le Burundi a perdu son procès devant la cour de l’EAC

La Cour de Justice de la communauté Est-Africaine, dans sa chambre d’appel, a tranché sur le dernier mandat de feu président Pierre Nkurunziza de 2015 à 2020. La cour, dans sa chambre d’appel, a condamné la cour constitutionnelle du Burundi pour avoir pris un arrêt autorisant un « mandat illégal ».
Le processus a commencé en mai 2015 quand le forum des organisations de la société civile au niveau de la sous-région, EACSOF, a saisi la cour de l’EAC pour invalider la décision de feu président Pierre Nkurunziza de briguer un autre mandat.

Quatre ans après, en décembre 2019, la première division de la cour de l’EAC a statué.

« La cour a décidé qu’elle n’a pas les prérogatives de s’ingérer dans les affaires et arrêts pris par les organes judiciaires internes dans les pays membres de l’EAC. Et donc, la cour ne pouvait pas se prononcer sur l’arrêt de la cour constitutionnelle du Burundi »

Après, la chambre d’appel de la cour de l’EAC a simplement cassé ce jugement rendu par la première division de cette cour.

L’article 65 du jugement a été clair.

« La première division a fait une erreur de droit quand elle a trouvé que la décision de la cour constitutionnelle du Burundi n’a pas violé les articles 5, 6, 7 et 8 du Traité de l’EAC ainsi que l’Accord d’Arusha ».

La décision a été rendue à Bujumbura le 25 novembre 2021 lors d’un procès en itinérance. Mais elle a été publiée presqu’une année après.
Quant à l’exécution du jugement, nombreux observateurs ont estimé cependant qu’il est difficile de mettre en application la décision de la cour. Ils disent que l’arrêt est sorti au moment où le mandat en question est terminé.

De leur côté, certains activistes de la société civile disent que la cour de l’EAC devrait exiger l’indemnisation des victimes.

L’institution des Bashingantahe abolie

Les nouveaux notables collinaires ont prêté serment, jeudi 22 septembre. Les cérémonies se sont déroulées aux chefs-lieux de zones sur tout le territoire national. En tout 43.650 hommes et femmes forment le nouvel organe.

Selon une annonce du ministère de l’Intérieur, l’institution des Bashingantahe été définitivement abolie.

Domine Banyankimbona : « Nous demandons à ces nouveaux notables d’être des ambassadeurs de la vérité.»

Lors de la prestation du serment, Domine Banyankimbona, ministre de la Justice, a demandé aux nouveaux notables d’être « des ambassadeurs de la vérité et de rendre justice à tout le monde sans exclusion ».

Ces notables ont juré devant Dieu et la population fidélité à la vérité et à la justice pour tous. Ils se sont engagés à rendre justice aux justiciables sans rien demander ni prendre parti, à garder le secret même à la fin de leurs fonctions.

De son côté, Adrien Sibomana, président de la plus ancienne institution, a fustigé l’annonce du ministre de l’Intérieur. Il a estimé qu’il est impossible de mettre fin à ce collège. Et de faire observer : « Je pense que c’est un abus de langage ou de compréhension de dire qu’après la mise en place d’un tribunal, ce comportement d’humanisme d’Umushingantahe prendrait fin ».

Quid du bilan de la grâce présidentielle ?

Jean-Marie Nshimirimana, représentant légal de SPF « Ntabariza », s’est dit satisfait de la mise en application de la grâce présidentielle. Néanmoins, il a fustigé le retard mis dans l’exécution des jugements et la lenteur dans le traitement des dossiers des justiciables.

Selon ce défenseur des droits des prisonniers plus de 4 mille ont été déjà libérés dans le cadre de la mise en application de la grâce présidentielle ». Il s’est réjoui de la manière dont ce processus est en train d’être mené.

La commission permanente, a-t-il précisé, continue à analyser les dossiers des détenus pour voir ceux qui sont éligibles à la grâce présidentielle. Et de rappeler que le décret du 5 mars prévoyait de gracier 5255 détenus. « Le nombre des bénéficiaires de la grâce présidentielle pourra dépasser ce qui avait été projeté, vu que le ministère de la Justice a ordonné que ceux qui ont commis les infractions mineures soient relâchés ».

Des irrégularités subsistent

M. Nshimirimana a déploré qu’il s’observe encore, chez certains magistrats, de la lenteur dans le traitement des dossiers des justiciables, et du retard dans l’exécution des jugements. Des procès, a-t-il ajouté, sont remis à plusieurs reprises ce qui agacent et découragent les justiciables. « Un détenu peut totaliser une année dans la prison et, à l’issue du procès, il écope de deux mois de servitude pénale ».

Ce défenseur des droits des prisonniers a demandé aux juges d’user de la droiture, de lire et de dire le droit. Ce dernier soutient que certains se cachent derrière le principe du double degré de juridiction et prennent des décisions hâtives.

Cet activiste de la société civile recommande de soumettre au travail d’intérêt général, les détenus ayant commis des infractions mineures dans le but de désengorger les prisons.

En outre, a-t-il poursuivi, certaines femmes enceintes ou allaitantes n’ont pas été libérées parce qu’elles ont été condamnées à de lourdes peines ou à des peines non graciables.

De la mise en application du travail d’intérêt général

La mise en application effective du travail d’intérêt général comme alternative à la peine d’emprisonnement connaît encore des entraves.

Selon Donavine Niyongere, porte-parole du ministère de la Justice, le travail d’intérêt général est l’une des mesures alternatives à l’emprisonnement dont l’amende pénale et la condamnation avec sursis appelée également la mesure de probation. Ces mesures sont prévues par le code pénal et un décret de mise en œuvre a été sorti.

Elle a fait savoir que le travail d’intérêt général a été mis en œuvre dans certaines provinces pilotes comme Ngozi. Mais, a-t-elle regretté, il a été constaté que toutes les parties prenantes n’ont pas participé comme le prévoit la loi.

Pour elle, il devrait y avoir des services judiciaires qui instruisent les dossiers et condamnent au travail d’intérêt général selon une liste des travaux communiquée par l’administration locale.

« Il semble que cette dernière ne soit pas intéressée alors qu’elle doit participer même à l’encadrement du prisonnier et donne le rapport d’exécution »

L’autre blocage, a-t-elle précisé, est l’absence des associations locales qui ne demandent pas l’habilitation légale pour mettre en œuvre le travail d’intérêt général.

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