Dans les communes Rugombo, Mugina et Murwi de la province de Cibitoke, des champs regorgent de mandarines mûres qui pourrissent faute d’acheteurs. Des centaines de producteurs, fortement endettés, voient leur travail réduit à néant. La fermeture des frontières avec les pays voisins aggrave la crise. Désespérés, les agriculteurs appellent à l’aide.
Arrivé dans les communes Rugombo, Mugina et Murwi , les vergers de mandarines offrent un spectacle amer. On voit des arbres chargés de fruits mûrs, des fruits au sol, des kilos et des kilos de récoltes abandonnées et en décomposition. Dans ces communes à fort potentiel agricole, les producteurs vivent une crise sans précédent. L’absence de débouchés, aggravée par la fermeture des frontières avec la République démocratique du Congo et le Rwanda, plonge les familles dans le désarroi.
Sur la colline Gabiro-Ruvyagira, Jacques Bucumi ne cache pas son désespoir. En 15 ans, il a constitué une plantation de 15 hectares, grâce à un crédit bancaire de plusieurs millions de francs burundais. Aujourd’hui, il ne voit aucun retour sur investissement. « J’ai acheté des terrains. J’ai investi plus de 50 millions de francs burundais. Tout devait changer grâce à cette culture. Mais maintenant, les fruits pourrissent sous mes yeux. Je suis ruiné », témoigne-t-il la gorge nouée. Autrefois employeur de plus d’une dizaine de travailleurs agricoles, devenu incapable de les payer, M. Bucumi a dû licencier tout son personnel.
Le même scénario se répète sur la colline Rubirizi, zone Ruziba dans la commune Mugina où Fabien Nizigama a abandonné son verger faute de débouchés. « J’ai tout laissé tomber. Personne ne vient acheter. Alors, pourquoi continuer à récolter ? », lance-t-il impuissant.
À Murwi, la détresse est également visible. Marceline Hakizimana, veuve et mère de plusieurs enfants, avait contracté un prêt auprès d’une coopérative (Coopec) pour financer sa culture de mandarines. « Avant, je vendais ma production au Rwanda. Maintenant que la frontière est fermée, mes enfants ne vont plus à l’école », déplore-t-elle.
Le constat est le même partout : les producteurs sont endettés, les travailleurs au chômage, les projets suspendus. Certains tentent de faire passer leurs marchandises par des voies informelles. Mais, cela reste risqué et très insuffisant.
Rouvrir les frontières
Ils appellent tous le gouvernement à rouvrir les frontières, principale voie de sortie pour leurs productions. D’autres réclament des solutions plus durables notamment la création des unités de transformation locales, capables de valoriser la production et d’offrir des alternatives aux exportations.
Contacté à son propos, le directeur du Bureau provincial chargé de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Élevage reconnaît la gravité de la situation. « Nous comprenons la souffrance des producteurs. Le gouvernement prévoit la mise en place de petites industries de transformation pour les fruits tropicaux », souligne-t-il. Il confirme en outre que de nombreux producteurs ont investi massivement dans les cultures fruitières avec l’espoir d’améliorer leur niveau de vie. Il appelle cependant à la patience, assurant que le gouvernement prévoit l’installation de petites industries de transformation pour les mandataires, les mangues, les ananas et d’autres produits agricoles. « L’avenir s’annonce prometteur », conclut-il.
Malheureusement ce genre de promesses tardent toujours à se concrétiser. Et, sur le terrain, l’attente devient insoutenable. Pendant ce temps, les fruits tombent, les espoirs s’éteignent et les familles s’enfoncent dans la précarité.
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