Vendredi 14 novembre 2025

Société

Région Centre/Gitega : L’utilisation du peu de latrines publiques a un coût prohibitif

Région Centre/Gitega : L’utilisation du peu de latrines publiques a un coût prohibitif
L’une des deux latrines publiques qui existent encore dans tout le centre-ville de Gitega.

La capitale politique est confrontée à un paradoxe socio-sanitaire criant. Des autorités, s’appuyant sur des ordonnances ministérielles, multiplient les injonctions et les amendes pour traquer les citoyens qui se soulagent dans des lieux publics. Pendant ce temps, les latrines publiques sont soit quasi-inexistantes ou d’une salubrité dangereuse et avec un coût d’utilisation prohibitif pour une majorité d’habitants.

Il est midi et la pluie tombe sur la ville de Gitega. Dans le vrombissement des voitures et motocyclettes incessants sur la route Gitega-Bujumbura entre Magarama et Yoba, la nécessité se fait pressante pour Aline Ciza. Elle vient de descendre un bus en provenance de Bujumbura. D’après ses propos, elle a bu une bouteille d’eau le matin.

Maintenant, l’horloge biologique est implacable. Elle jette un regard désespéré autour d’elle, là où il y a quelques années se trouvait une latrine publique propre et abordable. Aujourd’hui, elle n’a que deux options : tenter d’atteindre le seul établissement ouvert au marché central de Magarama à plusieurs centaines de mètres de là ou bien risquer la honte et une amende salée.

Gitega n’est pas seulement confrontée à un problème d’infrastructures. Elle vit une crise de la décence et de l’hygiène. Des graffitis et des pancartes d’interdiction sont devenus l’une des caractéristiques visuelles les plus fréquentes de la ville. Sur les murs, on peut lire les mises en garde comme : « Kirazira gusoba ngaha. Uwuzofatwa azoriha amande10 000 FBu » (Il est formellement interdit d’uriner ici sous peine d’une amende de 10 000 FBu). L’ironie est amère : les écriteaux qui condamnent l’acte sont souvent plus nombreux et mieux entretenus que les rares structures sanitaires.

Cette politique de la sanction sans la solution place des milliers de citoyens dans une position intenable. « Quand la nature appelle, il n’y a rien à faire. On nous dit de ne pas le faire ici, ni là. Mais où le faire alors ? », lâche quelqu’un, l’œil inquiet en désignant un mur tâché malgré l’interdiction.

Une torture qui dure des heures

Même si quelques latrines existent, leur tarification est inaccessible pour beaucoup. Pour les petits commerçants, les porteurs ou les conducteurs de taxi-vélo, une seule utilisation peut représenter un coût non négligeable. La prénommée Jacqueline, une vendeuse de légumes témoigne. « Je vends pour 3 000 FBu de légumes par jour quand la journée est bonne. Entrer dans une latrine coûte 300 FBu. Si je dois y aller deux fois, c’est 600 FBu. Alors, je me retiens. » témoigne-t-elle les traits tirés.

Et Spès Ndikumana d’ajouter. « C’est une torture qui dure des heures. Nous avons peur de boire de l’eau. Ce qui n’est pas bon pour la santé », ajoute Spés Ndikumana. Selon cette dame, cela augmente le risque de s’exposer à des infections urinaires chroniques. Pire encore, le peu de latrines qui existent ne sont pas bien entretenues. En cause, le manque d’eau potable. Le prénommé Jean-Marie, gardien d’une des rares structures près du marché central explique. « Les gens se plaignent, et ils ont raison. On essaie d’utiliser des seaux, mais ce n’est jamais suffisant, la saleté continue »

D’après certains, les amendes infligées aux contrevenants sont non seulement disproportionnées mais aussi elles sont injustes. « La loi devrait d’abord exiger la construction de latrines, puis sanctionner leur mauvaise utilisation » trouvent-ils. Nous avons cherché à joindre le service Setag de la commune Gitega chargé de l’assainissement mais sans succès.

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