Avec l’entrée en fonction des nouveaux gouverneurs le 4 juillet dernier, le nouveau découpage administratif bouleverse l’organisation territoriale du Burundi. L’ex-Mairie de Bujumbura perd son autonomie fiscale au profit d’un modèle unifié.
Les communes de l’ancienne mairie de Bujumbura passent désormais à l’autonomie de gestion financière conformément à la loi communale n°1/18 du 7 juin 2024, portant réorganisation de l’administration communale. Cette transition marque la fin du statut particulier de la Mairie et soulève de nombreuses interrogations sur la structuration à venir.
Les services du gouverneur de la nouvelle province de Bujumbura déclarent être dans l’attente des directives du ministère de tutelle.
« Nous n’avons reçu aucune instruction concrète. Il semble même que des changements sont prévus au sein du ministère. Nous attendons toujours des clarifications », explique un chargé du protocole du gouverneur.
Pour le Dr Diomède Ninteretse, cette réponse illustre un manque de clarté généralisé dans la conduite de la réorganisation. L’universitaire est catégorique : « La mairie de Bujumbura, en tant qu’entité, n’existe plus. »
Une réforme imposée sans concertation
Ce bouleversement administratif, s’il marque une rupture majeure, semble avoir été mené sans réelle préparation. Dr Ninteretse déplore un processus centralisé, piloté depuis le sommet de l’État, sans consultation des autorités locales : « La réforme a été conçue dans un petit cercle fermé. Les cadres municipaux n’ont pas été associés à son élaboration. »
Il pointe également un grave déficit d’information : « Aucune stratégie nationale de communication n’a été mise en place. Les lois ont été adoptées, mais aucun effort de vulgarisation n’a suivi. Les textes ne sont pas accompagnés de documents pédagogiques. »
Selon lui, cette opacité explique l’ignorance affichée par de nombreux cadres de l’ex-mairie :
Au-delà des considérations techniques, l’universitaire insiste sur un principe fondamental : « Une réforme ne peut être bien appliquée que si elle est bien comprise. »
Ce manquement va à l’encontre même des principes de la décentralisation.
« Pour ceux qui suivent les politiques publiques, ce vide explicatif est en contradiction avec les bases de toute réforme sérieuse. »
Incertitudes fiscales et juridiques
Le Dr Ninteretse regrette également l’absence de clarification sur les enjeux fiscaux. « On ne sait toujours pas qui perçoit quoi, ni comment les infrastructures seront transférées aux nouvelles communes. » Il dénonce un vide juridique préoccupant qui « paralyse l’action administrative locale ».
Ce manque de préparation alimente peurs et incertitudes : « Les agents municipaux ne se demandent même pas encore comment appliquer la réforme. Ils s’inquiètent avant tout pour leur avenir : quelles seront leurs nouvelles fonctions ? Où seront-ils affectés ? »
Pour lui, cette insécurité compromet l’adhésion des fonctionnaires à la réforme.
Il critique également la précipitation du processus : « Tout a été fait à la hâte. Aujourd’hui, aucune carte d’identité ne peut être délivrée. Les compétences se chevauchent, et la désorganisation est totale. »
Une réforme inachevée
Dr Ninteretse estime que la réforme ne peut réussir sans une loi spécifique sur l’organisation des grandes villes comme Bujumbura, Gitega ou Ngozi. « On attendait qu’une telle loi accompagne le nouveau découpage. Cela allait de soi. »
Face à cette confusion, il recommande plusieurs mesures d’urgence : publier des circulaires claires sur les missions des nouvelles communes urbaines ; former les nouveaux administrateurs ; élaborer un guide simplifié à l’intention des techniciens en charge de l’exécution.
« C’est une réforme ambitieuse, mais mal expliquée. Pour qu’elle réussisse, il faut désormais des textes secondaires clairs, des outils de vulgarisation, et surtout une réelle volonté politique de mieux communiquer », conclut-t-il.
Iwacu a tenté à plusieurs reprises de contacter le secrétaire permanent au ministère de l’Intérieur, Théophile Ndarufatiye, pour obtenir des éclaircissements, sans succès.
Nous savons le pourquoi de cette politico-administrative : elle a une visée électoraliste dont le but est essentiellement ethnique . En choisissant de mettre ensemble des provinces Bujumbura , Bubanza et Cibitoke qui n’ont rien en commun , le cercle d’un petit groupe de décideurs au sommet de l’Etat a voulu noyer la mairie de Bujumbura réputée , quartier général des opposants essentiellement tutsi . Comme on sait que Cibitoke et Bubanza sont essentiellement hutu les élections ne peuvent dégager qu’une majorité hutu . C’est le même cas que les provinces du Sud et une partie du centre regroupant les provinces de Muramvya , Bururi et Makamba . Cette politique de charcutage électorale s’appelle en anglais le gerrymandering . Elle a vu le jour aux USA . En réduisant le nombre de provinces de 18 à 5 , on aboutit une centralisation du pouvoir à l’opposé de la volonté ceux qui l’ont mis en place . Vous verrez la suite.