Dans ses ambitions affichées, sinon dans son agenda politique, le CNDD-FDD semble vouloir régner sans partage. Ce qui n’était encore qu’un projet s’impose aujourd’hui comme une réalité, à la lumière des scores écrasants obtenus lors des scrutins communaux, législatifs et sénatoriaux du 23 juillet.
Le doute n’est plus permis : le rouleau compresseur est bel et bien lancé. Il avance, balayant sur son passage les acquis d’années de lutte, les débats parlementaires animés, les nuits de négociation, les travaux en commission qui ont difficilement accouché d’une Constitution consacrant le multipartisme.
Faut-il désormais taire la longue marche vers une démocratie pluraliste, à peine instituée et déjà décapitée ? Devons-nous reléguer aux oubliettes les sacrifices consentis pour la restaurer ? Une chose est sûre : pour revenir officiellement au monopartisme, il ne manque plus qu’un décret.
Certes, cela nécessitera quelques ajustements : amender la Constitution, réviser certaines lois, faire passer le tout par les deux chambres du Parlement – aujourd’hui uniformément acquises au CNDD-FDD. Une formalité, tant le ton est déjà donné.
Le chef de l’Exécutif burundais le martèle à chaque occasion : « La démocratie, ce n’est pas le gouvernement des partis politiques. La démocratie, c’est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple », reprenant une célèbre formule d’Abraham Lincoln. Puis il s’interroge : « Où sont les partis politiques dans cette définition ? Nulle part », a-t-il conclu récemment devant un auditoire composé de représentants des partis politiques, de la société civile et de cadres institutionnels.
Ce fut l’occasion de vanter les mérites d’une démocratie « à la chinoise », qualifiée par ses soins de « première démocratie au monde », soulignant qu’il a eu le temps d’en étudier les rouages au fil de plus de dix missions en Chine. « Le CNDD-FDD est en train de l’expérimenter », a-t-il confié.
Tout porte à croire que ce modèle inspire désormais le parti au pouvoir, qui ne s’en cache plus. Durant la campagne électorale, le chef du parti exprimait déjà son vœu de voir le Burundi gouverné par un parti unique, avec des institutions intégralement contrôlées par le CNDD-FDD, pour, disait-il, « faire décoller l’économie ».
Ce mot d’ordre a depuis été repris par le président de la République, devenu son cheval de bataille. Dans les deux chambres du Parlement, plus question de fausses notes : l’unanimisme devient la norme, le système de pensée unique, la règle.
Petit détour historique : le 23 novembre 1966, le jeune roi Charles Ndizeye, Ntare V, tombeur de son père Mwambutsa IV Bangiricenge, signe un arrêté royal instaurant l’Uprona comme parti unique.
On peut y lire : « Considérant que le parti unique s’identifie en définitive avec la Nation et qu’il est, par conséquent, la forme la plus authentique de la démocratie… Par sa primauté, l’Uprona inspire l’action des organes politiques de l’État… Toute décision nationale en marge du programme gouvernemental est soumise d’abord au comité directeur du parti ».
Il suffirait de changer le nom du parti et actualiser quelques tournures : le discours d’alors semble aujourd’hui ressuscité, copié-collé dans le contexte actuel, réinventé à la sauce CNDD-FDD.
À cette époque, les autres partis – tel le PDC, farouche opposant de l’Uprona – s’effacèrent progressivement, emportant avec eux leurs fondateurs. Aujourd’hui, il ne reste qu’un pas entre un monopartisme de fait… et un monopartisme de droit.
Abarundi bakera bavuga ngo uwasinye niwe asinyura !!
Ariko siho tugeze. A ba shinwa nabo bafise ingene babitunganya iwabo. Ingendo yuwundi iravuna.