Au moins 3 713 projets déjà financés, 9 244 emplois permanents créés, 3 994 stages offerts et parmi eux, 446 stagiaires embauchés… Les bénéficiaires du Programme d’Autonomisation Economique et d’Emploi des Jeunes ( PAEEJ) se réjouissent des changements positifs déjà enregistrés en termes d’amélioration de leurs conditions de vie, d’augmentation de la capacité de production, d’élargissement du marché d’écoulement, de création d’emploi et surtout des bénéfices réalisés. Iwacu a effectué une descente dans les provinces de Muramvya et Kayanza. Témoignages.
Nous sommes au chef-lieu de la commune Bukeye, province Muramvya, dans un atelier de cordonnerie dénommé Kalibu Light Business, dirigé par Jean Marie Kajeneza, la trentaine. Nous sommes accueillis par le bruit des machines. M. Kajeneza et ses employés s’activent.
Une gamme de produits variés déjà fabriqués est étalée sur les étagères : souliers, sacoches, ceintures, porte-monnaie, bracelets. Il y a aussi un service de décoration des voitures, une sérigraphie moderne et un service de design sur les banderoles, pancartes, T-shirts, etc.
« J’ai lancé ce projet à la fin de mes études secondaires en 2018. Je n’ai pas voulu aller demander de l’emploi parce que je sentais en moi des capacités de voler de mes propres ailes. J’avais des dons en dessin et c’est par là que j’ai commencé », raconte Jean Marie Kajeneza.
Avec peu de moyens, il se lance dans le dessin. Au début, personne ne le croyait, on disait même qu’il perdait son temps. Mais comme le dit l’adage français : petit à petit l’oiseau fait son nid. Il défie les sceptiques par son talent.
« J’ai acheté de l’encre et j’ai commencé à dessiner. Les gens se sont habitués à moi. Et les clients ont commencé à affluer. Avec l’argent reçu, j’ajoutais un autre service, par exemple écrire sur les habits. J’ai commencé avec 50 000 FBU. Aujourd’hui, j’ai un chiffre d’affaires qui atteint 15 millions de FBU », témoigne-t-il.
Un pas de géant
Les débuts sont difficiles. Malgré ses dons, M. Kajeneza manque de matériel et de machines pour décoller. Il utilise ses mains et travaille seul. La chance lui sourit. Il apprend l’existence du Programme d’Autonomisation Economique et d’Emploi des Jeunes (PAEEJ). Il soumet son premier projet, qui est le premier à être retenu dans la commune de Bukeye. Il participe à la compétition au niveau provincial et occupe la 2e place.
« Avant le financement du PAEEJ, je réalisais un bénéfice oscillant entre 200 000 et 400 000 FBU par mois. Après, je réalise un bénéfice oscillant entre 1 million de FBU et même plus par mois. Je parviens à satisfaire ma clientèle et j’ai des clients dans presque toutes les provinces du pays. Le PAEEJ m’a offert un financement de 9 500 000 FBU », se réjouit-il.
Des investissements mais aussi des innovations
Grâce aux bénéfices réalisés, il a acheté une parcelle, un véhicule et une moto de service.
« Je prévois acheter une parcelle pour construire un grand atelier et cesser de louer, car cela me coûte cher. Qui plus est, j’envisage de fabriquer des souliers fermés et d’acheter de grandes machines capables de concevoir de grandes banderoles pour aider les gens de cette commune à ne plus descendre à Bujumbura pour y faire fabriquer des banderoles. »
Il encourage les jeunes désœuvrés à lui emboîter le pas. « J’en profite pour féliciter le PAEJE qui est venu au chevet des jeunes pour résorber le chômage. Parfois même, j’organise des formations à l’intention des jeunes pour leur apprendre comment concevoir des projets bancables. »
Des témoignages inspirants
De leur côté, les employés se réjouissent de l’amélioration de leurs conditions de vie. Isaac Ndayishimiye, cordonnier, se félicite du chemin parcouru et de la maîtrise de son métier, ce qui lui permet de subvenir à ses besoins.
« Avant, je touchais seulement 20 000 FBU par mois, mais maintenant j’ai un salaire variant entre 170 000 et 200 000 FBU par mois. La vie a changé. Je m’habille à ma satisfaction. Je lance un appel vibrant aux jeunes de ne pas penser à aller à Bujumbura. Je compte aussi me lancer dans d’autres projets tels que l’élevage. »
Blaise Niyonkuru, un modèle à suivre

Tenancier du salon de coiffure et de beauté Glory Saloon, Blaise Niyonkuru commence comme employé dans un salon de coiffure au centre de Bukeye. Il finit par lancer son propre projet avec un financement de 7 millions de FBU obtenu grâce au PAEEJ.
« Tout au début, j’étais seul avec peu de moyens et de matériel. Avec le financement du PAEJE, j’en arrive à 9 employés. J’ai fait l’extension du salon avec une chambre de plus. Le matériel a été augmenté. Il y a tous les services. »
Les bénéfices ont quintuplé, passant de 200 000 FBU à plus d’un million de FBU par mois après avoir payé tous ses employés.
Un salon très apprécié et fréquenté
Le Glory Saloon est le seul salon de beauté dans la commune de Bukeye. Les clients apprécient la qualité des services offerts.
« Les prix sont abordables. Inutile pour les dames et filles d’ici d’aller à Bujumbura, avec tout ce que cela implique en termes de coûts de transport et de temps, alors que tout y est dans ce salon en termes de matériel, de produits et surtout de la qualité des services », explique Belyse Akimana, une cliente.
Cap sur la province de Kayanza
« Negro-Fashion » est un atelier de couture situé sur la colline Musave, en pleine ville de Kayanza, tout près du marché.

Selon Anicet Niyonkuru, alias Negro, chef dudit atelier, la couture est centrée sur les costumes, chemises, robes, pantalons en jean, vestes en simili cuir, vestes à capuchon, vestes en jean, avec des spécialités comme des vestes et jeans contre le froid, mais aussi des vestes pour les fêtes.
« J’ai pensé à ce projet à partir de 2019. Avant, je travaillais dans la ville de Bujumbura. Un jour, je suis monté à Kayanza et j’ai remarqué qu’il faisait froid dans cette province. Et comme je suis natif de cette région, j’ai lancé le projet », témoigne-t-il.
Il a rencontré des difficultés au début de son projet, notamment liées au manque de matériel moderne. Heureusement, le PAEEJ est venu à sa rescousse. « Avant, je travaillais seul, mais avec le financement du PAEEJ, nous sommes maintenant quatre. J’ai commencé avec un capital de 8 500 000 FBU, mais actuellement je travaille avec un capital de 11 millions de FBU. »
La capacité de production augmente progressivement et les bénéfices suivent. « Avant, je fabriquais à peine dix vestes par mois. Mais maintenant, nous en produisons au moins 30 par mois. En termes de recettes, je réalisais un bénéfice de 200 000 FBU par mois. Aujourd’hui, nous pouvons atteindre 500 000 FBU et plus par mois. »
Anicet Niyonkuru envisage d’innover tout en diversifiant ses produits. « Je m’efforce toujours de trouver des tissus de bonne qualité avec des doublures internes, ce qui apporte un plus contre le froid. Nous avons déjà commencé à fabriquer des sacoches. »
Toutefois, un bémol. Il pointe du doigt la pénurie répétitive de carburant, qui entraîne la livraison tardive du matériel importé, ce qui, selon lui, risque de diminuer la capacité de production.

A la découverte de la Coopérative « Dushaze mw’iterambere » et de la Coopérative «Turashoboye »
« A partir des cornes et des os de vaches, nous transformons plus de 250 objets. Nous ne pouvons pas tous les énumérer, mais nous fabriquons des assiettes, des porte-clés, des boucles d’oreilles, des gobelets, des vases, des objets d’ornement, des porcelaines, des bracelets… », informe Innocent Nyabenda, président de la coopérative Dushaze mw’iterambere.
Il a lancé le projet en 2013 avec d’autres jeunes. Non seulement il voyage, mais il se ressource aussi sur Internet et constate qu’il existe une gamme de produits de valeur et de beauté fabriqués à partir des cornes de vaches.
Il envisage alors de faire quelque chose avec les cornes de vaches qui sont jetées ici et là. Il suit une formation de six mois dispensée par un Kenyan et effectue un mois de stage au Kenya.
« Au départ, nous ramassions ces cornes partout, mais actuellement, nous les achetons car c’est un produit recherché. Même d’autres pays viennent s’approvisionner ici au Burundi », précise M. Nyabenda.
Grâce au PAEEJ, témoigne-t-il, il bénéficie d’un échange d’expériences avec d’autres jeunes provenant de différentes provinces, autres que celle de Kayanza, et apprend comment concevoir un projet et élaborer un plan d’affaires. L’appui financier du PAEJE, à hauteur de 16 millions de FBU, ouvre de nouveaux horizons en termes de débouchés.
Selon le président de la Coopérative « Dushaze mw’iterambere », la demande reste forte au point qu’il est même difficile de la satisfaire. Il ajoute que la coopérative vend peu de produits à Kayanza, mais qu’un grand marché se trouve à Bujumbura et à Gitega.
« Nous avons un marché important dans les pays de l’EAC, à l’exception du Soudan du Sud, notamment en Ouganda, au Kenya, au Rwanda, en Tanzanie, en RDC, ainsi qu’ailleurs, comme en Côte d’Ivoire, aux États-Unis, au Canada, en France et en Angleterre », indique-t-il.
Par ailleurs, ce vaste marché génère des bénéfices qui, au début, étaient évalués entre 200 000 et 300 000 FBU par mois, mais qui atteignent actuellement 500 000 FBU par mois.
En ce qui concerne le personnel, ajoute-t-il, cinq employés ont été recrutés. Il précise également que, lorsqu’il y a une forte demande, il fait appel à ceux qui ont déjà travaillé pour la coopérative.
Quid de la Coopérative « Turashoboye » ?

Selon Vincent Toyi, président de la coopérative, le projet d’un atelier a été lancé en 2015, et la coopérative a été créée en 2016. Cet atelier spécialisé dans la tannerie, la maroquinerie et le raccommodage fabrique des souliers, des porte-monnaie, des ceintures, des sandales et des sacoches.
« Le métier de maroquinerie est très exigeant en termes de moyens et de matériel. C’est un domaine auquel les Burundais ne sont pas très habitués. Au début, nous n’avions pas de marché, mais petit à petit, les choses ont changé », fait remarquer le président de la coopérative.
Vincent Toyi a démarré avec un capital de 4 à 5 millions de FBU, qui a ensuite été augmenté jusqu’à 8 millions de FBU. Face à une forte demande, indique-t-il, la coopérative s’est retrouvée débordée au point de ne plus pouvoir satisfaire la demande.
Par la suite, précise-t-il, la coopérative a obtenu un financement de 15 millions de FBU de la part du PAEEJ. Grâce à cet appui, se réjouit-il, le marché a été élargi tout en augmentant la production, ce qui permet d’avoir des produits à vendre sur le marché local, lors des foires, ainsi qu’un stock disponible.
« Par mois, nous pouvons réaliser un bénéfice compris entre 600 000 et 800 000 FBU, et entre 1 000 000 et 1 200 000 FBU lors des foires. »
En outre, ajoute-t-il, la création d’emplois a suivi, passant de 10 personnes au début de la coopérative à 17 employés permanents, dont 11 femmes.

Concernant la capacité de production, poursuit-il, la coopérative peut aisément fabriquer 10 à 15 paires de sandales, 5 à 8 paires de chaussures, 20 porte-monnaie, 20 à 30 ceintures et 4 à 5 sacoches par jour.
« Le prix des chaussures varie selon le talon et se situe entre 100 000 et 150 000 FBU, 40 000 à 50 000 FBU pour les sandales, 15 000 à 20 000 FBU pour les porte-monnaie, et entre 20 000 et 100 000 FBU pour les sacoches, le prix dépendant du volume de chaque sacoche », a précisé Vincent Toyi.
Lors des foires annuelles, indique-t-il, la coopérative bénéficie d’une visibilité solide et a déjà participé à des événements au Kenya, en Ouganda, au Rwanda, en Tanzanie, en plus de toutes les foires et concours organisés au Burundi.
En ce qui concerne la qualité des produits et la rapidité des services, Nadine Manariyo, cliente de la ville de Kayanza, ne cache pas sa satisfaction.
« Je viens pour faire réparer ma sandale. Je suis une cliente fidèle. J’apprécie les services ici : ils sont de qualité et rapides. Les prix sont abordables. Les souliers sont durables et de bonne qualité. J’espère qu’ils étendront leur marché à d’autres provinces pour que les clients puissent s’approvisionner près de chez eux. »