Mercredi 01 octobre 2025

Société

Médecine traditionnelle : Quand un remède devient poison

Médecine traditionnelle : Quand un remède devient poison
« Une étude réalisée en 2018 montre que 6,5% des patients dialysés ont pris des médicaments traditionnels »

Au moment où de nombreuses personnes ont recours à l’automédication avec des plantes médicinales, les néphrologues tirent la sonnette d’alarme. Ils avertissent que la consommation excessive de ces plantes peut entraîner une insuffisance rénale aiguë.

« Mon grand-père est mort d’une insuffisance rénale un an après le diagnostic. Le néphrologue a déclaré que sa prise régulière de tisanes en était l’une des causes », témoigne avec amertume un homme sous couvert d’anonymat.

Il raconte que, pendant la période de la Covid-19, son grand-père avait décidé de recourir à la phytothérapie, l’art de se soigner avec des plantes. Il buvait chaque jour du « Umubirizi ». « Il ne consommait pas moins d’un litre et demi. Il a suivi ce traitement pendant deux ans sans interruption, même après la pandémie. » Son grand-père vantait les mérites de ce remède affirmant que c’est grâce à lui qu’il avait survécu. « Cela semblait vrai, car plusieurs personnes de son âge avaient succombé à ce virus ».

Il souligne que vers la fin de l’année 2023, son grand-père a été diagnostiqué d’une insuffisance rénale. Le jeune homme l’a accompagné à l’hôpital pour des consultations. Le néphrologue leur a demandé s’il prenait d’autres médicaments. Ils lui ont avoué les différents remèdes traditionnels qu’il consommait. « Le spécialiste nous a alors confirmé que cette maladie avait été causée par l’utilisation prolongée de ces plantes médicinales. Nous avons été surpris, car la société vante souvent les vertus de cette plante traditionnelle », se désole-t-il.

Des cas supposés d’empoisonnement

Selon lui, le néphrologue leur a expliqué que ces plantes ne sont pas mauvaises en soi. Le danger réside toutefois dans leur consommation sans prescription médicale et sans dosage approprié. Cela peut entraîner de graves effets secondaires.

D’après le professeur Joseph Nyandwi, néphrologue au Centre hospitalier universitaire de Kamenge (CHUK), les malades consomment souvent des mélanges déjà préparés contenant plusieurs types de plantes. « Il est difficile de déterminer quelle est la plante la plus dangereuse ou celle qui prédomine ». Selon lui, ces produits provoquent des insuffisances rénales aiguës à court terme. Autrement dit, les reins perdent brutalement leur capacité de filtration. « Cela entraîne une rétention d’eau et des déchets du métabolisme (comme l’urée) ainsi que des troubles ioniques. La personne n’urine presque plus et développe des œdèmes, c’est-à-dire des gonflements dus à la rétention de ce liquide ».

Il ajoute que parfois, à ces symptômes s’ajoutent des difficultés respiratoires et des troubles de la conscience. Si cette insuffisance rénale aiguë n’est pas correctement traitée, les reins perdent progressivement et de manière irréversible, leur capacité de filtration.« Cela conduit alors à une insuffisance rénale chronique. Celle-ci entraîne diverses complications allant de la rétention d’eau et d’ions jusqu’à l’anémie ».

Le professeur Nyandwi révèle qu’une étude réalisée en 2018 au CHUK a montré que 6,5 % des patients dialysés avaient consommé des médicaments traditionnels. « Compte tenu de l’augmentation des cas supposés d’empoisonnement dans la communauté et du fait que les personnes concernées consultent les tradipraticiens, nous constatons que les cas d’insuffisance rénale aiguë secondaire, causés par les plantes médicinales, sont en hausse ».

Il prévient également que cette maladie n’épargne personne. « Tout le monde est concerné : enfants, jeunes et adultes. Actuellement, la pathologie supposée traitée, c’est l’empoisonnement ». Il ajoute que l’usage incontrôlé des infusions et des compléments alimentaires, dont la qualité n’est pas vérifiée, constitue un facteur de destruction des reins.
Contactés, les différents tradipraticiens n’ont pas pu réagir.

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