Lundi 03 novembre 2025

Économie

Groupements financiers communautaires : 10 milliards de BIF volatilisés

03/11/2025 0
Groupements financiers communautaires : 10 milliards de BIF volatilisés

La Banque de la République du Burundi (BRB) a annoncé, le 20 octobre 2025, que plus de 10 milliards de BIF des déposants des groupements financiers communautaires se sont volatilisés. Selon Simplice Nsabiyumva, directeur de la supervision et de la stabilité financière à la BRB, les groupements financiers posent actuellement un grand problème dans le secteur financier. L’économiste Jean Ndenzako fait une lecture critique du scandale des groupements financiers au Burundi.

Que pensez-vous de cette affaire ?

L’affaire du détournement de plus de 10 milliards de BIF par des groupements financiers non agréés soulève des préoccupations majeures quant à la stabilité du système financier, la régulation des institutions informelles et la confiance des agents économiques dans les mécanismes d’intermédiation monétaire. Ce phénomène, qui s’inscrit dans un contexte de faible bancarisation et de recherche de rendements élevés par une population souvent exclue des circuits financiers formels, révèle les tensions entre inclusion financière et vulnérabilité systémique.

Que dire de la sortie de la BRB ?

L’intervention de la Banque de la République du Burundi, par la voix de son directeur de la stabilité financière, soulignant le caractère frauduleux de telles promesses, marque une tentative de réaffirmation de l’autorité monétaire face à une désintermédiation incontrôlée.

Quel est l’impact sur l’économie nationale ?

Sur le plan macroéconomique, de telles pratiques compromettent l’efficacité de la politique monétaire. En effet, lorsque des structures non régulées captent une part significative de l’épargne nationale, elles échappent aux instruments de contrôle de la Banque Centrale, notamment en matière de taux d’intérêt, de liquidité et de transmission des signaux monétaires.

Cette désintermédiation informelle peut accentuer les distorsions dans l’allocation du capital, favoriser la spéculation et alimenter des bulles de crédit non productif. Le fait que ces groupements promettent des rendements élevés, souvent irréalistes, crée un effet d’éviction vis-à-vis des institutions bancaires traditionnelles, dont les produits sont perçus comme moins attractifs, malgré leur sécurité juridique.

Et pour les ménages ?

Du point de vue microéconomique, l’impact sur les ménages est particulièrement préoccupant. L’attrait pour des gains rapides, dans un contexte de précarité et de faible littératie financière, conduit de nombreux individus à investir leurs économies dans des schémas qui relèvent de l’arnaque ou du système pyramidal. La perte de ces fonds, souvent non assurés, entraîne une contraction de la consommation, une augmentation de l’endettement informel et une détérioration du capital social. En outre, la méfiance générée par ces scandales peut affecter durablement la perception des instruments d’épargne et de crédit, même lorsqu’ils sont légitimes, freinant ainsi les efforts d’inclusion financière promus par les autorités.

Quid du rôle de la BRB ?

Sur le plan institutionnel, cette situation met en lumière les limites de la régulation et de la supervision financière au Burundi. L’existence de groupements financiers non agréés, opérant en marge du cadre légal, témoigne d’un déficit de coordination entre les organes de contrôle, les collectivités locales et les acteurs communautaires. Le rôle de la Banque Centrale, notamment à travers sa Direction de la Stabilité financière, devient crucial pour renforcer les mécanismes de veille, de sensibilisation et de sanction. La déclaration du directeur, selon laquelle toute promesse de gain élevé est un signe d’arnaque, constitue un signal fort, mais elle doit s’accompagner d’une stratégie proactive de régulation, incluant la cartographie des risques, la certification des institutions de microfinance et la mise en place de dispositifs de recours pour les victimes.

On dirait que les citoyens ne sont pas protégés ?

Les implications de ce scandale dépassent le cadre strictement financier. Elles interrogent la capacité de l’État à protéger les citoyens contre les abus économiques, à promouvoir une culture de la transparence et à instaurer un climat de confiance propice à l’investissement.

Que doivent faire les autorités ?

Dans un pays en quête de stabilité et de développement, la lutte contre les détournements et les pratiques frauduleuses dans le secteur financier est indissociable de la consolidation de l’État de droit et de la modernisation des institutions économiques. La mobilisation des autorités, des partenaires techniques et des acteurs de la société civile sera déterminante pour transformer cette crise en opportunité de réforme et de renforcement du tissu financier national.

Catégorisation des institutions exerçant les activités de microfinance

Première catégorie: les Entreprises de microfinance, les Sociétés coopératives financières et autres types d’institutions de microfinance ayant la forme juridique de société anonyme, de société publique ou de société mixte qui effectuent les opérations de collecte et d’octroi de crédits et qui offrent accessoirement d’autres services financiers au profit de leurs clientèles.

Deuxième catégorie : les Fonds de financement et/ou de garantie exerçant les activités de microfinance, les Programmes de microcrédit affiliés aux Organisations non gouvernementales (ONG) et aux Associations sans but lucratif (ASBL) qui octroient des crédits mais qui ne sont pas autorisées à collecter les dépôts du public.

Troisième catégorie : les Coopératives d’Epargne et de Crédit ayant la forme juridique de Société coopérative, qui exécutent les opérations de collecte des dépôts de leurs membres et leur consentent des crédits et accessoirement d’autres services financiers.

Quatrième catégorie : les Groupements financiers communautaires de type sociétés coopératives, groupements pré-coopératifs, associations villageoises d’épargne et de crédit qui collectent les cotisations de leurs membres et leur octroient des crédits selon l’approche convenue. L’exercice des activités de ces associations ne requiert pas l’agrément mais l’enregistrement auprès de la Banque centrale.

BRB

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