Jeudi 25 avril 2024

Économie

Filière café : les caféiculteurs se lamentent

29/03/2022 5
Filière café : les caféiculteurs se lamentent
Mélance Hakizimana : « Il y a beaucoup de commissionnaires dans le secteur café »

Des prix bas, un manque d’encadrement, d’intrants comme les fertilisants, … La plupart des caféiculteurs ne se sentent plus attachés à cette cuture qui a fait la fierté de l’économie burundaise au café, il y a quelques années. Et comme conséquence, la production diminue.

« Au Burundi, on ne peut pas dire que le café se porte bien. Il y en a qui essaient de l’entretenir surtout les plus âgés, mais, beaucoup d’autres vergers sont à l’abandon. Ils ne sont plus entretenus », souligne Mélance Hakizimana, un caféiculteur de Giheta, dans la province de Gitega.
D’après lui, les caféiculteurs sont de plus en plus exclus de la filière alors que ce sont eux qui investissent des moyens colossaux dans l’entretien. Pour ses 6.000 caféiers, cet agri-éleveur affirme que, pour cette campagne, il a récolté moins de 100 kg alors qu’il y a quelques années, il pouvait avoir cinq tonnes.

Pour son entretien, il affirme débourser autour de 7 millions BIF. Là, il comptabilise l’achat de la paille, les intrants, les moyens des déplacements et le paiement des ouvriers.

Des cultures vivrières à la place du café

Cet agri-éleveur trouve que le caféiculteur n’est pas bien payé : « Comparativement aux autres cultures même vivrières, le prix d’un kg de café reste dérisoire. Il faut qu’il soit au moins fixé à 1.000 BIF ».

Ce qui décourage, selon lui, les caféiculteurs. « Ainsi, ils préfèrent les arracher pour y mettre du haricot, la pomme de terre, du maïs, etc. Au moins là, ils savent qu’ils vont récolter deux ou trois fois par an ».

Ce vétéran caféiculteur dénonce aussi la présence de plusieurs commissionnaires dans le secteur café. « Ce sont eux qui profitent de nos efforts. Les caféiculteurs ne reçoivent que des miettes. »

De son côté, Joseph Manirampa, de la Cnac Murima w’Isangi évoque le faible encadrement des caféiculteurs et l’insuffisance ou la rareté du fumier et des produits phytosanitaires. « Seul le gouvernement ne peut pas encadrer tous les caféiculteurs ».

Pour redynamiser cette culture, il estime qu’il est important de redonner la parole aux caféiculteurs. « Sinon, la production va continuer à chuter », prévient-il.

En ce qui est de l’augmentation du prix, Déo-Guide Rurema, ministre de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage a annoncé que pour la campagne 2022-2023, le prix au producteur sera d’au moins 800BIF/kg pour le café cerise A et au moins 400 BIF /kg pour le café cerise B.

S’exprimant lors d’un point de presse, la semaine passée, il a indiqué que pour la campagne 2021-2022, la quantité totale du café vert produit est de 6 490,662 tonnes.

Et la quantité totale exportée jusqu’au 15 mars est de 6 216,648 tonnes pour une valeur de 26 025 454 dollars américains, soit un taux de commercialisation de 95,8%, a-t-il mentionné.

Et pour 2022-2023, le ministre Déo Guide Rurema a signalé qu’on s’attend à une production estimée à 114 725 tonnes de café cerise soit 17 898 tonnes de café vert.

Vu les résultats de la commercialisation du café pour 2021-2022, il a aussi recommandé que les caféiculteurs soient être primés à hauteur de 100BIF/kg de cerise A et 50BIF/kg de cerise B. « Ce qui doit être fait selon lui avant la fin du mois d’avril », a-t-il souligné.

Forum des lecteurs d'Iwacu

5 réactions
  1. Stan Siyomana

    1. Vous écrivez:« Vu les résultats de la commercialisation du café pour 2021-2022, il a aussi recommandé que les caféiculteurs soient être primés à hauteur de 100BIF/kg de cerise A et 50BIF/kg de cerise B… »
    2. Mon commentaire
    A la bourse Intercontinental Exchange (ICE) U.S où se fait le commerce international de Coffee C Arabica, le contrat à terme pour livraison en mai 2022 est allé de 1,3275 dollars américains par livre (donc par 453,6 grammes) au début d’avril 2021 pour atteindre 2,6045 (croissance de 96,2%) le 10 février 2022.
    Aujourd’hui ce prix est de 2,167 dollars (croissance de 63,24% en une année).
    https://www.barchart.com/stocks/quotes/KCK22/interactive-chart

    • Stan Siyomana

      Un détail très intéressant: à la bourse Intercontinental Exchange (ICE) U.S., le café arabica provenant du Rwanda et du Burundi est moins cher que le café kényan, tanzanien ou ougandais.
      « Deliverable Origins
      Mexico, Salvador, Guatemala, Costa Rica, Nicaragua, Kenya, Papua New Guinea, Panama, Tanzania, Uganda, Honduras, and Peru all at par, Colombia at 400 point premium, Burundi, Rwanda, Venezuela and India at 100 point discount, Dominican Republic and Ecuador at 400 point discount, and Brazil at 600 point discount… »
      https://www.ice.com/products/15/Coffee-C-Futures

  2. arsène

    « Pour ses 6.000 caféiers, cet agri-éleveur affirme que, pour cette campagne, il a récolté moins de 100 kg alors qu’il y a quelques années, il pouvait avoir cinq tonnes. »

    Un caféier produit entre 2 et 4.5 kg de café cerise par an. Visiblement, cet agriculteur a consacré près de trois hectares de terrain à sa caféière – ce qui est énorme (les caféiers sont généralement plantés aux écartements de 1.5 m sur 2.5 m). C’est compréhensible que trouver du paillis pour une si grande superficie soit un travail de titan, vu la rareté de terre en commune de Giheta.
    Seulement, on ne peut pas comprendre comment il s’est quand même donné la peine de glaner du café à raison de 16 g par arbre (ce travail coûte plus cher que la récolte qu’on en tire).
    L’agriculture au Burundi dépend de plusieurs aléas qui font que l’agriculteur est rarement maître de son activité. Une caféière de avec 6 000 pieds de caféier produisant 6 grammes/pied reflète une problématique autrement plus complexe que la liste des problèmes évoqués dans le titre à savoir, des prix bas, un manque d’encadrement, d’intrants comme les fertilisants.

  3. Gito

    La production du café vers les années 1980 1986 avoisinait les 40 000 Tonnes. Nous sommes maintenant en dessous de 10 000 Tonnes.
    S il apporte encore quelques devises au pays, c’est quasiment rien au paysan cultivateur.
    Juste regardez. Avec un petit capital de 1 million de fbu on peut cultiver et bien fumier un ha pour y cultiver du maïs « composite ».
    Les rendements sont de 7 à 8 tonnes par ha.
    Au bas mot, on gagne autour de 6 millions.
    C’est impossible d’avoir de tells résultats avec le café.
    Note de l’éditeur, demandez aux agronomes si j’exagère

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