L’État burundais veut mettre de l’ordre dans la gestion de son patrimoine immobilier. Alors qu’il dépense près de 9 milliards de francs burundais chaque mois pour loger ses services, les revenus tirés des maisons qu’il loue à des particuliers ne dépassent pas 500 millions. Un déséquilibre qui inquiète la société civile et qui pousse désormais le gouvernement à revoir sa politique de gestion et d’occupation des biens publics.
Selon les récentes déclarations du Premier ministre, Nestor Ntahontuye, l’État loue actuellement plus de 300 maisons pour loger son personnel et ses services administratifs, tout en disposant d’un parc immobilier dépassant les 600 maisons louées à des particuliers. Pourtant, les recettes tirées de ces locations demeurent faibles : elles ne dépassent pas 500 millions de francs burundais par mois, alors que les dépenses liées à la location des bâtiments pour les services publics atteignent près de 9 milliards de francs burundais chaque mois, d’après le ministre en charge des finances, Alain Ndikumana.
Face à cette contradiction, le gouvernement burundais veut désormais « profiter pleinement de son patrimoine immobilier public ». Depuis deux semaines, le chef du gouvernement a effectué plusieurs descentes sur le terrain, notamment dans les provinces de Gitega et Buhumuza, ainsi qu’à Bujumbura, pour constater l’état des bâtiments publics. Le constat est sans appel : certains biens immobiliers appartenant à l’État sont loués à des prix dérisoires, tandis que d’autres sont occupés sans contrat officiel.
Dans plusieurs provinces, les loyers des maisons publiques sont particulièrement bas, parfois fixés à 3 000, 6 000, 10 000 ou 30 000 francs burundais seulement. « Nous avons remarqué que l’État dépense beaucoup pour la location des maisons, alors qu’il tire très peu de recettes des maisons qu’il loue à des particuliers. Nous allons veiller à ce que l’État occupe ses propres bâtiments afin de réduire les dépenses locatives », a déclaré le chef du gouvernement burundais après la visite.
Un plan national pour recenser et valoriser les bâtiments publics

Ce dernier a annoncé toute une série de mesures pour rationaliser la gestion de ce patrimoine. Parmi elles figure la récupération progressive des maisons publiques actuellement occupées par des particuliers, souvent sans contrat légal. « Il faut que les locataires, surtout ceux de l’intérieur du pays, remettent les maisons. La plupart n’ont même pas de contrat de location. Ces bâtiments seront réhabilités et réaffectés aux services de l’État », a ajouté Nestor Ntahontuye.
Une commission chargée d’évaluer la situation du patrimoine immobilier public sera prochainement mise en place. Celle-ci aura pour mission d’analyser les différents contrats de location existants et de proposer un plan de relocalisation du personnel de l’État dans les maisons disponibles. Dans un rapport en cours d’élaboration, quatre catégories de bâtiments ont été identifiées : les maisons louées par l’État pour ses besoins, celles qu’il met en location à des particuliers, les bâtiments publics inoccupés et, enfin, ceux occupés illégalement par des particuliers sans contrat.
Ces initiatives interviennent peu de temps après les préoccupations exprimées par les députés, qui avaient interpellé le gouvernement sur la mauvaise gestion du patrimoine immobilier public. Devant l’Assemblée nationale, le 29 octobre 2025, le ministre Alain Ndikumana, a reconnu la nécessité d’une évaluation rigoureuse de ces biens. « Nous allons examiner les maisons de l’État qui sont louées et celles que l’État loue pour ses services, afin de les valoriser en fonction de leur standard et de leur localisation », a-t-il déclaré.
Le ministre a par ailleurs souligné que le nombre exact de biens immobiliers appartenant à l’État reste encore inconnu, en raison d’un manque de suivi et d’un désordre persistant dans la gestion du patrimoine public. « Actuellement, on ne connaît pas le nombre exact de bâtiments, de machines ou d’équipements appartenant à l’État, notamment ceux présents dans les hôpitaux, alors que ces matériels sont rachetés chaque année », a-t-il déploré. Le ministre des Finances a expliqué que cela est dû au flou qui règne dans les procédures de passation des marchés publics.
Pour remédier à cette situation, le gouvernement prévoit d’allouer une enveloppe de 500 millions de francs burundais aux provinces afin de réhabiliter les bâtiments appartenant à l’État. En parallèle, une commission nationale d’inspection sera créée pour identifier les véritables occupants des maisons publiques et proposer une réorganisation de leur gestion.
Réactions
Faustin Ndikumana : « Certains dignitaires construisent leurs propres immeubles et les font louer à l’État »
Pour Faustin Ndikumana, directeur national de l’organisation Parole et Action pour le Réveil des consciences et l’Évolution des mentalités (Parcem), « actuellement, on constate l’augmentation du recours de l’État à la location des bureaux pour ses services publics ». Il explique cette situation par deux causes principales. « D’abord, il y a l’insuffisance des bureaux de l’État, l’insuffisance des bâtiments publics pour couvrir les besoins des services publics. Deuxièmement, l’investissement dans l’immobilier public est insuffisant actuellement. » En effet, le manque de bâtiments adaptés pousse de nombreuses institutions étatiques à louer des immeubles privés, souvent à des coûts élevés, grevant ainsi le budget national.

Le constat dressé par Parcem est sans appel : le patrimoine immobilier public est vieillissant et mal entretenu. Faustin Ndikumana souligne qu’« il n’y a pas de fonds d’investissement suffisants dans la construction des bâtiments publics. Il n’y a même pas d’entretien de ces bâtiments, et on voit une vétusté de ces bâtiments qui sont actuellement mal entretenus ». Plusieurs infrastructures administratives, dont certaines abritent des ministères stratégiques, se trouvent dans un état de dégradation avancée.
L’exemple le plus frappant est celui du bâtiment qui hébergeait les bureaux des ministères de l ’intérieur et de celui des Affaires étrangères. « La vétusté de ce bâtiment a été constatée, mais au lieu de l’entretenir ou de construire un nouveau bâtiment pour le remplacer, le ministère de l’Intérieur a dû recourir à la location d’un autre immeuble au quartier 10. » Une situation jugée paradoxale pour des ministères de souveraineté qui, selon lui, « devraient avoir leurs propres bureaux ».
Pourtant, le gouvernement burundais avait déjà lancé une politique visant à promouvoir l’investissement dans l’immobilier public afin de doter l’administration de bâtiments modernes et adaptés. Mais cette ambition n’a pas produit les effets escomptés. « Très récemment, il y avait une politique de promouvoir l’investissement dans l’immobilier public afin de construire des bureaux de l’État régulièrement, mais cette politique n’a pas abouti à des résultats efficaces et palpables. »
Au-delà du manque d’entretien et de planification, Faustin Ndikumana pointe du doigt la corruption et les conflits d’intérêts qui gangrènent le secteur. « Certains dignitaires, certains hauts placés dans l’administration, construisent leurs propres immeubles et les font louer à l’État. » Ce type de pratiques, ajoute-t-il, constitue « déjà un conflit d’intérêts ». Le problème est aggravé par « une collusion entre les entrepreneurs privés qui construisent et louent leurs immeubles à l’État à des prix extrêmement élevés, alors qu’une partie de ces fonds est partagée entre le locataire, qui est l’État, et le propriétaire de l’immeuble ».
Le retard dans la réalisation des projets publics est un autre défi majeur. Faustin Ndikumana cite notamment le retard dans la construction de l’immeuble de la Banque centrale, alors que l’immeuble qui abrite le bureau de la Banque commerciale du Burundi touche à sa fin. Selon lui, « il y a un problème même au niveau du retard dans l’exécution des contrats de construction des immeubles de l’État », une situation due, entre autres, à un système biaisé d’octroi de marchés publics.
Face à ces constats, Parcem formule plusieurs recommandations. L’organisation propose en premier lieu « de faire un inventaire rigoureux des bâtiments de l’État, l’actualisation de l’actif immobilier appartenant à l’État, de procéder à une réévaluation et de concevoir un plan d’entretien et de construction de nouveaux immeubles selon les besoins établis ».
Enfin, Faustin Ndikumana plaide pour la création d’une structure publique spécialisée chargée de la gestion transparente du patrimoine immobilier de l’État. Ce service, selon lui, devrait suivre de près « les contrats de location, qu’il s’agisse des locations où l’État perçoit des loyers ou de celles où il paie régulièrement des loyers aux propriétaires privés ».
Pour Parcem, une gestion rigoureuse, transparente et planifiée du parc immobilier public permettrait non seulement de réduire les dépenses publiques liées aux locations, mais aussi de renforcer l’efficacité des services étatiques et de restaurer la confiance des citoyens dans la gestion des biens communs.
Gabriel Rufyiri : « C’est du vol organisé. »
« Le patrimoine immobilier de l’État est vraiment mal géré à tous les niveaux. Il regorge de beaucoup de problèmes. » Le président de l’Olucome en a relevé plusieurs. « Le premier problème est le mauvais entretien des bâtiments publics, y compris même les maisons qui sont utilisées comme bureaux, les bâtiments de location, les maisons d’habitation ou les maisons qui sont louées par des particuliers et qui les utilisent comme commerces. »
Gabriel Rufyiri donne des exemples comme l’ancienne villa du maire au centre-ville, les maisons des quartiers INSS et OUA, les anciens gîtes, les maisons des gouverneurs, etc. « Dire que le gouvernement utilise plus de 9 milliards en locations par an au moment où ses propres bâtiments mal entretenus sont loués à vil prix, ce n’est pas normal. C’est du vol organisé. »
Le deuxième problème, selon M. Rufyiri, concerne des bâtiments publics qui avaient été loués par l’État alors qu’ils appartenaient à l’État. « Je donne un exemple du palais présidentiel. Après plusieurs enquêtes, on a trouvé que le bâtiment que le gouvernement du Burundi a loué à la famille de Michel Micombero appartenait à l’État. L’Olucome a mené des investigations et finalement, l’État du Burundi est rentré dans ses droits. »
Un autre problème, ce sont des bâtiments privés qui sont loués par l’État à un montant exorbitant. « Nous avons déjà écrit beaucoup de correspondances, mais malheureusement, personne n’a voulu nous écouter. » En plus de cela, poursuit-il, lorsque l’État du Burundi construit des bâtiments, souvent il y a une exagération des factures et c’est un grave problème.
Pour le président de l’Olucome, les solutions à envisager doivent être des solutions vraiment idoines et qui protègent l’État. « Le gouvernement doit revoir sa politique nationale de gestion immobilière des bâtiments de l’État et de ceux qui sont en train d’être construits. Il faut aussi faire l’identification honnête et sincère des bâtiments publics, mais également revoir les prix de location des bâtiments, que ce soit ceux qui appartiennent à l’État ou ceux qui sont loués par ce dernier. »
Gabriel Rufyiri cite l’article 69 de la Constitution, qui stipule qu’un bien public est sacré et inviolable. « Ceux qui ont fait louer des bâtiments de l’État à vil prix doivent être sanctionnés par la loi, d’un côté. Mais de l’autre côté, ceux qui ont loué les bâtiments privés à des prix exorbitants doivent quand même être poursuivis. »
Un constat amer
Lors du Conseil des ministres du 1ᵉʳ juin 2022, le ministre en charge des finances de l’époque a présenté une note sur le recensement national du patrimoine immobilier géoréférencé et digitalisé de l’État. 17 545 immeubles ont été recensés. Selon ce recensement, la majorité des immeubles est constituée des établissements scolaires ainsi que des bâtiments administratifs. 372 immeubles de l’État font l’objet de location.
Toutefois, des défis majeurs se sont manifestés. La liste des immeubles loués n’était pas exhaustive, car certains gestionnaires en charge du patrimoine de l’État n’ont pas voulu communiquer l’effectif de ces immeubles et le montant réel perçu. De plus, les contrats de location établis n’étaient pas conformes à la réglementation en vigueur. Par ailleurs, les recettes issues des locations n’étaient pas directement versées sur le compte général du Trésor. « Les immeubles de l’État en location étaient mal entretenus et les équipements mal maintenus. »





1. Mwanditse muti: »afin de les valoriser en fonction de leur standard et de leur localisation », a-t-il déclaré…
2. Ico ndabivuzeko.
Jewe ndashigikiyeko Reta itoza amafera akwiye kunyubakwa zayo zirimwo abantu bazikota/locataires.
Jewe sindi umuhinga w’ivy’inyubakwa mugabo niyumvira ko igicapo c’inzu abantu bazobamwo gitandukanye n’ic’inyubakwa izoba bureau aho igisata kanaka ca Reta kizokorera. Niyumvirako izo nzu zakera ubu ziri muri karitiye.
RETA YARI IKWIYE KUBAKA INYUBAKWA IZOKORERAMWO/BUREAUX NSHASHA KANDI ZIJANYE N’IBIHE TUGEZEMWO. Vyokumvikana ko ibiro vya nyumbakumi biba muri karitiye.
Hose uravye mubihugu bidukikije, ibiro bishasha vya Reta biba bisa neza.
Il reste à se demander ce que le peuple a fait au bon Dieu pour vivre le cauchemar qu’il vit. S’il a fauté contre Dieu , qu’il confesse.
S’il a fauté contre le pouvoir, qu’il demande pardon collectivement .
Voici mon petit commentaire à propos de la photo de cette maison appartenant à l’Etat. Sa toiture est en éternit au vu des tôles ondulées. La probabilité est très forte que ces tôles contiennent de l’amiante, un matériau réputé dangereux pour la santé humaine car il provoque l’amiantose au niveau des poumons. Tant que le matériau est intact, pas de problème. Lors de son retrait et suite à sa désagrégation, ses poussières vont contaminer les poumons par respiration et c’est là que le problème se pose.
Extrait de l’IA:
Eternit désigne à la fois un matériau de construction en fibrociment (plaques de toiture et bardage) et une marque commerciale historique associée à ce matériau. Bien que le fibrociment moderne sans amiante soit considéré comme sûr, l’ancien « Eternit » est associé au passé de l’amiante, ce qui nécessite une prudence particulière lors de son retrait. Le nom est devenu un terme générique pour les plaques de toiture ondulées en fibrociment.