Dimanche 05 mai 2024

Société

Buterere : Des acquéreurs des parcelles à Kiyange dans le désarroi

05/05/2023 2
Buterere : Des acquéreurs des parcelles à Kiyange dans le désarroi
Une des maisons construites dans le périmètre en conflit à Kiyange

Des acquéreurs des parcelles établies sur un périmètre de 546 sur 222 mètres à Kiyange dans la zone urbaine de Buterere déplorent l’exécution forcée d’un jugement rendu en 2008. Cette décision judiciaire attribue ces terres à un certain Selemani Kambenga et exige le délogement des autres acquéreurs. Ces derniers demandent un procès équitable.

Dans une lettre adressée au président du tribunal de résidence de Buterere le 14 avril 2017, la ministre de la Justice Aimée Laurentine Kanyana avait demandé à ce tribunal de résidence d’exécuter le jugement RC n° 0152/07 rendu en audience publique du 16 juin 2008 attribuant une partie de 546 sur 222 mètres à la famille de Selemani Kambenga, qui serait d’origine congolaise selon certains habitants de Kiyange.

Plus tard, le 13 juillet 2017, la même ministre de la Justice a annulé sa dernière correspondance : « Nous avons constaté par après que cette exécution pourrait porter préjudice aux intérêts d’autres personnes qui nous ont saisis et dont la doléance est en cours d’analyse ».

Elle a demandé au président du tribunal de résidence de Buterere à sursoir à cette exécution en attendant que les questions y relatives soient définitivement vidées.

En début de cette année, l’actuelle ministre de la Justice Domine Banyankimbona a aussi exigé l’exécution immédiate du jugement RC n° 0152/07 rendu en audience publique du 16 juin 2008 : « On a constaté que cela fait beaucoup des années que ce jugement ne soit pas mis en application. Cela peut ternir l’image de la justice burundaise ».

Des acquéreurs des parcelles dans ce périmètre déplorent l’exécution d’un jugement rendu en leur absence : « Le procès de 2008 opposait Selemani Kambenga et un certain Grégoire Mushatsi. Ce dernier n’avait pas de procuration pour nous représenter. Après avoir pris connaissance de ce jugement rendu en 2008, nous avons fait une tierce opposition en 2010. Le dossier est aujourd’hui à la Cour suprême. Alors qu’on attend la cassation, le président du tribunal de résidence de Buterere est venu exécuter ce jugement, ce 24 février 2023 », explique un habitant de Kiyange.

Selon lui, la mise en application de ce jugement a été forcée et suivi des intimidations. Le tribunal a donné aux acquéreurs un délai de trois mois pour céder ces terres à celui qui a gagné le procès.

Ce 2 mai, le ministère de la Justice a accordé une audience à ces acquéreurs pour expliquer leurs doléances : « Ce délai de grâce prendra fin ce 24 mai. Le ministère de la Justice nous a demandé de formuler chacun ses doléances, mais n’a pas suspendu sa mesure exigeant une exécution immédiate de ce jugement de 2008. Nous avons peur que nous soyons forcément expulsés après ce délai ».

Il affirme que la commune Mutimbuzi, sous l’ordre du président Jean Baptiste Bagaza, avait octroyé ces parcelles à certains burundais en 1979 après l’expulsion des Congolais qui les occupaient.

« C’est incompréhensible que ces Congolais reviennent après 30 ans pour réclamer ces terres. Certaines familles burundaises sont ici depuis les années 1980. Elles ont des enfants et petits-enfants qui sont nés ici », soutient une habitante de cette localité. Selon elle, beaucoup de familles risquent de se retrouver dans la rue suite à la mise en application de cette mesure de la justice.

Ces acquéreurs appellent les hautes autorités du pays à prendre ce dossier en main et trouver une solution favorable à toutes les parties. Ils demandent le ministère de la Justice de suspendre le délai de grâce de trois mois et attendre la cassation du dossier RCC 29924 à la Cour suprême : « Comme il y a la continuité de l’Etat, le gouvernement actuel doit assumer ses responsabilités et nous rétablir dans nos droits. Nous ne sommes pas des acquéreurs illégaux ».

Quid du jugement rendu en 2008 ?

Selon le jugement RC 0152/07 rendu par le tribunal de résidence de Buterere en 2008, ces terres s’étendant sur un périmètre de 546 sur 222 mètres à Kiyange appartiennent à Selemani Kambenga. Aucune autre personne n’avait le droit de donner ni de vendre des parcelles dans ce périmètre.

Pour ceux qui affirment que ces terres ont été attribuées par la commune Mutimbuzi après l’expulsion des congolais, le tribunal a expliqué que ce périmètre n’a jamais été déclaré d’utilité publique moyennant une indemnité juste et préalable. Il a indiqué qu’il n’a pas trouvé aucune loi ou correspondance portant expulsion des congolais propriétaires des terres à Kiyange.

Le jugement a soutenu que Selemani Kambenga n’a jamais retourné en RDC et qu’il a continué d’exercer des activités agricoles dans ces terres après sa relocalisation à Buyenzi : « La loi devait le protéger comme toute autre personne. Rien ne peut justifier l’expropriation de sa propriété. Il n’y a eu que de rumeurs pour l’intimider, car aucune correspondance n’a été sortie pour communiquer cette expropriation ».

Selon ce jugement, toute personne ayant acquis ou acheté une parcelle dans cette propriété de Selemani Kambenga a été trompé par des gens qui n’avaient pas droit de donner ou de vendre ces terres. Ainsi, tous les accords d’achat ou d’acquisition sont nuls et de nul effet. Il a été demandé à tous ces acquéreurs de céder, avec tous leurs biens, cette propriété à celui qui a gagné le procès.

Forum des lecteurs d'Iwacu

2 réactions
  1. Karenga

    Il affirme que la commune Mutimbuzi, sous l’ordre du président Jean Baptiste Bagaza, avait octroyé ces parcelles à certains burundais en 1979 après l’expulsion des Congolais qui les occupaient.

    « C’est incompréhensible que ces Congolais reviennent après 30 ans pour réclamer ces terres. Certaines familles burundaises sont ici depuis les années 1980. Elles ont des enfants et petits-enfants qui sont nés ici », soutient une habitante de cette localité. Selon elle, beaucoup de familles risquent de se retrouver dans la rue suite à la mise en application de cette mesure de la justice.
    Quand est ce les Burundais vont comprendre que Kunyaga utwabandi vyaheranye nazirya ntwaro za baryogora tubonane? Ils doivent comprendre qu’un Congolais reside au Burundi peut acheter des terres au Burundi sans qu’il y ai une expropiation abusive, il a le droit de ses terres comme tous les autres Burundais. Oublions le passée des spolieurs, les régimes sombres de dictatures de 1966-2003. C’est fini le temps des faisseurs de pluie et du bon temps.

  2. hakizimana

    il ya des jugements qui causent des problèmes plus qu’ils ne les règlent. cependant , ça ce n’est pas le souci du juge car il est censé dire le droit et rien que le droit. Pour les juristes, une telle situation relance le débat qui date de très longtemps relative à la différence entre le droit et la justice. on peut dire le droit sans rendre justice et toute justice ne cadre pas toujours avec le droit. Dans de telles circonstances, il revient donc aux instances de haut niveau( ministre de la justice par exemple) de trouver en toute bonne foi, des solutions alternatives qui sont justes , raisonnables et équitables.

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