Au moment où certains partis politiques disposent de moyens logistiques importants, les candidats indépendants peinent battre campagne. Malgré leur reconnaissance légale, ils doivent affronter des défis juridiques, économiques et organisationnels. Mais, bien décidés à incarner une alternative citoyenne, ces candidats veulent porter la voix du peuple, s’ancrer dans les réalités locales et renforcer la redevabilité des élus envers la population.
Le premier écueil majeur est d’ordre législatif. Contrairement aux partis politiques, à qui il suffit d’obtenir 2 % des suffrages pour décrocher un siège à l’Assemblée nationale, les candidats indépendants doivent atteindre un seuil de 40 %. Une disposition qualifiée ’’d’injuste et discriminatoire’’ par plusieurs d’entre eux.
« La question des 40 % de voix représente un obstacle insurmontable pour les candidats indépendants. Dans un système électoral taillé sur mesure, il est difficile voire inconcevable qu’un indépendant puisse atteindre un tel score de suffrages. Cette exigence, perçue comme irréaliste, décourage les soutiens et dissuade les investissements dans des candidatures indépendantes, jugées trop incertaines », explique Jules Niyongabo un candidat indépendant dans la province de Bujumbura.
Il ajoute que les indépendants se retrouvent isolés, livrés à eux-mêmes, sans ressources ni appuis pour mener une campagne viable.
« Il y a une certaine injustice et une forme d’égoïsme de la part des députés issus des partis politiques, car ce sont eux qui votent et adoptent les lois, en privilégiant souvent ce qui leur plaît au lieu de ce qui est bénéfique pour les Burundais et pour notre pays », se lamente Thomas Nzeyimana, alias Mkombozi, un rappeur incisif.
Pour eux cette disposition reflète une volonté manifeste d’ériger des barrières institutionnelles pour limiter l’accès au pouvoir aux indépendants.
Malgré cet obstacle, ils se disent déterminés à se batailler. « Pour ma part, les 40 % demandés pour être élu me semblent insurmontable. Le vrai héros est celui qui surmonte de nombreuses épreuves pour atteindre ses objectifs », s’encourage cet artiste qui être député.
Des contraintes aggravées par la pénurie de carburant
Au-delà de cet obstacle législatif, la réalité logistique constitue un frein supplémentaire à leur élan. Le Burundi fait face depuis plusieurs années à une pénurie répétitive de carburant.
Bien que la Société Pétrolière du Burundi (SOPEBU) ait accordé des autorisations spéciales pour l’approvisionnement des candidats, certains d’entre eux déplorent des pratiques discriminatoires dans les stations-service.
« Malgré les autorisations délivrées par la SOPEBU pour s’approvisionner en carburant, les propriétaires de stations-service imposent aux candidats de faire la queue avec d’autres véhicules ayant des bons spéciaux. Cette situation entraîne des pertes de temps considérables, paralysant ainsi les activités de campagne. », se lamente Jules Niyongabo, candidat indépendant dans la province de Bujumbura.
Par ailleurs, confient certains indépendants, la question financière constitue également le facteur le plus limitant. Ils doivent se débrouiller avec des ressources personnelles limitées.
À ces facteurs, se lamentent-ils, s’ajoutent les retards administratifs dans la délivrance des autorisations de campagne. Plusieurs indépendants affirment avoir attendu plusieurs semaines avant d’obtenir les documents nécessaires pour entamer légalement leurs activités de mobilisation. « Bien que le décret présidentiel stipule que les demandes d’autorisations peuvent être soumises dans les 24 heures précédant une activité, les administrations locales ne respectent pas systématiquement cette règle », déplore ce candidat.
Thomas Nzeyimana : « Le Mkombozi(sauveur) des jeunes burundais »
Dans son programme, il entend d’abord encourager les jeunes à s’émanciper en sortant de la dépendance chronique de l’aide extérieure. Il les incite à développer leurs talents, à entreprendre et à innover, avec un accent particulier sur les technologies numériques.
La jeunesse étant au cœur de sa vision, Thomas Nzeyimana souhaite réformer en profondeur l’éducation, afin qu’elle prépare véritablement les jeunes à l’autonomie économique et à la citoyenneté active.
Il plaide pour l’intégration des formations techniques et entrepreneuriales, et la révision des contenus historiques enseignés, afin de valoriser l’héritage africain.
Mais son engagement ne s’arrête pas là. Cet artiste propose aussi une réforme fiscale favorable aux jeunes commerçants, la reconnaissance et la revalorisation des métiers informels.
Ce musicien suggère l’inclusion des enfants en situation des rues ainsi que des jeunes handicapés dans les politiques de développement. « Chaque jeune, quelle que soit sa situation, doit avoir une chance réelle de participer à l’essor du pays », recommande-t-il.
Enfin, M. Nzeyimana propose une révision de la Constitution pour attribuer 60% des postes de responsabilité à la jeunesse. Il rejette les quotas ethniques et entend favoriser une gouvernance fondée sur la compétence.
Le message de Nzeyimana Thomas est clair : « Le Burundi ne pourra pas atteindre la Vision Burundi, pays émergeant en 2040 et pays développé en 2060 que si sa jeunesse ne s’engage à être actrice et non spectatrice du développement ».
Dieudonné Nahimana : « Pour la réconciliation et le développement inclusif »
Selon lui, sa décision de ne pas s’affilier à un parti politique repose sur une expérience concrète du terrain. En tant que guide spirituel, confie-t-il, il reçoit quotidiennement des personnes issues de divers horizons politiques, ce qui lui permet de constater que les partis restent, pour beaucoup, des sources de méfiance et de fractures sociales.
« L’histoire récente du Burundi montre que plusieurs formations politiques ont souvent utilisé des critères ethniques ou régionaux pour asseoir leur influence, au détriment de l’intérêt général », fustige le Pasteur Dieudonné Nahimana.
Il estime qu’il est temps de transcender les logiques partisanes pour placer la réconciliation nationale au cœur de l’action publique. D’après lui, cette réconciliation est une condition essentielle pour permettre aux citoyens de travailler ensemble dans une vision commune pour le développement.
Sa priorité une fois élu, fait-il savoir, est de faire entendre la voix de la jeunesse, trop souvent marginalisée dans les prises de décisions. « Un bureau permanent sera mis en place à l’aide de ses émoluments pour recueillir les doléances des jeunes de toutes les couches sociales. Ce cadre d’échange servira également à informer les citoyens sur les lois en cours d’élaboration, afin qu’ils puissent contribuer activement au processus législatif », promet-il.
Par ailleurs, ce prédicateur qui se dit ’’ami des jeunes’’ envisage la promotion de l’emploi, notamment en soutenant des métiers longtemps négligés au Burundi.
Il entend plaider pour la reconnaissance et le développement de nouveaux secteurs tels que l’art, les TIC, ou encore les métiers liés à Internet. « Ces domaines représentent aujourd’hui des opportunités concrètes pour l’insertion professionnelle des jeunes », reconnaît-t-il.
Vianney Manirambona : « Pour une jeunesse active, écoutée et valorisée »
Connu encore sous le nom de Mugisha, Vianney Manirambona compte lever les obstacles qui freinent l’épanouissement, l’insertion professionnelle et la participation active des jeunes à la vie politique et économique.
Pour y parvenir, fait savoir Vianney Manirambona, il y aura la création d’emplois décents pour les jeunes. Cela passera notamment, précise-t-il, par la mise en place des politiques publiques favorables à l’entrepreneuriat, à l’innovation et à la réduction du taux d’accès au crédit.
« Les jeunes qui peinent à monter leurs projets bénéficieront d’un accompagnement spécifique, tant sur le plan technique que financier », avant d’ajouter : « Les initiatives de formation professionnelle, de soutien à l’auto-emploi et d’incubateurs de projets seront encouragées à travers des plaidoyers auprès du gouvernement et des partenaires au développement ».
Ce candidat indépendant affirme qu’il va s’atteler à l’inclusion sociale des jeunes souvent marginalisés. Il se dit engagé à créer un cadre d’expression pour les travailleurs domestiques et les jeunes effectuant de petits métiers.
« Je vais mettre en place un centre d’écoute et de soutien psychosocial qui leur permettra non seulement de s’exprimer librement, mais aussi de recevoir l’accompagnement nécessaire pour défendre leurs droits et dénoncer les abus qu’ils subissent ».
M. Mugisha informe que le secteur informel, notamment celui des femmes exerçant le commerce ambulant, sera également structuré. Ces femmes auront accès à des espaces officiels dans les marchés.
Selon lui, ces espaces leur permettront de travailler dans la légalité, de contribuer à l’économie nationale à travers le paiement d’impôts adaptés à leurs revenus, et de bénéficier d’une meilleure protection.
Sur le plan politique, poursuit-il, des réformes sont envisagées. Pour lui, l’actuelle caution exigée pour se présenter aux élections législatives constitue un obstacle majeur pour de nombreux jeunes compétents et motivés. « Une révision à la baisse de ce montant est envisagée afin d’élargir l’accès à la représentation politique. De même, une réflexion est en cours sur la diminution de l’âge minimum requis pour se porter candidat à certaines fonctions électives, permettant à une nouvelle génération de leaders d’émerger ».
Jules Niyongabo : « Pour un Burundi stable, digne et rayonnant »
Pour ce candidat indépendant, la stabilité du pays passe d’abord par des institutions fortes, responsables et respectueuses des droits humains. Il insiste sur la nécessité de mettre fin à l’impunité, de renforcer la lutte contre la corruption et de promouvoir une gestion rigoureuse des ressources publiques.
Jules Niyongabo prône des organes de l’État transparents, au service du peuple et engagés dans la lutte contre les détournements économiques et d’autres malversations.
Sur le plan économique, il s’engage à améliorer le climat des affaires pour attirer les investisseurs locaux et étrangers. Selon lui, cela implique notamment de réduire les taux d’intérêt bancaires, qui freinent l’accès au crédit pour les entrepreneurs et les petites entreprises.
M. Niyongabo prévoit également de mieux exploiter les opportunités offertes par la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), où, selon lui, le Burundi reste encore trop peu visible. « Une bonne intégration économique régionale pourrait pourtant ouvrir de nouveaux débouchés commerciaux pour le pays ».
Dans le domaine de l’éducation, plaide-t-il, une revalorisation du métier d’enseignant à travers une augmentation des salaires, mais aussi par la réhabilitation et la construction d’infrastructures scolaires modernes sont inscrites à l’agenda.
Concernant l’agriculture et l’élevage, il propose une politique axée sur la protection des terres cultivables et la modernisation du secteur de la pêche. Il envisage de transformer le lac Tanganyika en un levier économique, notamment par la création d’unités de transformation du poisson destinées à l’exportation, ce qui permettrait d’augmenter les recettes en devises étrangères.
Enfin, il envisage le retour volontaire et sécurisé des réfugiés burundais figure parmi ses priorités tout en faisant observer que la diaspora burundaise, riche en compétences, doit être pleinement associée à l’édification du pays.
David Niyocungu : « Il faut canaliser les préoccupations des citadins »
Le programme de David Niyocungu est centré sur les problèmes concrets qui affectent les citadins. L’une de ses priorités est d’intervenir auprès du gouvernement afin de suspendre la mesure interdisant la circulation des tricycles, des taxis-motos et des taxis-vélos au centre-ville de Bujumbura.
Il estime que cette décision aggrave les difficultés de transport, allonge les temps d’attente sur les parkings, et freine la fluidité des activités économiques dans la capitale.
Par ailleurs, il s’engage à rechercher des solutions durables pour remédier à la pénurie persistante de carburant. La raréfaction de ce produit, selon lui, est la cause principale de la flambée des prix des biens de première nécessité et contribue à la hausse générale du coût de la vie.
Une collaboration avec les autorités compétentes, notamment le ministère de l’Énergie et la Banque de la République du Burundi (BRB) est envisagée afin de mobiliser des devises et permettre l’importation d’une quantité suffisante de carburant, tout en œuvrant à stabiliser la monnaie nationale.
Sur le plan environnemental, fait-il remarquer, la protection des berges des rivières traversant Bujumbura figure également à son agenda. Il déplore les risques croissants d’inondations qui menacent les habitations riveraines et plaide pour une solution concertée avec le gouvernement.
L’état dégradé des routes de la capitale fait également partie de ses préoccupations. Il propose que l’État noue des partenariats pour réhabiliter ces infrastructures, et redonner ainsi à Bujumbura son image de véritable capitale économique.
Ce natif de la zone urbaine de Musaga souhaite également renforcer les capacités de la REGIDESO en matière de distribution d’eau et d’électricité. Il n’oublie pas l’améliorer la connexion Internet dans la ville.
Enfin, la prise en charge des enfants en situation de rue constitue un axe important de son programme, à travers la création de centres d’hébergement et de formation, où ces jeunes pourraient recevoir une éducation axée sur le patriotisme et être réintégrés dans le système scolaire.
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