Seule l’Anagessa a le droit d’exporter les grains de maïs collectés d’après le ministère ayant l’agriculture dans ses attributions. Certains commerçants critiquent ce monopole en indiquant que ce dernier va affecter même les impôts et taxes. Pour l’Olucome, le gouvernement devrait s’attacher à organiser la population et à promulguer des lois qui facilitent le commerce.
« Cette mesure est injuste pour les commerçants qui exportaient le maïs. Pourquoi ce monopole dans le commerce ? C’est privé. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement s’en mêle. Par ailleurs, on devait exporter plus pour avoir des devises dans notre pays. Est-ce que l’Anagessa va s’en sortir seule ? », s’interroge A. Minani, un agriculteur et commerçant de la commune Kayanza dans la province de Butanyerera.
Pour lui, le rôle de l’Anagessa était de collecter le surplus de la récolte et non la commercialisation. « L’Anagessa a plusieurs soucis. Là je parle comme agriculteur. D’abord, l’argent qu’elle achète nos récoltes arrive trop tard. On ne peut même pas l’utiliser au moment où on le veut. C’est pourquoi, avec l’aide de mes enfants, j’ai pris la décision de le commercialiser ailleurs soit dans d’autres communes, ou à l’étranger. »
La décision du monopole de l’Anagessa dans la commercialisation du maïs a été prise après le constat que des commerçants n’ont pas acheté les grains de maïs au prix fixé par le gouvernement, d’après Prosper Dodiko, ministre en charge de l’agriculture. « Les commerçants qui s’approvisionneront dans l’Anagessa pourront demander la permission au ministère afin qu’ils exportent le maïs. Sinon, seule l’Anagessa va exporter les grains de maïs. Les autres commerçants ont le droit de commercialiser le maïs localement. »
Concernant le paiement des agriculteurs pour les récoltes de la saison précédente, M. Dodiko a appelé les agriculteurs à s’ouvrir des comptes en banque pour qu’ils aient leur argent. « Je voulais rassurer les agriculteurs qu’ils auront leur argent dans deux semaines. »
« L’Etat ne fait pas le commerce, il le contrôle. »
Jean-Noël Nkurunziza, porte-parole de l’Association burundaise des consommateurs, Abuco, fait savoir que l’association ne comprend et ne soutient pas que seule l’Anagessa ait le monopole d’exporter les graines de maïs.
« En effet, une société de l’État qui a dans ses attributions l’achat de tous les grains de maïs dans le pays ne pourrait pas avoir le monopole d’exporter ces grains. L’État ne fait pas le commerce, mais contrôle et régule le commerce. »
Dans ces conditions, poursuit-il, le commerce d’un produit vivrier comme le grain de maïs va subir les déficits de gestion de cette société et en conséquence causer une hausse des prix sur tout le territoire. Le produit finirait par être rare. « Le fait de fixer les prix d’achat comme il le fait aujourd’hui risquerait de décourager le cultivateur avec un impact sur la récolte rendue sur le marché. L’Anagessa, une fois lancée dans l’exportation des grains de maïs, serait en train de saboter le secteur privé dont l’activité gênerait des impôts. »
M. Nkurunziza suggère qu’avant de penser à accorder le monopole d’exportation du maïs à cette société, il fallait d’abord maîtriser tous les paramètres qui font que certains centres de collecte ne sont pas encore approvisionnés. « Cela aidera que la population ne se retrouve pas un jour dans le besoin de grains de maïs alors que l’Anagessa les exporte. »
« L’Anagessa a de nombreuses difficultés »
Alexis Nimubona, chargé de la communication au sein de l’Olucome estime lui aussi que l’Anagessa ne devait pas avoir le monopole d’exportation des graines de maïs, car elle présente des lacunes depuis sa création.
« À titre d’exemple, en 2024, environ 58 % des stocks ont été détériorés dans certains sites de stockage. Par ailleurs, cette même année, l’incapacité à rémunérer les agriculteurs a été manifesté. Les opérations d’achat de la production ont souvent été entravées par des pratiques spéculatives. Il apparaît dès lors nécessaire d’engager des réformes structurelles en profondeur afin de permettre à l’agence de se réorganiser efficacement et d’assurer son bon fonctionnement. »
M. Nimubona estime que les échanges commerciaux menés par des entreprises ou organisations publiques révèlent régulièrement des dysfonctionnements. En conséquence, il appelle le gouvernement du Burundi à se désengager progressivement dans des activités d’achat et de vente des denrées alimentaires afin de laisser opérer librement les mécanismes du marché régis par la loi de l’offre et de la demande.
« Le rôle de l’État devrait plutôt consister à organiser la population, à adopter des lois favorisant le commerce et à en garantir l’application. Les transactions commerciales doivent être confiées aux opérateurs privés. Quant à l’Anagessa, elle devrait se concentrer sur ses missions de régulation, de conservation et de transformation de la production. »
Rappelons que le rôle principal de l’Anagessa est de gérer la sécurité alimentaire du pays, en particulier en ce qui concerne les stocks de denrées de base comme le maïs. Elle est chargée de la gestion des infrastructures de stockage existantes et de la construction de nouvelles, en partenariat avec les ministères et les partenaires. En ce qui concerne l’approvisionnement, elle intervient pour approvisionner le marché en cas de besoin, notamment en période de crise, et participe à la stabilisation des prix.
Charte des utilisateurs des forums d'Iwacu
Merci de prendre connaissances de nos règles d'usage avant de publier un commentaire.
Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes, antisémites, diffamatoires ou injurieux, appelant à des divisions ethniques ou régionalistes, divulguant des informations relatives à la vie privée d’une personne, utilisant des œuvres protégées par les droits d’auteur (textes, photos, vidéos…) sans mentionner la source.
Iwacu se réserve le droit de supprimer tout commentaire susceptible de contrevenir à la présente charte, ainsi que tout commentaire hors-sujet, répété plusieurs fois, promotionnel ou grossier. Par ailleurs, tout commentaire écrit en lettres capitales sera supprimé d’office.