Vendredi 02 mai 2025

Editorial

Un projet maudit

02/05/2025 0

Suivre l’évolution sinueuse du projet de reconstruction du marché central de Bujumbura relève d’un véritable défi. Pour en comprendre les ressorts, il faut remonter douze ans en arrière, précisément au 27 janvier 2013, jour funeste où un incendie a ravagé l’ancien marché central, pilier de l’économie nationale. Ce sinistre a réduit en cendres plus de 3 000 stands officiels et affecté près de 7 000 commerçants. Ce fut un choc national, un tournant tragique : tout a basculé.

Peut-on encore garder espoir ? Le dossier de la reconstruction du marché central a éclipsé bien d’autres sujets, tant au sein du Conseil des ministres que dans l’opinion publique. Des promesses ont été formulées, des entreprises et organisations nationales et internationales ont présenté leurs propositions au gouvernement. Ce dernier a d’ailleurs élevé la reconstruction du marché central de la capitale économique au rang de priorité nationale.

L’histoire retiendra notamment la société chinoise Jiangxi Jianglian International Engineering, qui avait été sélectionnée pour le projet, ou encore la proposition de l’Association des banques et établissements financiers du Burundi, soumise en décembre 2020, analysée et validée par le Conseil des ministres. Comment ne pas être séduit par les promesses d’un complexe moderne réparti en cinq blocs, avec une tour de 30 étages, un centre commercial de plus de 3 000 boutiques, une salle de conférence d’environ 1 000 places, un hôtel cinq étoiles… ? Un projet si ambitieux qui avait inspiré un Conseil des ministres à exiger une maquette représentant trois tours, symbolisant les trois étoiles du drapeau national. L’inauguration était annoncée pour avril 2026. Mais les promesses ne furent pas tenues. Le projet s’est enlisé, comme tant d’autres. Les citoyens attendent toujours des explications.

L’attribution du projet à la société Ubaka Nation Group, le 16 septembre 2024, a redonné un souffle d’espoir. Les travaux préparatoires – retrait des débris, des ferrailles et des tôles – ont été menés à bien. Quatre milliards de francs burundais et 500 dollars américains ont déjà été collectés, pour un projet estimé à environ 500 milliards de francs burundais. Mais voilà : tout est à l’arrêt. Les appels à l’achat d’actions se sont tus. « Ce projet est maudit », a lancé, amer, un actionnaire.

Les zones d’ombre persistent. Où est le contrat entre Ubaka Nation Group et l’État burundais, et que stipule-t-il exactement ? Qui gère les fonds récoltés auprès des investisseurs privés ? Quel est le rôle précis du gouvernement dans ce projet ? Le matériel récupéré sur le site de l’ancien marché a-t-il été vendu ? À quel prix ? Et à qui ?

« On l’attend, on l’attend, et on l’attend. Il va peut-être arriver… » Le patron d’Ubaka Nation Group promet que le nouveau marché central sera opérationnel dans cinq ans. Accordons-lui le bénéfice du doute. Et espérons qu’au début de l’année 2030, les Burundais pourront enfin s’exclamer dans un élan de joie collective : il est là, notre marché tant attendu ! Formulons les vœux les plus ardents pour le succès de ce projet. Croisons les doigts…

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