Vendredi 26 avril 2024

Société

Redevance routière forfaitaire : Des automobilistes très remontés

30/11/2022 5
Redevance routière forfaitaire : Des automobilistes très remontés
L’avenue du gouvernement en plein centre-ville de Bujumbura.

Des conducteurs de bus, des taximens, … tous sont unanimes pour remettre en cause le paiement de la redevance annuelle routière forfaitaire et pointent du doigt le mauvais état des routes.

Mardi 22 novembre. 14h. Nous sommes sur le Boulevard Lieutenant Général Adolphe Nshimirimana. Les élèves du lycée Ngagara sortent des cours et investissent progressivement les bas-côtés de la route. Mais ce n’est pas la vue d’uniformes blanc et noir qui captent l’attention.

Cette avenue qui part de la place des Nations Unies vers les quartiers Mutakura et Carama est parsemée de nids-de-poule, par certains côtés, des trous énormes rendent la circulation sur cette route très difficile. Le bitume dont était revêtu ce boulevard semble être un lointain souvenir. « Je n’emprunte pas beaucoup cette route pour travailler », indique un taximan rencontré.

D’après lui, emprunter régulièrement cette route, c’est prendre le risque d’endommager le moteur de son véhicule. « Si je dois emmener un client vers Mutakura ou Carama, il doit débourser 2000 BIF de plus que le prix normal pour compenser à cause du très mauvais état de cette route », précise-t-il.

Sur l’avenue du Gouvernement (Qui passe devant la Banque de la République du Burundi), c’est la même situation. A l’entrée nord de cette avenue, un trou large et béant oblige les véhicules à emprunter les berges. « Je me demande pourquoi les pouvoirs publics tardent à réhabiliter cette route comme ils l’ont fait pour celle qui passe par l’entrée de derrière la BRB », confie un automobiliste.

Une taxe qui agace les transporteurs

Nous sommes sur le parking de bus assurant le transport vers les quartiers nord de la mairie de Bujumbura. Au niveau des bus partant du Centre-ville vers Bujumbura City market, L.T attend son tour dans la file pour l’embarquement. « Je ne vois franchement pas l’importance du paiement de cette redevance. Les routes ne sont pas réhabilitées, les parkings de bus sont dans un état lamentable, … », se plaint ce chauffeur de bus qui parle aussi de documents nombreux à fournir.

Pour les bus de transport en commun, leurs propriétaires doivent payer une redevance de 24.000 BIF tous les trois mois pour le stationnement et une redevance de 100.000 BIF/an pour la construction et la réhabilitation des routes. Pour H.G, un autre chauffeur de bus, ces sommes devraient notamment servir à rénover les parkings de stationnement et à la mise en place de sanitaires autour des parkings pour les chauffeurs de bus.
« Où va cet argent ? »

De l’autre côté du parking, des taxis sont stationnés devant le Palais des Arts. Ici aussi, tout comme les chauffeurs de bus, les chauffeurs de taxis ne comprennent pas le bien-fondé de la redevance annuelle routière forfaitaire. Pour les chauffeurs de taxis, le paiement de cette redevance s’élève à 50.000 BIF/an auxquels il faut ajouter 20.000 BIF de frais de stationnement payables tous les trois mois. « Beaucoup de routes sont en mauvais état. Où va alors cet argent ? », s’interroge B.X, un chauffeur de taxi.

Plusieurs chauffeurs de taxis interrogés parlent « d’argent perdu », certains soupçonnant même un détournement de fonds tandis que d’autres dénoncent des routes souvent en très mauvais état. « S’il m’arrivait d’emprunter la route menant vers Mutakura (boulevard Ln Gnl Adolphe Nshimirimana) à quatre reprises, je sais à coup sûr que mon véhicule finira au garage ! », juge G.C, un chauffeur de taxi particulièrement remonté contre la redevance.

Les chauffeurs de taxis rencontrés demandent à ce que cette redevance annuelle routière forfaitaire soit utilisée pour ce dont elle a été instaurée, à savoir la construction et la réhabilitation des routes.

Contacté, le ministre en charge des Infrastructures a promis de réagir ultérieurement.

Charles Ntirampeba : « Beaucoup de routes sont en mauvais état »

Charles Ntahimpera : « Les organes habilités devraient apporter la lumière sur l’état d’avancement de la rénovation des routes ou la construction de nouvelles pour rassurer les contribuables ».

Le Secrétaire général de l’Association des Transporteurs du Burundi (ATRABU) se dit insatisfait par rapport à l’objectif assigné au paiement de la redevance annuelle routière forfaitaire. « Beaucoup de routes sont en mauvais état, soit parce qu’elles sont trop étroites ou soit parce qu’elles sont parsemées de nids-de-poule, que ce soit ici en mairie de Bujumbura ou à l’intérieur du pays ».

Interrogé sur le bouchage de certains nids-de-poule observé sur certaines routes, le dirigeant de l’ATRABU se dit sceptique. « C’est bien de voir ce bouchage de trous à certains endroits mais nous ignorons si ça entre dans le cadre des activités quotidiennes liées aux organismes qui le font ou si ça entre dans le cadre de la rénovation des routes engendrée en partie par le paiement de la redevance ».

Concernant le nouveau mode de paiement de la redevance liée au poids du véhicule et non à la puissance du moteur, Charles Ntirampeba estime que cela a engendré la hausse du montant de la redevance. Et tout en rappelant l’obligation de payer des taxes pour ‘’tout citoyen responsable’’, il demande à l’Etat à ce qu’il y ait la construction de nouvelles routes et que celles existantes soient rénovées. « Les organes habilités devraient apporter la lumière sur l’état d’avancement de la rénovation des routes ou la construction de nouvelles pour rassurer les contribuables ».

7 milliards de BIF récoltés

A l’occasion du lancement officiel des activités relatives à la célébration de la Journée du Contribuable, édition 2022, le Commissaire Général de l’OBR, Jean-Claude Manirakiza, a révélé que le montant collecté pour la redevance annuelle routière forfaitaire tourne autour de 7.000.000.000 BIF pour l’année 2021.

Concernant le calcul de la redevance routière qui se fait désormais en fonction du poids du véhicule et non de la puissance du moteur, Jean-Claude Manirakiza avance que ce changement est dû au fait que les effets sur la route de la part du véhicule sont liés à son poids et non à la puissance du moteur. Mais aussi, le président de l’Office burundais des Recettes fait savoir que l’ancien mode de calcul de la redevance ne permettait pas à l’OBR d’avoir accès à certaines indications vu que la plupart des véhicules sont fabriqués à l’étranger.

Forum des lecteurs d'Iwacu

5 réactions
  1. Coup de Geulle

    Payer des redevances pour des routes délabrées ou inexistantes?Quelle ironie!Ces percepteurs n’ont il pas honte?
    Le jour où nous auront des routes en bon état et entretenue nous paierons les redevances de façon même volontaire!

  2. IRAKOZE

    Bonjour Iwacu!
    Le lycee dont vous parlez se trouvant sur le blvd Adolphe je pense que c’est le Lycee Reine de la Paix, et pas le Lycee Ngagara qui,lui se trouve près de la Pafe.
    Merci

  3. Stan Siyomana

    1. Vous écrivez:« vu que la plupart des véhicules sont fabriqués à l’étranger… »
    2. Mon commentaire
    Alors, quelle est la petite part de véhicules FABRIQUES AU BURUNDI?
    Merci d’avance.

  4. Jereve

    On l’a bien dit: une infrastructure qui génère des revenus doit être capable de s’autofinancer quand il s’agit d’entretien et réfection. Cela se comprend qu’on prenne un crédit pour construire une route, mais c’est incompréhensible si on doit prendre un crédit pour l’entretenir ou simplement la laisser à l’abandon. Nous devons, avec les recettes des impôts et redevances, apprendre à constituer des fonds de rénovation pour ces infrastructures, et bien sûr s’il y a des reliquats les affecter dans d’autres secteurs. Je peux vous confirmer que dans le monde entier les détenteurs de véhicules se plaignent du poids de impôts, taxes et redevances, mais quand on roule sur une route bien aménagée et bien nettoyée (dans certains pays un véhicule citerne passe quotidiennement pour faire un balayage à grande eau), on se console que cela vaut la peine de payer. Mais dans notre pays, on se casse les reins sur les routes, avec la même question sur les lèvres: où va l’argent?

  5. Nyenurugo

    None amafaranga y’ama taxes yose aja hehe ko amabarabara atayahari? Aja mu mifuko yande? Ahubwo n’amakori yose twari dukwiye guhagarika kuyariha kuko nta nakimwe amariye abarundi muri rusangi.

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