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Culture

Maroc, Afrique : construire l’avenir par la culture

18/11/2021 Commentaires fermés sur Maroc, Afrique : construire l’avenir par la culture
Maroc, Afrique : construire l’avenir par la culture

Le Royaume du Maroc déploie toute sa diplomatie pour devenir une plaque tournante de l’activité culturelle, un trait d’union entre le monde arabe et l’Afrique noire. L’ACADÉMIE du Royaume du Maroc a reçu une cinquantaine d’intellectuels et d’écrivains africains et de la diaspora mercredi 17 novembre 2021 à Rabat. Parmi eux, une délégation de professeurs et d’auteurs du Burundi, Rwanda et RDC étaient les hôtes de l’Académie à l’occasion de la parution de plusieurs ouvrages de la collection Sembura (de la maison d’édition casablancaise La Croisée des Chemins).

La route, pardon, l’autoroute Casablanca-Rabat n’a rien à envier aux autoroutes occidentales. Bien faite, droite, elle traverse des villes de campagne avec des maisons modernes et éclairage public. Un paysage de carte postale. Parfois, de part et d’autre de l’autoroute, un âne qui traîne une charrette, un gamin qui court derrière un troupeau de moutons, quelques villages que l’on devine encore ruraux… Puis, sur l’autoroute, un péage. Encore une dizaine de kilomètres et Rabat la capitale du royaume s’offre aux visiteurs.

La Mausolée du Roi Hassan II à Rabat (crédit photo Antoine Kaburahe)

La ville efface tous les poncifs : elle est belle, verte, ordonnée, le climat est doux. De belles villas, souvent de couleur blanche, entourées de murs et de haies bien taillées fleuries. Une ville moderne. Le conducteur a mis en route le GPS. Premier arrêt proposé par nos hôtes, un passage incontournable : le Mausolée du Roi Hassan II. Ici la figure du roi est omniprésente. Sacrée. Une petite leçon d’histoire sur cette monarchie vieille de plusieurs centaines d’années. A l’entrée du mausolée, deux gardes, impassibles sur leurs chevaux, font le bonheur des touristes émerveillés. Nouveau départ. Destination : la Bibliothèque nationale.

Au royaume du « Kitab »

« Kitab », signifie livre en arabe. Les auteurs des Grands Lacs relèvent que ce mot existe chez eux. Juste un peu remanié. « Igitabo ». A la bibliothèque nationale, on découvre combien le Maroc a investi dans la culture. La bibliothèque est immense, moderne.

Les étudiants ont accès à plus de 750.000 livres à la Bibliothèque nationale et des millions de documents numériques en accès libre (crédit photo Antoine Kaburahe)

Un guide bien rodé explique, sous l’œil du directeur souriant. « Nous avons plus de 750 000 supports physiques , des millions de documents numériques, disponibles pour les étudiants et chercheurs. » Visite guidée: des salles immenses, des centaines d’étudiants, studieux. La bibliothèque abrite plusieurs services. Dans un bureau qui ressemble à une salle d’opération, des techniciens spécialisés nettoient et restaurent de vieux manuscrits, des documents rares, jaunis par le temps .

Une restauratrice répare un vieux manuscrit à la Bibliothèque nationale

Dans une autre salle, des imprimantes high-tech numérisent des documents fragiles. « Nous sommes très ouverts, disposés à accueillir étudiants et chercheurs d’Afrique. » Le maître-mot qui revient lors de toute cette visite est la « solidarité », « l’ouverture » envers les pays africains.

Académie royale du Maroc, une plaque tournante de l’activité culturelle

La prestigieuse institution a ouvert exceptionnellement ses portes, lors d’une cérémonie solennelle et en présence de son Secrétaire perpétuel, le professeur Abdeljalil Lahjomri.

L’Académie est un bijou architectural. Ici tout est luxe, calme et ordre pour paraphraser Baudelaire. « Le roi, que Dieu le garde, dispose d’un bureau ici », explique notre guide pour souligner encore la solennité des lieux. Autour du « Secrétaire perpétuel », 30 personnalités scientifiques de nationalité marocaine, associées à 30 autres personnalités scientifiques étrangères, composent l’Académie. Quelques noms célèbres : Senghor, Alex Haley, le Cardinal Gantin, Henry Kissinger, etc. Des dizaines de noms prestigieux. Le rôle assigné à l’Académie est clair : contribuer au progrès intellectuel, scientifique et culturel du Royaume.

La visite de l’Académie est suivie d’un déjeuner qui présente les richesses culinaires du royaume. Les Marocains sont au petit soin pour les invités . Des dizaines de plats, exquis. Le Professeur Juvenal Ngowenubusa, auteur et critique littéraire analyse et comprend cette opération de charme : « C’est clair, le Royaume du Maroc veut devenir une plaque tournante de l’activité culturelle, un trait d’union entre le monde arabe et l’Afrique noire, c’est très bien que tout ceci se passe dans le cadre de l’unité de l’Afrique. »

Lors de la grande rencontre avec le Secrétaire perpétuel de l’Académie, cette mission est encore explicite. L’Afrique doit être perçue comme « horizon de pensée ». Citant l’écrivain Henry Lopès, le Secrétaire perpétuel de l’Académie royale du Maroc va rappeler que « c’est la Culture qui crée une unité de conscience d’où sort une unité d’action. » Pour le Professeur Lahjomri, dans cette nouvelle vision le continent africain ne doit plus être un « continent de la division, de la séparation ».

Prenant pour prétexte un ouvrage collectif de plusieurs auteurs africains « Qu’est-ce que l’Afrique » , le Secrétaire perpétuel de l’Académie royale du Maroc va émettre le vœu de « voir germer d’une unité culturelle, une unité d’action ». Ce livre publié par une vingtaine d’auteurs et de chercheurs africains vivant un peu partout dans le monde est publié par une maison d’édition marocaine, La Croisée des Chemins , dans la nouvelle collection « Sembura, ferment littéraire ».

« Sembura », une incroyable aventure

Après le discours du Secrétaire perpétuel de l’Académie royale du Maja Schaub va rappeler les « racines » de ce projet né loin du Maroc, au Rwanda. C’est en février 2010 que trente femmes et hommes engagé(e)s pour la littérature du Burundi, de la RDC et du Rwanda se sont rencontrés à Kigali, pour lier des contacts et trouver une vision et des activités communes promouvant la littérature orale et écrite. Cette rencontre organisée au départ par l’association Sembura de Kigali a mené à la création de la plateforme « Sembura – ferment littéraire des Grands Lacs Africains ». Le nom « Sembura » dérive du verbe « gusembura » en Kinyarwanda qui signifie à la fois faire fermenter, inciter à l’engagement, provoquer.

L’ouvrage collectif d’une vingtaine d’auteurs africains paru dans la collection Sembura des Editions La croisée des chemins

Pour Maja, très émue, cette « ouverture à l’Afrique » d’une initiative née dans les Grands Lacs est un signe de vitalité. « Sembura a fermenté », « la graine plantée a germé et s’est disséminée » a encore dit la Bernoise . Pour elle et son amie Brigitta Züst, elle aussi originaire de Suisse et qui a soutenu le projet dès son lancement à ce jour, cette ouverture à l’Afrique ouvre de nouvelles perspectives . Ce que d’ailleurs rend si bien l’écrivain camerounais Eugène Ebodé avec son écriture colorée qu’on lui connaît : «  Les Africains devraient multiplier les pôles d’excellence culturelle, de la pointe du Cap à la baie d’Alger, de Dakar à Zanzibar, de Moroni à Kigali, de Tananarive à Fès, du pays dogon au Fouta-Djalon, d’Alexandrie à Lagos pour accélérer les échanges entre eux», a écrit l’auteur camerounais qui a coordonné le travail de ce collectif avec l’écrivaine Rabiaa Marhourch.
C’est donc une nouvelle vie qui commence pour « Sembura » dont la collection dirigée par Rabiaa Marhourch sera désormais éditée par La croisée des chemins , une maison d’un éditeur marocain très engagé, Abdelkader Retnani.

Les auteurs venus du Rwanda, Burundi et RDC, invités d’honneur de l’Académie royale du Maroc, observent avec espoir grandir cette graine née dans leur région.

C’est peut-être l’auteure burundaise Concilie Bigirimana qui traduit bien cette volonté de grandir dans l’ouvrage collectif. « Encore un pas ! Encore une empreinte ! Pourquoi pas un coup d’aile ? Peut-être plusieurs… » Et des Grands Lacs au Royaume du Maroc, elle a volé la graine Sembura. Parole de journaliste !

Le travail de Sembura en accès libre

Selon la Directrice de la collection Sembura, les anthologies 1, 2 et 3 sont désormais disponibles en accès libre sur le site internet de l’éditeur, La Croisée des Chemins.

Anthologie 1 : ÉMERGENCES, RENAÎTRE ENSEMBLE

ÉMERGENCES, RENAÎTRE ENSEMBLE. ANTHOLOGIE 1 PLATEFORME DES ÉCRIVAINS DES GRANDS LACS AFRICAINS

Anthologie 2 : http://lacroiseedeschemins.ma/produit/pour-une-culture-de-paix-dans-la-region-des-grands-lacs-africainsanthologie-2plateforme-des-ecrivains-des-grands-lacs-africains/

Anthologie 3 : http://lacroiseedeschemins.ma/produit/convergences-positiver-lautreanthologie-3plateforme-des-ecrivains-des-grands-lacs-africains/

* Lien direct pour lecture ebook

Anthologie 1 : https://online.fliphtml5.com/jcmku/twqp/#p=1
Anthologie 2 : https://online.fliphtml5.com/jcmku/tbtn/#p=1
Anthologie 3 : https://online.fliphtml5.com/jcmku/mpha/#p=1

Sur le site internet, en cliquant sur le bouton Ebook, on accède directement à la lecture.

Madame l’Ambassadeur Mbaranga Gasarabwe (la 2ème à partir de la gauche) avec la délégation rwandaise

Invitée par l’Académie royale du Maroc, l’Ambassadeur Clothilde Mbaranga Gasarabwe, qui a beaucoup travaillé dans le domaine du « peace keeping » en tant que Représentante spéciale adjointe pour la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) a participé à la rencontre. La diplomate a souligné l’importance de la culture dans la stabilisation des Etats. « Je suis Rwandaise et je peux dire que nous sommes allés creuser dans notre culture pour bâtir la paix et la réconciliation ». La diplomate a beaucoup insisté sur l’importance de sauvegarder et de développer nos langues et l’importance de la littérature. Pour madame Mbaranga Gasarabwe, « les écrivains sont importants parce qu’ils peuvent aller puiser dans les autres cultures. »

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