Oublions le récent savon public passé à un militant de la bonne gouvernance, devenu viral, et revenons à nos moutons : notre quotidien, celui des automobilistes et leurs interminables files d’attente devant les stations-service, organisées selon le dernier chiffre de la plaque d’immatriculation et les jours de la semaine qui lui correspondent.

Revenons surtout à ces confidences posthumes du patron de la station-service « Pont Mao », révélatrices d’un malaise profond. Bien avant la menace de « réquisition des stations faute de s’approvisionner pour servir le carburant désormais disponible », il avait pressenti quelque chose d’anormal et constaté un fait : « Nos stations ne nous appartiennent plus. Nous sommes littéralement dépossédés. En pratique, nos stations sont franchement la propriété de la Sopebu. C’est elle qui les gère quand il y a du carburant, c’est elle qui nous rationne, décidant unilatéralement de la quantité à donner à telle station selon des critères dont elle seule détient le secret ».
Quand les annonces officielles affirment que « le carburant est disponible » et qu’on accuse les propriétaires de stations de traîner les pieds pour s’approvisionner, confiait-il, « cela nous fait mal au cœur et c’est en même temps dérisoire ».
Prenons un exemple concret : « Je décide d’acheter 30 000 litres d’essence. Après les opérations bancaires, il faut se dépêcher pour aller montrer les bordereaux de versement à la Sopebu. Mais surprise ! On vous dit d’attendre. Une semaine passe, le carburant acheté n’est toujours pas là — c’est passable. Deux, trois semaines — c’est dans les limites du tolérable. Mais un mois voire deux? Cela dépasse l’entendement ».
Et quand la Sopebu vous appelle enfin pour venir prendre votre carburant acheté, il y a plusieurs semaines, poursuivait-il, nouvelle surprise : « On ne vous donne que 10 000 litres, voire moins. Quand vous brandissez le bordereau de versement pour rappeler la quantité achetée, on vous rétorque qu’il faudra revenir chercher le reste dans… disons trois semaines. À la date indiquée, il n’y a rien. On vous dit d’attendre. Nous aussi, nous faisons la queue pour avoir notre dû ».
Pardon ? « Vous m’avez bien entendu : on attend. Et au bout de quelques longues semaines, vous avez enfin la totalité de votre commande. »
Mais ce n’est pas tout. Quand le carburant est enfin versé dans les cuves, sous l’œil vigilant d’un agent de la Sopebu, révélait-il, « c’est ce dernier qui remplace presque mon pompiste. C’est lui qui fait la loi et qui décide de la quantité à donner à chaque véhicule. Même moi, je dois négocier pour avoir le plein dans mon véhicule et celui d’un proche. C’est tout ».
La logique commande d’en tirer quelques conclusions. Le vieux patron de la station « Pont Mao » avait la sienne, instructive : « Quand on nous dit que le carburant coule à flots, qu’il y aura un répit pour les automobilistes, il y a lieu de se poser des questions. Peut-être qu’il coule quelque part, partout même… sauf dans nos stations ».





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