Pour certains politiques et experts, la réalisation des projets qui ne répondent pas aux préoccupations de la population provoque des frustrations. Ils invitent les décideurs à se ressaisir pour éviter les violences
Selon le socio-anthropologue Tharcisse Bimenyimana, quand la population n’est pas consultée et que les projets ne répondent pas à ses préoccupations, cela devient dangereux. Il fait savoir que cette situation engendre des frustrations et de la méfiance entre les décideurs et les citoyens. « Si un projet n’émane pas de la population, les autorités passent par la force. Cela provoque des mésententes, de la méfiance et de la haine. »
M. Bimenyimana donne un exemple d’un bon projet mais non bien étudié qui a provoqué de la violence. Il s’agit de la mise en place des écoles de formation des instituteurs (EFI) dans les années 1980 avec une année de formation après la 10e année ou le Tronc commun.
« On prenait les cinq premiers. Ces derniers ne pouvaient pas aller à l’université. Après, les Hutu se sont plaints qu’ils sont les seuls concernés. Les Tutsi eux, avaient des astuces pour contourner cela et s’inscrire dans des sections de leur choix. Le projet qui visait à trouver des enseignants qualifiés est devenue un instrument de division et de discrimination ».
Pour Kefa Nibizi, président du parti Codebu, ne pas prioriser les besoins de la population ne fait qu’attiser les conflits. Il parle des frustrations de la population qui se sent abandonnée. Il considère que cela peut créer de la méfiance entre la population et l’administration. Dans ce cas, le développement du pays n’est pas possible. « Ces projets réalisés alors qu’ils ne répondent pas aux préoccupations de la population sont combattus. Il peut y avoir des révoltes ou des manifestations. Cette situation peut dégénérer en violences et des gens partent en exil. »
Il ajoute que toute violence physique commence par la violence verbale. Avant de passer à l’acte, dit-il, il y a la prolifération des messages violents et haineux. Ce qui l’inquiète le plus, c’est la formation de deux groupes antagonistes constitués d’un côté par ceux qui soutiennent les autorités et de l’autre, le reste de la population. « Des échauffourées peuvent éclater. »
Respecter la population
Abdoul Kassim, président de l’UPD Zigamibanga fait la même lecture. Il parle de la haine qui surgit entre groupes. Cette haine peut atteindre les nouvelles générations.
Une autre chose à craindre est que la population insatisfaite peut rester muette. Mais ce silence, dit-il, est très dangereux quand la population est dans des difficultés. « Elle garde des traumatismes. En 1993, le président Melchior Ndadaye a été tué. Des Burundais qui s’étaient résignés lors des autres crises se sont entretués car certains disaient craindre de subir le même sort. La colère a explosé. »
Pour éviter des violences, tous ces intervenants appellent les décideurs à associer la population dans des projets qui les concernent.
Abdoul Kassim indique qu’en démocratie, tous les projets doivent être discutés afin de choisir ceux qui sont prioritaires. Il insiste qu’à chaque fois, c’est la volonté du peuple qui doit être exécutée. « Tout projet doit répondre aux préoccupations quotidiennes de la population. »
De son côté, Kefa Nibizi considère qu’il faut éviter d’accéder au pouvoir ou à des fonctions sans être élu par le peuple. Il fait savoir que les projets sont votés par la population lors des élections. « Même après le vote, il faut revenir consulter la population afin de se convenir sur les modalités de mise en œuvre. »
Pour sa part, Tharcisse Bimenyimana suggère l’éducation à la démocratie pour que les gens soient convaincus que celle-ci ne se limite pas aux élections. « Le citoyen délègue le pouvoir à ses représentants pour lui servir. La politique n’est pas une ruse, c’est l’art d’organiser le pays. Il faut avoir un objectif et une vision clairs. Tout projet doit être étudié afin que les résultats servent beaucoup de gens. »









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