Dénigrer les membres d’un groupe social donné peut attiser la haine. Certains habitants de la colline Gasare, commune Matongo de la province de Butanyerera prônent un langage rassembleur.
À l’ère du numérique, le dénigrement et la globalisation se propagent vite en ligne, souvent sous forme de discours haineux ou de rumeurs. Quand le dénigrement est senti comme une attaque identitaire, il peut alimenter des frustrations profondes qui, en l’absence de dialogue et de justice, se transforment en violences collectives.
Une quinquagénaire, habitante de la colline Gasare, fait savoir que dans le passé, le dénigrement traduisait une haine ethnique. « Les Hutu étaient sous-estimés par leurs compatriotes tutsi. Considérés comme esclaves, sans valeur ne méritant ni respect ni considération, ils prenaient à leur tour les Tutsi pour des paresseux et des criminels. »
Suzanne Ndayirorere fait la même lecture. Elle indique que le dénigrement et la globalisation sont souvent utilisés pour marginaliser les membres de la communauté Batwa. « Tout Mutwa était marginalisé et écarté. Même dans la rivière, les Batwa devraient puiser de l’eau pendant la nuit pour ne pas croiser les autres. »
Ces habitants considèrent que le dénigrement d’un groupe, dans les médias, dans les discours politiques ou au sein des communautés, crée un climat de stigmatisation. « Ce rejet public humilie, insulte et radicalise. Il pousse certains à répondre par la violence pour défendre leur dignité. »
Renforcer le respect mutuel
Selon Pierre Bucumi, chef de la colline Gasare, le dénigrement et la globalisation ont été et restent monnaie courante. « Des gens dénigrent les autres en les considérant comme des incapables, des sans valeur qui ne méritent pas respect ni considération. »
Il indique que les auteurs visent à écarter les autres pour des intérêts personnels ou de groupes. Il fait savoir que dans des réunions, les autorités insistent sur le respect mutuel et le développement intégral. « Personne ne doit être dénigré ou dévalorisé sur base de son statut ou de son appartenance politique ou ethnique. »
Selon Acher Niyonizigiye, expert en leadership et enseignant d’université, il y a plusieurs types de messages de dénigrement et globalisants. « Certains groupes de gens sont jugés stupides, pas intelligents, pas capables, de meurtriers ou de criminels. Les auteurs le font sans preuves et en globalisant. »
Il fait constater que ces messages sont monnaie courante lors des périodes de fortes mobilisations politiques comme les élections. Cela se remarque aussi lors des situations difficiles ou quand il y a des problèmes de société. Les auteurs veulent que les gens restent attachés à eux. « Ils font cela d’une façon subtile. C’est une façon de dire : nous sommes les bonnes personnes. Soutenez-nous ! »
Il considère que les auteurs visent la manipulation de l’opinion. Ils sont conscients que tous les membres d’un groupe ne sont pas mauvais, incapables ou criminels. « Ils sont guidés par des intérêts personnels »
M. Niyonizigiye explique que les conséquences de ce langage sont graves. Les messages de haine enveniment les relations sociales et sapent tout effort de réconciliation et d’unité. « Cela peut conduire à un climat de méfiance et de haine dans la société. »
Il précise que les violences de masse ne sont jamais spontanées. « Il suffit d’un événement déclencheur pour que les gens se rentrent dedans et s’entretuent. » Il appelle tout un chacun à un langage responsable pour ne pas heurter la sensibilité des gens.