Mardi 23 décembre 2025

Société

Burunga : Un avenir scolaire menacé

Burunga : Un avenir scolaire menacé
À l’Ecofo Mugeranama 2, certaines classes n’ont ni fenêtres ni portes.

La province de Burunga fait face à de multiples défis qui fragilisent le système éducatif. Les abandons scolaires, les départs d’élèves vers l’étranger et les grossesses précoces. À cela s’ajoutent Autant de difficultés qui menacent l’avenir scolaire comme le départ de 305 enseignants, la dégradation des infrastructures et le manque de matériel, dont 73 981 bancs-pupitres, affectent gravement l’apprentissage

Alors que le premier trimestre touche à sa fin, la province de Burunga est confrontée à une hausse préoccupante d’abandons scolaires, liés à la pauvreté, à la démotivation et au manque de perspectives d’avenir. Plusieurs enfants quittent l’école pour travailler, notamment en Tanzanie.

Un enfant de 13 ans rencontré à Nyanzalac témoigne : « J’ai abandonné l’école car je n’arrivais pas à trouver le matériel scolaire. » Un autre garçon de 12 ans explique : « Parmi nous douze, il n’y a que le cadet qui étudie en première année, les autres ont abandonné et certains sont partis travailler à l’étranger. » Une jeune fille sans emploi depuis cinq ans et rencontrée dans une école de Mugerama à Nyanzalac, explique : « Les enfants abandonnent l’école à cause de mauvaises conditions de vie. »

Selon Élias Ndikumana, directeur provincial de l’éducation à Burunga, le nombre exact d’abandons scolaires n’est pas encore centralisé. « Nous attendons encore les rapports du premier trimestre, mais dans certaines écoles, on nous signale quinze abandons ici, dix ailleurs », explique-t-il.

À Makamba, huit élèves ont abandonné le lycée Saint-Pierre Claver en trois mois. Trois cas sont recensés à la COMIBU et trois à Mabanda. La pauvreté demeure la principale cause : certains parents n’ont pas de quoi nourrir leurs enfants, et d’autres se découragent face au manque d’emploi pour les diplômés.

« La plupart reviennent les mains vides. »

Des enfants quittent les classes pour aller chercher du travail à l’étranger, principalement en Tanzanie. « Dans cette province, beaucoup d’enfants abandonnent l’école, surtout dans la plaine de l’Imbo et à Kumoso. Ils traversent la frontière vers la Tanzanie, tandis que d’autres restent ici pour faire du petit commerce ambulant. Nous essayons de trouver des moyens pour réduire ce nombre », indique encore le directeur provincial de l’Éducation.

Elias Ndikumana « Dans cette province, beaucoup d’enfants abandonnent l’école, »

La plupart de ces enfants sont encore mineurs et ils viennent de plusieurs provinces. Une fois à l’étranger, ils se retrouvent souvent dans des conditions précaires, loin des rêves qui les avaient poussés à partir. Dieudonné Manama, coordinateur de l’organisation FVS–Amis des Enfants dans l’ancienne province de Makamba, témoigne : « Beaucoup de mineurs partent en Tanzanie pour chercher de l’argent, mais la plupart reviennent les mains vides. »

Là-bas, ces enfants travaillent principalement dans les champs ou comme gardiens de troupeaux. « Beaucoup ne sont même pas payés », poursuit-il. Selon lui, plus d’une centaine d’enfants ont déjà été refoulés ou emprisonnés avant d’être rapatriés cette année à la frontière de Mabanda.

Bukeyeneza Éric, coordinateur de la FENADEB, une ONG de défense des droits de l’enfant, ajoute que « les autorités tanzaniennes interceptent régulièrement des mineurs burundais et les ramènent à la frontière ». Ces enfants, âgés de 14 à 15 ans, sont souvent orphelins ou issus de familles éclatées. « Ils nous disent avoir quitté l’école à cause de la pauvreté ou du divorce de leurs parents. Certains ont à peine 11 ans et travaillent déjà dans des ménages au Burundi, pour des salaires dérisoires », regrette-t-il.

Pour Dieudonné Manama, la solution passe par une responsabilité collective. « L’administration, les Églises et les parents doivent travailler ensemble pour arrêter ce fléau », lance-t-il avec insistance.

Le problème ne concerne pas seulement les élèves. Les enseignants, eux aussi, quittent leurs postes. Dans toute la province, 305 enseignants ont déjà abandonné l’enseignement. « Certains sont décédés, d’autres sont partis à la retraite ou ont changé de fonction, et plusieurs ont quitté le pays pour chercher du travail à l’étranger », explique le directeur provincial de l’éducation. Faute de personnel, de nombreuses écoles font appel à des enseignants vacataires pour combler les vides.

Ni fenêtres ni portes

Les infrastructures scolaires à Burunga sont fortement dégradées. À l’Ecofo Mugerama 2, certaines classes n’ont ni fenêtres ni portes, et l’absence de clôtures favorise l’insécurité. À Saint-Pierre-Claver, les murs fissurés témoignent du manque d’entretien. Le matériel scolaire fait également défaut : un banc-pupitre est souvent partagé par trois à cinq élèves, parfois davantage. À l’Ecofo Mugeramana 2, certains enfants sont cinq par banc lors des examens. « On utilise parfois la force pour avoir une place », confie un élève. La province a besoin de 73 981 bancs-pupitres, et des efforts sont en cours pour y remédier selon Elias Ndikumana, le DPE Burunga.

Le manque de livres demeure préoccupant : dans certaines écoles, un manuel est partagé entre trois élèves, tandis que dans d’autres, dix élèves se partagent un seul exemplaire. Certaines écoles enseignent les TIC sans disposer d’outils informatiques. « On leur apprend les souris et ils pensent que c’est un animal », témoigne le directeur provincial de l’éducation.
« Nous travaillons avec les parents pour équiper progressivement les écoles. Nous envisageons même d’acheter un ordinateur par établissement pour familiariser les élèves à l’informatique. »

Malgré les efforts engagés, les inégalités entre écoles persistent. Certaines écoles, comme l’ETS Kiryama, sont mieux équipées, tandis que d’autres manquent de tout. « Nous essayons de récupérer des machines hors d’usage pour que les enseignants puissent au moins montrer aux élèves à quoi elles servent », ajoute Élias Ndikumana.

À ces difficultés s’ajoutent les grossesses non désirées, jugées « très alarmantes », et l’interdiction des cérémonies de remise de diplômes pour les écoles en dessous de 15 % de toux de réussite, une mesure qui divise parents, élèves et responsables scolaires.

Certains directeurs saluent la mesure, mais plusieurs parents et élèves la jugent injuste. Selon eux, elle prive les familles du droit de célébrer la fin des études secondaires après tant d’années de sacrifices.

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