Mardi 24 juin 2025

Société

Quid des droits de l’enfant au Burundi ?

24/06/2025 0
Quid des droits de l’enfant au Burundi ?
Le nombre d’enfants en situation de rue ne cesse d’augmenter

Le 16 juin de chaque année, c’est la célébration de la Journée de l’enfant africain. Au Burundi, cette journée suscite beaucoup de débats au moment où les enfants en situation de rue dans les centres urbains ne cessent d’augmenter. C’est une situation alarmante qui semble échapper à l’administration et les mesures prises ne produisent pas les effets escomptés.

Dans la capitale économique, plusieurs enfants en situation de rue passent des journées et des nuits à errer partout. Au centre-ville, leur nombre ne cesse d’augmenter au grand désarroi des habitants. Certains passent de voiture en voiture en tendant leurs petites mains aux vitrines. D’autres se postent devant les magasins et tendent les mains aux clients. Certains clients les ignorent, d’autres leur donnent de l’argent qui reste des courses avec un air gêné.

Une femme qui sort d’un magasin semble hors d’elle parce que deux enfants la poursuivent, une main sur le ventre, une autre devant la femme en suppliant. « Nous avons faim madame, aide-nous. Ça fait des jours que nous n’avons pas mangé. »

La femme leur crie de dégager son chemin et semble pressée de partir vers sa voiture. Les deux enfants l’accompagnent presque en pleurant et restent debout près de la vitrine de la voiture. La femme, furieuse, démarre en trombe en secouant la tête.

Un des passants s’interroge sur l’avenir de ces enfants qui ne vivent que de la mendicité. « Leur avenir nous réserve des surprises. S’ils ne deviennent pas des bandits de grand chemin, ils deviendront autre chose que je ne peux pas imaginer », lance-t-il.

L’incarcération des enfants, une triste réalité

Les enfants en situation de rue, malgré leur jeune âge, se retrouvent dans des cachots. Les enfants rencontrés dans le parking du restaurant-café « le café gourmand » témoignent que certains d’entre eux sont gardés dans les cachots du Bureau spécial des renseignements (BSR).

« Souvent, la police débarque et nous prend pour nous enfermer au BSR. Moi, par exemple, j’ai été à maintes reprises gardé là-bas et ce sont des bienfaiteurs qui m’ont fait sortir. La vie y est très difficile pour les enfants parce qu’ils mangent deux fois la semaine », raconte l’un d’eux.

Il fait savoir que les enfants qui sont gardés sont nourris par un Blanc. Les autres détenus mangent tous les jours parce qu’ils ont des familles qui leur apportent de la nourriture. Eux ils attendent leurs procès contrairement à ces enfants en confli avec la loi.

Hamady Ba, représentant adjoint ad intérim de l’Unicef au Burundi, lors de la célébration de la Journée de l’enfant africain, édition 2025, dans son allocution à partir de la province de Ngozi ne nie pas qu’il y’a violation des droits de l’enfant au Burundi. « Nombreux sont les enfants qui ne peuvent pas aller à l’école, se faire soigner, grandir convenablement, jouer ou évoluer dans un environnement de protection dont ils ont besoin. Plus d’un enfant sur deux (55,3%) vit dans des ménages sous le seuil de la pauvreté monétaire fixé à 1 580 FBu par jour »,
Il ajoute que plus de six enfants sur dix (64%) sont privés d’au moins trois dimensions principalement, à savoir la nutrition, l’assainissement et la protection des enfants.

Les efforts fournis ne produisent pas d’effets apparents

Le jour de la célébration de cette journée, le ministère ayant la solidarité nationale dans ses attributions a reconnu que malgré les efforts que le gouvernement fournis, un grand nombre d’enfants en situation de rue s’observe dans plusieurs localités du pays.

Selon la ministre, les moyens pour éradiquer ce fléau restent très minimes. Elle interpelle alors le gouvernement, les organisations tant nationales qu’internationales qui œuvrent dans la protection des droits de l’enfant, à conjuguer les efforts pour parvenir à assurer le meilleur de l’enfant.

Quant à la coalition Education pour tous, EPT Bafashebige, pour mieux garantir les droits de l’enfant, il faut des engagements concrets et durables.

Elle lance un appel au gouvernement et à ses partenaires de faire des droits des enfants une priorité nationale non seulement en parole mais aussi dans les actes en votant des budgétaires conséquents.

Des activités importantes ont été menées

L’Association communautaire pour la promotion et la protection des droits de l’Homme, ACPDH, fait savoir que cette année, la journée a été célébrée au Burundi au moment où on observe beaucoup d’enfants en situation de rue, des enfants victimes de la traite des personnes et des violences basées sur le genre (VBG) sans oublier les cas d’abandons scolaires qui s’observent dans toutes les provinces du pays.

Fulgence Manirahinyuza : « On devrait s’attaquer en amont et en aval aux causes profondes de la situation des enfants en situation de rue. »

Pour Fulgence Manirahinyuza, directeur exécutif de cette association, en comparaison avec 2008 où les enfants de moins de 15 ans étaient estimés à 45% de la population burundaise, en 2025 les enfants de cette tranche d’âge sont estimés, sans précision, à 44 %.

« La fertilité de la femme burundaise est élevée. Par exemple, on dit qu’en 2021 le taux de fécondité était de 4,5 enfants par femme et que ce chiffre peut varier en fonction de différents facteurs sociaux tels que l’éducation, l’accès aux soins de santé sans oublier les pratiques culturelles et religieuses », fait-il savoir.

Pour garantir les droits de l’enfant, Fulgence Manirahinyuza fait savoir que des actions importantes ont été menées par le gouvernement du Burundi et de ses partenaires notamment l’élaboration de la Politique nationale de protection de l’enfant qui vise à assurer un environnement protecteur pour tous les enfants en mettant un accent sur la prévention de la violence, des abus et d’exploitation. « A ceci s’ajoutent le Plan d’actions de lutte contre la traite des personnes et la stratégie nationale du Burundi pour les enfants en situation de rue validée en 2021 afin d’assurer leur réinsertion dans la société avec un accent particulier sur la prévention du phénomène ainsi que la mise en place des mécanismes de réintégration. »

Pour ce qui est de la scolarisation, M. Manirahinyuza souligne que le taux de scolarisation des enfants était estimé à 90% dans les écoles fondamentales en 2023. Le taux d’abandons scolaires était estimé entre 10 et 15 %. « Les facteurs comme la pauvreté, le manque d’infrastructures, certaines obligations familiales et les violences sexuelles et basées sur le genre sont cités parmi les causes profondes des cas d’abandons scolaires. »

Quid de la situation de la protection de l’enfance ?

Le directeur exécutif de l’ACPDH évalue la situation de la protection de l’enfance en tenant compte de certains axes tel que le cadre législatif. Il estime que de bonnes lois existent pour protéger les enfants. Mais, il trouve que leur mise en œuvre reste souvent insuffisante. « Les enfants burundais sont exposés à plusieurs formes de violations, y compris les violences domestiques, les abus sexuels, le travail des enfants et la traite des personnes. »

Pour ce qui est de la santé et de la nutrition il dit que malgré la gratuité des soins de santé pour les enfants de moins de 5 ans, les services de santé pour les enfants sont limités et que la malnutrition affecte le développement des enfants.

Il déplore l’existence de structures communautaires dédiées à la protection de l’enfance, comme les services sociaux, mais qui manquent souvent de ressources et de formation. « Il existe également des initiatives locales et des ONG qui travaillent dans la sensibilisation et dans la protection des droits de l’enfant. Mais, leur portée est limitée. »

La collaboration entre le gouvernement, les ONG nationales et les organismes internationaux est très nécessaire pour renforcer les efforts de protection, selon lui.

Quant à la protection, il trouve que la Stratégie nationale pour les enfants en situation de rue met un accent sur la création d’un environnement protecteur pour les enfants en luttant contre les abus, l’exploitation et la violence.

Il ajoute que la sensibilisation du public sur les droits des enfants et les actions mises en place pour les protéger est également cruciale.

Il déplore néanmoins qu’il n’est pas facile de mettre en œuvre cette stratégie si on n’a pas fait une évaluation complète de cette dernière. Cependant, il fait savoir que pas mal de choses ont été réalisées par le gouvernement, les organismes internationaux sans oublier les organisations de la société civile burundaise. « Je ne manquerais pas de souligner l’insuffisance des ressources financières chez ces différents acteurs qui handicape la mise en œuvre effective de la stratégie et de la politique nationale de protection de l’enfant au Burundi. »

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