Chapeau — Eriger le « journalisme de solutions » en dogme revient, hélas, à confondre méthode éditoriale et instrument de contrôle. Les solutions authentiques ne naissent que d’un diagnostic honnête.
Le Conseil national de la communication, chargé entre autres de réguler les médias, entend faire du « journalisme de solutions » son cheval de bataille. Cette approche, présentée comme la panacée à toutes les crises et pénuries, est désormais exigée à toutes les sauces. À défaut, les médias récalcitrants — perçus comme incrédules, voire insoumis — savent à quelle sauce ils risquent d’être mangés.
Venons-en aux faits, puisqu’il faut des faits et rien que des faits. Profitant d’une conjoncture marquée par des pénuries de carburant, plusieurs médias parmi les plus suivis ont décidé d’unir leurs voix pour ausculter, de manière structurée, l’impact de ces ruptures sur la vie du pays : télécommunications, médias, hôpitaux, commerce, tourisme, pouvoir d’achat… L’ambition était claire : comprendre et faire comprendre.
La démarche envisagée était classique et rigoureuse : déterminer les quantités nécessaires pour satisfaire la demande nationale ; confronter les promesses officielles à la réalité du terrain ; solliciter des experts pour éclairer les causes profondes de ces pénuries récurrentes ; interroger, enfin, l’option — souvent évoquée — d’un acheminement par le lac, réputé moins coûteux. Bref, documenter, vérifier, analyser.
Or, selon toutes les écoles sérieuses, le « journalisme de solutions » commence par là : expliquer le problème et ses causes, puis décrire les pistes de résolution et leurs limites, avec le recul critique qui s’impose. Rien à voir avec un vernis positif plaqué sur des difficultés bien réelles.
Dans ce dossier, avorté dans l’œuf, ce schéma était précisément celui retenu par les rédactions partenaires. Le CNC ne l’a pas entendu de cette oreille et a opposé un nouveau refus — après un précédent — au motif que le traitement proposé « n’apporterait rien de nouveau ». Une posture pour le moins préoccupante.
Faire du « journalisme de solutions », ce n’est ni taire ni maquiller les problèmes. C’est d’abord les regarder froidement, sans passion ni parti pris, pour mieux éclairer les voies de sortie. Exiger des informations uniquement « positives » est le début d’une pente glissante vers l’arbitraire.
Oui au journalisme d’impact, nourri par l’enquête, la contradiction et la transparence. Non à l’amnésie organisée et à l’évitement des sujets qui fâchent. À défaut, ce n’est pas du « journalisme de solutions », c’est la promotion d’un journalisme du déni.
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