Lundi 18 août 2025

Politique

Chronique sur les messages de haine/Mugina : La justice populaire, un vecteur de violences à combattre

18/08/2025 0
Chronique sur les messages de haine/Mugina : La justice populaire, un vecteur de violences à combattre
Pour la population de Mukoma, la justice populaire et le résultat de l’impunité

Certains habitants de la colline Mukoma zone Mabayi commune Mugina de la province de Bujumbura ont des avis partagés sur la justice populaire. Pour les juristes c’est un crime qui peut créer un cercle vicieux de violences.

Un habitant de la colline Mukoma soutient la justice populaire. Il indique que des bandits lui ont tout pris. « Si je surprenais un voleur, je le battrais très sérieusement et sans pitié. Je dirais ‘’battez et tuez ce lâche !’’ Un malfaiteur doit mourir sans une autre forme de procès. »

De son côté, Gaspard Minani indique que se faire justice est une violation de la loi. Il s’oppose à tout crime de masse. « Des gens ont tué mon grand frère. Je pouvais organiser la vengeance mais c’est un crime. Si je n’étais pas chrétien, respectueux des lois et ne savais que la justice populaire est un crime, on aurait causé des dégâts. »

Pour un quinquagénaire, la population pense que la justice ne fait pas son travail. Raison pour laquelle elle se fait justice. Cela fait que des gens sont victimes par simple suspicion, sans être responsables des crimes leur imputés. Il parle d’une personne accusée de vol dans un site d’exploitation de l’or battue jusqu’à ce que ses bras soient paralysés.

Pour cet homme, la justice populaire a des conséquences néfastes. Il souligne que si un individu est victime de la justice populaire, cela crée un cycle de vengeance. « La victime a des proches. Ceux-ci peuvent organiser un règlement de compte. La violence s’enracine alors dans la communauté. »

De son côté, Emelyne Ndayisenga, la justice populaire occasionne des erreurs irréversibles et alimente un cycle de violences. « Des innocents peuvent être tués, lynchés ou blessés par erreur sans possibilité de réparation. La justice populaire encourage la vengeance, l’impunité et l’anarchie. Cela peut créer des conflits communautaires ou familiaux durables.»

Un crime puni par la loi

D’après Adrien Ntaconzoba, chef de la colline Mukoma, la population recourt à la justice populaire quand elle est emportée par la colère. « Des gens sont arrêtés et battus par la foule alors qu’ils ne sont pas coupables. D’autres sont des bandits récidivistes qui ne sont pas tolérés. »

Il précise que l’administration ne peut pas permettre qu’un individu soit lynché sans que des enquêtes ne soient faites. « Même s’ils sont appréhendés en fragrant-délit, il faut les traduire en justice. Nous tenons des réunions avec la population pour la sensibiliser sur le respect des procédures judiciaires en cas de délit. »

Selon le juriste Fernand Dior Remesho, la justice populaire se base sur des accusations sans preuve, souvent sur des rumeurs ou des émotions. Elle bafoue les droits à la défense, à un procès équitable et à la présomption d’innocence. « Elle s’accompagne de la violation des droits humains et de l’atteinte à la vie. »
Pour ce juriste, la justice populaire naît là où l’État de droit est affaibli, où les citoyens se sentent livrés à eux-mêmes et où l’émotion prend le dessus sur la loi. « En cas d’impunité, de lenteur des procédures, de manque de confiance en la justice, la population voudra une justice immédiate. »

Il fait savoir que la justice populaire a des conséquences sur la société. « Cette situation engendre la méfiance et la haine dans la communauté. Elle peut entraîner un cercle vicieux de violences. »
Il considère que la solution passe par le renforcement de la justice officielle, l’éducation citoyenne et la lutte contre l’impunité. « Si la justice traite des dossiers dans les meilleurs délais et combat l’impunité, les gens n’auront plus à chercher à se faire justice. »

Il invite alors les leaders religieux, les organisations de la société civile et les médias à s’investir. « La justice populaire est un crime puni par le code pénal. », rappelle-t-il.

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