Jeudi 28 mars 2024

Société

Buyengero : Effets pervers du retard de paiement de l’Etat

07/03/2019 Commentaires fermés sur Buyengero : Effets pervers du retard de paiement de l’Etat
Buyengero : Effets pervers du retard de paiement de l’Etat
Spès Caritas Njebarikanuye «Le ministère de l’Intérieur a confié la gestion de plus de 65 milliards à ‘‘5 personnes uniquement’’ qui ne sont même pas très compétentes en matière de marchés publics.»

L’Etat ne paie pas les entrepreneurs ayant fourni des biens et services en commune Buyengero. Ces derniers en souffrent. Ils ne peuvent ni payer les employés ni rembourser les crédits.

Incompréhension totale des trois entreprises qui ont gagné les marchés d’exécution des projets de développement de la commune Buyengero. Elles ne savent à quel saint se vouer.

Japhet Niyongabo, directeur du Rumonge Company Business (RUCOBU) rénovant le marché moderne de Kabumburi à plus 327 millions BIF se lamente du long retard dans le paiement « Les factures de décembre 2018 ne sont pas encore payées.»

Pourtant, les clauses du contrat sont claires. Les factures ne doivent pas dépasser 15 jours pour être réglées. D’après lui, ce retard perturbe les travaux et la trésorerie de son entreprise. Il puise dans ses propres ressources pour poursuivre les travaux. Il est parfois obligé de les’ interrompre à cause du manque de moyens pour acheter les matériaux de construction. Il arrive que son entreprise soit obligée de contracter des crédits à gauche à droite pour payer les employés.

L’entrepreneur affirme que l’affectation des services chargés de la gestion de budgets des communes au ministère de l’Intérieur y est pour quelque chose. Lorsque le Fonic (Fonds national d’investissement communal) était aux affaires, soutient Japhet Niyongabo, les factures ne dépassaient pas deux semaines sans être payées.

Cet entrepreneur rappelle que le code de marché public est clair. Quand l’Etat ne règle pas les factures endéans 15 jours, il doit payer des pénalités.

Eliphase Ndayirata, directeur de l’IDECO, exécutant le projet de construction du centre d’enseignement des métiers de Rubuye, déplore que sur les 7, 8 millions BIF prévus, il n’a perçu une avance qu’au début de février 2019. 

Il confie que ce retard de paiement pénalise son entreprise : « Nous avons contracté des prêts dans les banques. Nous n’avons remboursé aucun sou.»

Pour le moment, enchaîne cet entrepreneur,  nous avons déjà commencé à payer la pénalité. En plus, son entreprise ne peut pas soumissionner pour d’autres marchés pour deux raisons : elle n’a pas de moyens financiers et n’est plus crédible aux yeux de ses créanciers.

Ndikumana Agathon est dans le désarroi. Il réclame 38 millions pour avoir fourni les intrants agricoles et d’élevages aux associations de cette commune.

Pour exécuter ce marché, dit-il, j’ai contacté un prêt à la Bancobu. Le délai de remboursement vient de toucher à sa fin. Désormais, il est coincé. Il ne peut rien entreprendre.  Tout son argent est dans les créances de l’Etat.  Face à cette situation, cet entrepreneur fait savoir qu’il n’a pas croisé les bras. Il a demandé la prorogation des délais de remboursement du prêt. Plus le temps ne passe sans pour autant être payé, il risque des pénalités de retard.

Les élus du peuple s’inquiètent

Cette question a été soulevée par les élus du peuple ce jeudi 21 février, au palais des congres de Kigobe. C’était lors d’une séance de présentation et d’évaluation du rapport semestriel de mise en œuvre des activités de 10 ministères relevant de la 1ere vice-présidence de la République.

Les élus du peuple ont montré les zones d’ombres dans la gestion des 65 milliards destinés à soutenir les communes dans les projets de développement.

Spès Caritas Njebarikanuye, 1ère vice-présidente du Sénat n’est pas passé par quatre chemins. Elle s’interroge sur le sort du Fonic : « Dans ce rapport, les réalisations du fonds national d’investissement communal n’apparaissent nulle part.  Où est passé ce fond ? A-t-il été supprimé ?»
Cette sénatrice témoigne que les entreprises qui ont gagné les marchés se lamentent du long retard des paiements. Ces dernières évoquent qu’elles ne savaient pas où toquer pour être payé. Le ministre de l’Intérieur et le Fonic se renvoient la balle.

Cet élu du peuple affirme qu’à l’époque où le Fonic gérait cette subvention, les entreprises exécutantes ne se plaignaient pas. Et de marteler que ce Fonds « assurait convenablement la gestion des 500 millions de subvention du gouvernement à chaque commune. »

« Le Fonic compte de nombreux experts, malheureusement ils ne sont pas exploités », déplore Spès Caritas Njebarikanuye. C’est un manque à gagner pour notre pays, poursuit-elle, car même si ces experts ne travaillent pas, ils perçoivent leurs salaires.

Mme Njebarikanuye relève également du flou sur la gestion actuelle d’une enveloppe de 65 milliards. Elle dénonce que les marchés sont mal attribués : «Le ministère de l’Intérieur a confié la gestion de plus de 65 milliards à ‘‘5 personnes uniquement’’ qui ne sont même pas très compétentes en matière de marchés publics.»

Cette sénatrice demande l’intervention du premier vice-président Gaston Sindimwo pour assurer la transparence dans la gestion de cette subvention. Car, s’explique-t-elle, c’est anormal. 65 milliards dans les mains de 5 personnes. Elle fait savoir que ce problème de gestion de ce budget affecte directement le développement des communes.

« C’est inconcevable, comment est-ce qu’une seule personne rafle tous les marches dans toutes les provinces ? », se demande député Zénon Ndaruvukanye. Ils demandent que les marchés soient exécutés par les natifs, sauf au cas où ils n’ont pas de compétences requises.

Le premier vice-président de la République se montre rassurant. Gaston Sindimwo promet qu’il va contacter les ministères concernés pour venir à bout de ce défi. «Pour la mise en œuvre de ses propres projets, la commune doit employer sa population locale. Il faut que tous les 500 millions restent dans la commune, ce qui permettra de booster le développement communal».

A propos de ces plaintes des entreprises exécutantes, Iwacu a contacté,  le ministre de l’Intérieur, Pascal Barandagiye, en vain.

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

La fin du Phénix ?

Les dés sont jetés, les carottes sont cuites : le ministre de l’Intérieur a validé les conclusions issues du congrès extraordinaire tenu à Ngozi le 10 mars par des dissidents d’Agathon Rwasa. « Nous prenons acte du rapport et des décisions prises (…)

Online Users

Total 2 048 users online