Mardi 23 avril 2024

Économie

BCB, le géant fragilisé II

11/02/2015 14

bcbEn réponse à mon article du 26 décembre dans le journal IWACU, la direction de la BCB a fait publier en publireportage dans IWACU du 09.01.2015 une réponse sous forme d’article contradictoire : BCB, une politique de proximité qui paie. Avant d’aborder le thème, je voudrais tout d’abord remercier les internautes qui ont réagi nombreux à ce débat en y apportant des compléments d’information avec objectivité qui, dans l’ensemble, confirment ma propre analyse.

Je souhaite un jour qu’il y ait un débat public sur la situation réelle du secteur bancaire burundais que j’avais évoqué déjà dans un article d’IWACU daté de janvier 2014. La grande question qu’a suscitée mon article et qui est au cœur du début actuel porte sur le partage des richesses produites entre profits et salaires dans les banques commerciales du Burundi et le monde des entreprises en général :

1. Tout d’abord, je voudrais confirmer que la BCB reste un géant du secteur bancaire burundais et qu’à ce titre, elle mérite la confiance du public acquise depuis plusieurs décennies.
La page publicitaire qui décrit la position de la BCB en termes de l’évolution du nombre des comptes, du total du bilan, des dépôts de la clientèle, reflètent bien la solidité de la BCB, si l’on fait une analyse du point de vue du bilan.

2. Par contre, si l’on analyse la situation du point de vue des comptes de résultats, la situation financière est plus préoccupante. J’avais moi-même souligné que les fonds propres et le produit net bancaire (PNB) évoluent positivement sur la période 2008-2013 mais mon inquiétude se situe au niveau des provisions pour créances douteuses dont le volume passe de plus de 6 milliards en 2010 à plus de 23 milliards fin 2013. Ceci a naturellement un impact négatif sur les bénéfices nets qui plongent de 8,6 milliards en 2011 à 2 milliards en 2013. Nous attendons fin mars 2015 les chiffres de l’exercice 2014 qui devront confirmer ou infirmer cette tendance à la baisse de rentabilité sur fonds propres (Return ou Equity – ROE).

3. En réalité les deux approches – analyse du côté bilan ou celle des comptes de résultats sont plutôt complémentaires et je remercie la Direction de la BCB d’avoir produits ces chiffres. Cependant le problème fondamental que j’ai souligné est la différence de rémunérations entre les trois dirigeants les mieux payés et les autres catégories du personnel de la banque (près de 400 unités). La nouvelle loi sur les Sociétés privées et publiques contenue dans le Décret signé en 2011 par le Président de la République les oblige à les publier en son article 399 point 5. Elle stipule que tout actionnaire a le droit de prendre connaissance « du montant global certifié par les Commissaires aux Comptes, des rémunérations et autres avantages parasalariaux, versés aux 5 dirigeants salariés les mieux rémunérés ». Continuer à ignorer cette disposition légale mettra les banques et les entreprises en porte-à-faux avec la Loi et les conséquences qui en découlent. On verra si elle sera respectée lors des Assemblées générales de fin mars 2015 portant sur l’exercice 2014 après trois ans d’omission volontaire.

4. Je conclus en affirmant que cette situation n’est pas particulière au Burundi parce que « c’est une
caractéristique générale des comptes publiés par les sociétés de par le monde. Les salariés et leurs représentants ne sont pas suffisamment au fait des réalités économiques de l’entreprise. Sans réelle transparence comptable et financière, sans information partagée, il ne peut exister de démocratie économique » comme le note avec justesse l’économiste français Thomas Piketty, dans sa magistrale étude Le Capital au XXIème siècle (Ed. Seuil 2013, p.939). On ne saurait mieux l’exprimer.

J’interpelle donc la Direction et le Conseil d’Administration des banques et grandes entreprises du Burundi à plus de transparence et d’accepter le fait que l’exigence de débat sur leur gestion est un droit désormais inaliénable pour les citoyens et actionnaires et non une simple question facultative lors des assemblées générales ordinaires.

Il me semble donc important d’aborder la question des rémunérations des dirigeants en examinant les intérêts des autres intervenants : actionnaires, Etat, employés, déposants et clients. La mesure objective de rémunération des dirigeants devrait être corrélée avec l’évolution des profits et non calculée sur une base arbitraire sans aucun lien avec la performance de l’entreprise.

Conclusion

En conclusion, l’accès au crédit est une condition préalable à la croissance économique. Par conséquent, le secteur bancaire doit pouvoir être en mesure de participer au développement économique du Burundi, notamment dans le secteur rural où les crédits ne représentent que 2% de l’encours global alors que les emplois y représentent 90%. D’où la nécessité du débat sur un sujet aussi fondamental pour l’avenir de ce pays.

Forum des lecteurs d'Iwacu

14 réactions
  1. SINGIRANKABO

    Comme suggestion, il faut que les institutions bancaires œuvrant sur le sol burundais puisse publier ses états financiers chaque année afin de faciliter certains chercheurs qui veillent approfondir le métier de banque. Je suis d’accord avec vous mais le problème est qu’il nous est impossible de confirmer que telle banque est entrain de bien travailler ou risque de tomber en faillite alors que nous ne voyons pas des données chiffrées prouvant la réalité. Actuellement, si un étudiant ou enseignant chercheur va à n’importe quelle banque pour chercher des informations qui pourraient améliorer son travail de fin d’études il y a des données qui restent toujours confidentielles à la banque. Si nous continuons comme ça, c’est fort probable de voir nos banques tomber en faillite. Les banques ne publient pas ses états financiers de peur d’être critiquées alors que c’est l’occasion de se corriger. Pour conclure, le problème n’est pas lié aux salaires exorbitants des dirigeants des banques mais plutôt le manque de stratégies qui découlent d’une vision et d’un leadership adéquat. Je remercie IWACU de nous éclaircir mais je le demande de faire d’autres investigations et nous montrer les états financiers de toutes les banques burundaises afin d’apporter une contribution moyennant les données.

  2. beninka

    Cher Antoine, ivyuzuga si ukurira busema
    Genda urabe muri Kenya, apres chaque excercise, chaque banque ishira muri Daily nation, ikinyamakuru gisohoka buri musi muri kenya, le bilan del’annee precedente kugira ngo aba nyagihugu bibonere uko amahera yinjiye , uko yakoreshejwe , banaheze bayizere, bigenze ukundi bigire ahandi amahera yabo ntazopoterermwo Hari ama banque twumva ngaho i Bujumbura ko ari au bord de la faillite, none wumva abanyagihugu bokwama biruka inyuma yabo, bari muri za Liquidations??? kandi amahera tuba twarayabashiriye ku bushake bawacu???

    tera imbere nk’umuzinga Mutama , ca c’est un probleme d’actualite!!!
    i Burundi banque nizihindure ingendo, irya mishakara yikirenga iveho, tureke guhomba, wogira mbere ngo ni barya ba ADG dukorera, ninaco gituma banques zisaba inyungu nyinshi z’umurengera.

    Beninka

  3. kamwe

    Le secteur economigue en general et plus particulieremant le secteur bancaire est a revoir et refonder de fond en comble et doit etre accompagne d’une prise de conscience minime meme s’il semble que l’argent fait perdre le nord. Je me rapelle qu’au moments de la grande crise financiere qui a frappe la planet entiere,les dirigeants des grands groupes financiers et de grands entreprises des 4 coins du monde ont renonce publiquemant a leurs bonus,comme quoi chez nous on est toujours performant. Pathetique

  4. Peace

    Et les pannes de tous les jours des guichets automatiques et surtout surtout au siège BCB!!!

  5. vyansize John

    J’ai l’impression que M.Prime Nyamoya a la nostalgie du pouvoir.
    Il a aussi dirigé la même banque, avant l’actuel ADG. Pourquoi ne fait-il pas de comparaison avec son époque. Combien touchait-il, quels étaient les avantages? En plus, on négocie son salaire… Si Rutumo l’a négocié à la source, que faire…
    Aussi, la déontologie oblige: Prime ne devrait pas étaler publiquement les erreurs d’une institution qu’il a dirigée!
    Malhonnêteté intellectuel!!!!!!!!!!!!

    • EN

      Ne serait-il pas plutôt « malhonnête » de taire ce qui est illégale ou ce qui ne va pas ? Ceci ne serait-ce que dans l’intérêt des clients qui ont confié leurs économies à cette institution ?

  6. nsabimana

    Je suis d’accord avec Karire.
    Voyons , je crois que la raison d’exister d’une banque est de financer l’économie. Avec les taux créditeur de 18 % et un taux débiteur de 8%, on ne peut pas financer l’économie. En fait, nos banques sont là pour nous garder nos salaires et nos petites économies.
    Il y a un souci quelque part: soit les fonds propres de nos banques sont maigres soit les banques ne font pas de bonnes politiques commerciales.

    Il faut mettre à plan le système bancaire burundais et voir ce qui ne marche pas.

    Et pour la crise que traverse les télécoms , où est le gouvernement?

  7. Karire

    Banque iguhaye ingurane uyungukira 18%. Uyibikije ikwungukkira 8%. Ce n’est pas équitable. Ntibazosubire kwirata ngo barunguka. Ni ubusuma. Turababona tukabura ingene tubatesha. Birababaje!!

    • EN

      Et qu’est-ce qui serait « équitable » selon vous, SVP ?

    • Ndayi

      @Karire, ivyo nivyo? 8% iyo ubikije? sha tubwire neza kweri. Ngaha mu Bubiligi i banque ndimwo banyungungira 0,50%. Urumva ko ivyo bintu bigoye kwemera.

    • Jean-Pierre

      @ Karire.
      Ino muri Canada, bakuguranye ayinzu uriha inyungu ya 2.5 ou 3.5% Ari ideni rya carte de crtédit ni entre 12 et 20%. Ari découvert ni autour de 7%. Uyabikije naho, inyngu ni 1.9% . Niba rero babaha umunani ngaho nuko mbona hatwawe nabi uwuritsitaye yoca arizana.

  8. Jean claude ntakarutimana

    Tres important, oublions un peu les imbonerakure , les sociétés civiles ,ikibiri pour aller sur les points qui nous interressent au moins. Les dirigeants des entriprises ne devraient pas etre payés de facon arbitraireou de facon forfetaire , il faut une base réelle(compétence, perfomance,rentabilité donc la croissance en général) de l’entreprise.Ex Le directeur de la SOSUMO devrait voir son salaire à la hausse car il ya le mérite et les résultats remarquables, comment est ce que le directeur de l’ONATEL /POSTE par ex peut il avoir les memes avantages que celui de la SOSUMO??? moi meme j’ai travaillé sur la remunération des cadres dirigeants des entreprises publiques par rapport à la perfomances , j’ai vu des résultats terribles, j’ai du meme aller trop loin avec un membre du conseil d’administration que j’ai la chance de rencotré, en concluant que « c’est pour cette meme raison que nos entreprises publiques et privées ne grandissent pas » Je suis tout à fait d’accord avec Nyamoya sur sa contribution

    • manadufashe

      Je pense que la parole d’un économiste, un actionnaire et même un membre du conseil d’administration vaut toute les vérités du monde. Cependant, j’invite IWACU à faire des investigations sur les dessous de cette affaire. Pourquoi Mr Prime qui fait partie des ténors de cette banque (BCB) jusqu’à preuve du contraire est entrain de lui faire un coup bas, imaginez combien de clients peuvent claquer la porte à cette banque suite à ces informations. Supposons que l’information livrée par Prime est fausse, comment IWACU compte se dédouaner devant ses lecteurs. Peut on confronter les points de vue de la banque et de son ancien directeur pour voir les vrais motifs de ce revirement de mr Prime. Je vous remercie

    • KIRADODORA

      L’exemple de la SOSUMO était bien choisi mais j’imagine que vous parliez de Mr Audace Bukuru. C’est juste vous informer que la personne qui a relevé la SOSUMO a été remplacé Mr Donatien NIJIMBERE, un ancien agent de la cette même entreprise.

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