Samedi 12 juillet 2025

Editorial

Découpage administratif au service du contrôle politique ?

11/07/2025 0

Le nouveau découpage administratif au Burundi est devenu effectif après les élections législatives et communales du 5 juin. Jusqu’à nouvel ordre, les Burundais viennent des provinces de Buhumuza, Bujumbura, Burunga, Butanyerera et Gitega. Nous passons désormais de 18 provinces à 5, et de 119 communes à 42.

Entre autres objectifs : rapprocher l’administration des citoyens, réduire les charges des communes, élargir la base fiscale, mettre en œuvre la politique nationale de décentralisation, harmoniser avec les organisations administratives des pays de la sous-région. Les nouveaux gouverneurs et les secrétaires exécutifs communaux ont été nommés et sont en fonction. Du moins, officiellement.

Il faut se rappeler que l’expérience de centralisation-décentralisation des structures administratives n’est pas une idée originale du régime actuel. En guise d’exemple, au fil du temps, l’organisation administrative a connu plusieurs évolutions, notamment en ce qui concerne le nombre de provinces.

Et à chaque fois, les gestionnaires de la Nation avancent des « arguments phares ». Le Burundi est passé de 8 à 15 provinces en septembre 1982. Ce redécoupage visait « à affiner l’administration territoriale et à mieux répondre aux besoins des populations locales ».

Le nombre de provinces est ensuite passé de 15 à 18 en mars 2015, notamment avec la création de la province de Rumonge. Cette modification avait eu pour objectif d’« adapter l’organisation administrative aux réalités démographiques et géographiques du pays ».

Certes, les redécoupages administratifs peuvent être nécessaires pour adapter la gouvernance aux réalités changeantes d’un pays. Cependant, on peut se demander si leur fréquence excessive et leur mise en œuvre ne peuvent engendrer désorientation, confusion de la population ?

Mieux : Fait-on d’abord le bilan des expériences précédentes pour comprendre les failles et les forces de ces politiques ? Des observateurs dénoncent entre autres la perturbation des services publics, les coûts financiers et logistiques, l’instabilité institutionnelle et la perte de mémoire administrative. En effet, la fréquence des changements peut nuire à la stabilité des institutions locales. Les nouvelles administrations peuvent manquer de l’expérience et de la connaissance du terrain accumulées par leurs prédécesseurs. Cela peut également entraîner une perte de continuité dans les projets de développement et les politiques publiques, rendant difficile l’évaluation à long terme de leur efficacité.

Les experts proposent des critères et facteurs clés qui influencent l’efficacité d’un découpage administratif. Entre autres : proximité et participation citoyenne, volonté politique et consensus, rationalisation des coûts et optimisation des ressources, moyens humains et financiers, transparence et communication, cohésion territoriale et identité.

J’ose espérer que nos décideurs ont pris en considération tous ces éléments. Sinon, ils donneront raison aux détracteurs qui parlent du charcutage électoral, d’un découpage administratif au service du contrôle politique.

En définitive, le nouveau découpage administratif est une réforme majeure qui vise à rationaliser l’administration et à la rapprocher des citoyens. L’efficacité d’un découpage administratif ne se mesure pas uniquement à la simplification de la carte ou à la réduction du nombre d’entités. Un découpage est efficace lorsqu’il est perçu comme légitime par la population, qu’il répond aux défis contemporains. C’est ce que les Burundais attendent.

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