Vendredi 11 octobre 2024

Politique

Le Conseil de sécurité appelle au dialogue inclusif

27/08/2018 Commentaires fermés sur Le Conseil de sécurité appelle au dialogue inclusif
Le Conseil de sécurité appelle au dialogue inclusif
Le Conseil de sécurité évoque une situation politique préoccupante.

La déclaration du Conseil de sécurité du 22 août déplore la lenteur des pourparlers et appelle au dialogue inclusif.

Les membres du Conseil de sécurité demande à la facilitation/médiation de la Communauté est africaine de passer à la vitesse supérieure. Le dialogue inter-burundais affiche une lenteur préoccupante et Bujumbura fait montre d’un manque d’engagement par rapport à ce dialogue.

Le Conseil de sécurité n’est pas pessimiste, pour autant. Il reconnaît plusieurs efforts du gouvernement, entre autres les missions onusiennes de maintien de la paix, l’amélioration de la situation sécuritaire du pays, la libération des prisonniers et la décision de Pierre Nkurunziza de ne pas se présenter aux prochaines élections. Des étapes significatives. Sauf qu’un progrès reste à faire, « la situation politique du pays demeurant préoccupante ».

Pour sortir de cette situation, une seule solution politique est proposée : le dialogue inclusif mené par la facilitation sous la houlette de l’EAC.

D’où l’appel lancé aux différents protagonistes dans la crise burundaise à un dialogue inclusif et sans conditions préalables. « C’est crucial que toutes les parties, spécialement le gouvernement, arrivent à un accord. Le dialogue est le seul processus qui va mener vers la fin de la crise ».

Le Conseil de sécurité espère que les pourparlers vont déboucher sur des élections de 2020 qui seront libres, justes et transparentes paisibles et inclusives.

Cette notion d’inclusivité du dialogue a toujours créé un débat. Pour les diplomates, cela signifie un dialogue entre les vrais protagonistes, ceux qui sont en conflit. Pour Bujumbura, il n’est pas question de s’asseoir avec les personnes impliquées dans le putsch, poursuivies par la justice. « Ils sont au nombre de 34 et ne peuvent pas prendre en otage tout un peuple, » a déclaré un membre du gouvernement.


La facilitation veut en finir

La « dernière » session des pourparlers serait pour bientôt. Mais le bilan du travail de Mkapa reste très mitigé. L’opposition lui reproche qu’à ce jour, il n’ait jamais pu organiser des pourparlers réellement inclusifs.

La facilitation s’active pour la prochaine session des pourparlers inter-burundais

Lors de sa dernière visite, la délégation de la facilitation de Mkapa a pu convaincre Bujumbura de participer au prochain round du dialogue. Le parti au pouvoir est donc revenu sur sa position tranchée et a annoncé qu’il va accepter de répondre à l’invitation si « la session est bien organisée. »

Pour rappel, le premier vice-président, ou encore l’assistant du ministre de l’Intérieur avaient déclaré qu’il n’y avait plus « de nécessité de dialogue externe ». Pour eux, presque toutes les questions avaient été vidées à l’interne.

Une position finalement abandonnée par Bujumbura. « Nous ne voulons pas qu’ils viennent dire que nous avons été l’objet du blocage du dialogue, » a expliqué Thérence Ntahiraja, l’assistant du ministre de l’Intérieur.
Le gouvernement a néanmoins posé ses conditions. Il faudra offrir une sécurité à sa délégation. L’Ouganda, choisi pour abriter la prochaine session, ne remplirait pas ces normes de sécurité, car « abritant des putschistes burundais sur son sol ».

Autres conditions avancées par Joseph Ntakarutimana, secrétaire général du parti Cndd-Fdd : « Pas question d’aborder des questions déjà vidées par la Constitution issue du référendum ainsi que la feuille de route adoptée par les politiques. »

Selon plusieurs observateurs, Bujumbura ne pouvait pas prendre le risque de froisser la Communauté Est africaine qui a été à ses côtés depuis la crise de 2015.

En effet, alors que la Communauté internationale haussait le ton, l’Union européenne prenait des sanctions contre le gouvernement, des présidents de la sous-région ont pris position ouvertement en faveur de Bujumbura.

Le discours de Yoweri Museveni au 18ème sommet de l’EAC au mois de mai 2017 reste dans les mémoires. A la tête de l’EAC mais également médiateur dans le dialogue inter-burundais, alors que l’opinion internationale attendait un discours ferme contre Bujumbura, Museveni avait créé la surprise en s’en prenant violemment à l’Union européenne… Pourtant, le gouvernement burundais avait été indexé par le facilitateur Mkapa comme « le mauvais élève des pourparlers. »

Pour rappel, Bujumbura avait décidé de boycotter le 3ème round, la facilitation ayant invité des personnalités poursuivies par la justice burundaise.

Autre soutien de taille : Le président de la Tanzanie qui a de son côté tenu à plusieurs reprises le même discours que celui de Bujumbura. Lors de son discours du 20 juillet alors qu’il accueillait le président Nkurunziza, il avait déclaré que la paix et la sécurité étaient une réalité et plaidé pour le retour des réfugiés au Burundi.

Bujumbura n’a donc pas intérêt à boycotter l’invitation. Par ailleurs, le facilitateur, M Mkapa, semble très en phase avec le gouvernement burundais. Lors de la dernière session de décembre 2017, il avait déclaré qu’au nom de la souveraineté nationale, la population burundaise avait le droit de réviser sa Constitution et qu’il n’y pouvait rien.

Quelles questions feront l’objet de discussion ?

Alors que la facilitation prévoit que ce 5ème round soit le dernier et marque la fin de la crise, la question est de savoir quelles seront les questions à l’agenda de la rencontre ?

D’après la facilitation, il faudra convaincre les réfugiés burundais qui ne sont pas poursuivis par la justice de rentrer au pays et donner des garanties pour des élections libres et démocratiques.

Mais les choses ne sont pas aussi simples. Pour le Cnared, une autre feuille de route pour les élections de 2020 doit être renégociée lors des prochains pourparlers. Il faudrait aussi un débat sur certaines dispositions de la nouvelle Constitution qui « excluent certains tout en privilégiant d’autres. »

Agnès Ndirubusa

Un dialogue qui peine à faire ses preuves

Le dialogue externe est en panne depuis plus de deux ans et peine à décoller. Les conclusions issues des quatre sessions ne sont pas encourageantes.

Hormis un travail qui a permis de dégager des points de convergence et de divergence, la facilitation n’a pas pu organiser les débats en plénière. Chaque groupe travaillait dans son coin. Au dernier round, elle avait prévu « des vraies discussions » qui n’ont pas eu lieu.

La facilitation n’a pas été capable de rassembler tous les protagonistes de la crise autour de la table, ce que d’ailleurs souhaitait la communauté internationale partisane d’un « dialogue inclusif ».

Ainsi, le gouvernement a boycotté la troisième session des pourparlers d’Arusha au mois de février 2017 pour protester contre la présence des personnalités honnies par Bujumbura. Et lorsque la médiation ignorait ces personnalités, c’est la coalition de l’opposition en exil, le Cnared, qui boycottait la rencontre.

Mais force est de constater que les approximations et les tâtonnements de cette médiation ont plutôt profité au pouvoir en place. Ils ont permis à Bujumbura de gagner un temps précieux pour sécuriser le pays. Du temps également pour organiser un processus référendaire qui a abouti à la révision de la Constitution.

Aujourd’hui, du temps, il n’y en a plus beaucoup. L’horloge tourne et les élections de 2020 approchent à grands pas. Comme l’a indiqué le leader de la Coalition Amizero y’Abarundi, la prochaine session doit avoir lieu dans les plus brefs délais. Agathon Rwasa a estimé qu’il était primordial qu’un document « consensuel » soit adopté lors de ce prochain rendez-vous.

ONU

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Réactions

Léonce Ngendakumana, lassé par les déclarations qui n’aboutissent à rien Le vice-président du parti Sahwanya Frodebu se dit lassé par les déclarations du Conseil de sécurité qui n’aboutissent à rien. « Je ne pense pas que cette déclaration va aider les Burundais à sortir de cette crise ». Léonce Ngendakumana se dit pessimiste par rapport à la facilitation/ médiation de la sous-région, « avec des présidents comme Museveni et Magufuli qui parlent comme Bujumbura. »Face à cet état de fait, Léonce Ngendakumana se demande si ce ne serait pas utile aux Burundais eux-mêmes de régler leurs affaires sans attendre une aide extérieure.

  Jean de Dieu Mutabazi : « Un sentiment mitigé par rapport à cette déclaration » Le président du parti Radebu déplore le fait que le Conseil de sécurité n’ait pas reconnu les avancées dans le dialogue inter-burundais. « La nouvelle Constitution est issue du dialogue, la feuille de route de Kayanza est un résultat d’un consensus ». Jean de Dieu Mutabazi espère que le code électoral sera également consensuel pour cheminer vers des élections libres, démocratiques, transparentes et apaisées. « Au gouvernement maintenant de sécuriser les opposants radicaux pour qu’ils rentrent et y participent. »

Venant-Hamza Burikukiye : « Le dialogue a toujours été inclusif » « A moins qu’on soit en train de plaider pour les criminels, le dialogue a toujours été inclusif. Or, le Conseil de sécurité des Nations Unies n'est pas là pour légitimer les crimes », réagit le porte-parole de la plateforme de la société civile, PISC Burundi. Selon Venant-Hamza Burikukiye, les auteurs des insurrections sanglantes et de la tentative de coup d'État ne sont pas graciés par le dialogue. « C'est par la justice ».

Il ne voit pas la raison d’organiser un nouvel round de dialogue d’Arusha. Il faut plutôt encourager le retour massif des Burundais de l'exil, soutenir Bujumbura dans ses efforts de renforcement de la paix et de la réconciliation. Et de trancher : « Qu’on laisse le Burundi et les Burundais libres et souverains s'occuper de nos affaires. Nous sommes assez mûrs et responsables pour prendre en mains notre destin »

Gabriel Rufyiri : « Le dialogue est plus qu’urgent » « Nous apprécions beaucoup cette déclaration du Conseil de sécurité des Nations Unies », a déclaré Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome. D’après lui, elle revient sur tous les problèmes qui hantent le pays dont les élections de 2020, la misère, les violations des droits de l’Homme, etc.

« Pour trouver des solutions, le dialogue est plus qu’urgent ». Selon lui, la communauté internationale devait s’impliquer davantage pour que le dialogue inclusif produise des résultats palpables. « Au cas où il y aurait une partie au conflit qui refuserait d’y participer, il faut que des sanctions sévères soient prises ». Et d’interpeller les politiciens : « Que la guerre des égo cesse pour mettre en avant l’intérêt général de la nation.»

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