Vendredi 06 décembre 2024

Société

Grossesse à l’école, exit du système éducatif !

06/07/2018 Commentaires fermés sur Grossesse à l’école, exit du système éducatif !
Grossesse à l’école, exit du système éducatif !
La ministre de l’Education

La ministre de l’Education a été claire : tout élève victime ou auteur d’une grossesse sera exclu définitivement du système éducatif public et privé. Une mesure des plus contestée.

La décision tombe le 26 juin. Dans une correspondance adressée à tous les directeurs provinciaux de l’enseignement, Janvière Ndirahisha, ministre de l’Education, ordonne que tout élève victime ou auteur d’une grossesse n’a pas le droit de réintégrer le système éducatif formel public ou privé, c’est-à-dire, l’école fondamentale et post-fondamentale. «Ils peuvent fréquenter toutefois l’enseignement des métiers».

Une décision de la ministre a été accueillie par une salve de critiques : les parents, les défenseurs des droits de l’enfant et de la fille en particulier, différentes associations œuvrant dans le domaine de l’éducation, … tous parlent d’une ’’mesure absurde’’.


Réactions

Fenadeb : «Deux ministres qui se contredisent… »

Pour Jacques Nshimirimana, président de la Fédération nationale œuvrant dans le domaine de l’enfance(Fenadeb), cette mesure est en contradiction avec la loi de 2016 sur les violences basées sur le genre (VBG).

Cette dernière, en son article 18 stipule que ’’les directeurs d’écoles ont l’obligation de faire respecter le droit à l’éducation des mères célibataires. Ils doivent prendre toutes les dispositions qui s’imposent pour les protéger contre la stigmatisation et l’exclusion sociale de la part des éducateurs’’. « Quelle mesure, entre ces deux, sera appliquée ? », se demande-t-il.

Ce défenseur des droits de l’enfant affirme que la plupart des grossesses à l’école ne sont pas désirées. Ces filles sont donc victimes des VBG conformément à cette loi de 2016. « Même la ministre a parlé de ’’victime’’ dans sa décision. Une victime doit être protégée, pas punie».
Il estime que la ministre devrait revoir la mesure pour lever toute contradiction avec le ministre des droits de l’Homme.

La déception chez les parents

«Nous sommes très déçus», se désole Edouard Ndikumasabo, président de l’Association des parents d’élèves. Selon lui, cette décision est contraire aux conventions établies lors d’une réunion, début de cette année, entre le ministère de l’Education, les parents et les responsables d’écoles.

D’après lui, il avait été recommandé que les élèves victimes et auteurs d’une grossesse puissent reprendre l’école un an après l’accouchement. La jeune fille pouvait être admise dans un autre établissement pour ne pas constituer un mauvais exemple.

«Les exclure définitivement ou les réorienter dans une école des métiers, c’est mettre en péril leur avenir. C’est punir à la fois les parents, l’élève et son enfant.» De surcroît, c’est limiter sa capacité de pouvoir élever ses enfants.

Bafashe bige : «Une énorme régression»

La coalition «Bafashe bige» qui intervient dans le domaine de l’éducation parle d’un pays où l’éducation marche à reculon. D’autant plus que les ODD4 (Objectifs de développement durable 2030) prévoient que tous les enfants actuels aient terminé au moins l’école secondaire.

D’après le président de cette coalition, Me Jean Samandari, les mères célibataires qui avaient repris l’école ont réussi en classe. «L’école, c’est l’avenir de l’enfant.» Il demande à la ministre de suspendre la mesure. «Nous allons lutter pour que tous les enfants soient à l’école.»

APFB : «Protéger au lieu de punir»

Quant à l’Association pour la promotion de la fille burundaise, la ministre devrait, par contre, instaurer les mesures qui protègent les élèves des grossesses non désirées.
La coordinatrice de l’APFB, Alice Nkunzimana parle d’une mesure injuste et discriminatoire. Elle estime que ce sont les auteurs qui devraient être punis, pas les victimes.

D’après elle, c’est une double punition. Le fait qu’elle tombe enceinte est déjà une peine vis-à-vis de la société. L’exclure de l’école, c’est la punir davantage.

Pour l’APFB, si la mère célibataire se sent capable de retourner à l’école, si les moyens physiques, morales et financiers le lui permettent, rien ne devrait l’en empêcher.

D’après la coordinatrice de cette association, tomber enceinte n’est pas un crime. Une élève mise enceinte est une victime de violences. Elle doit être protégée, pas punie.

 

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