Samedi 20 avril 2024

Société

Fenadeb : «Nul n’a le droit de faire participer des enfants à des activités politiques »

06/06/2017 17

A la suite d’une vidéo mettant en scène des adolescentes aux couleurs du parti au pouvoir en train de chanter, le président de la Fenadeb tire la sonnette d’alarme.

Des filles en uniforme du parti Cndd-Fdd en train de danser
Des filles en uniforme du parti Cndd-Fdd en train de danser

«L’Etat burundais a signé une convention relative aux droits de l’enfant en 1990 et elle a été effective en 1991. Depuis lors, aucun Burundais n’est autorisé à faire participer l’enfant de moins de 16 ans à des activités politiques », fait savoir Jacques Nshimirimana, président de la Fédération nationale des associations engagées dans le domaine de l’enfance (Fenadeb).

Cet activiste intervient à la suite d’une vidéo, diffusée sur les réseaux sociaux, montrant des jeunes filles vêtues d’habits aux couleurs du Cndd-fdd, sous l’animation d’un adulte en train de retracer, au rythme d’une danse, les dates mémorables de différentes crises qui ont endeuillé le Burundi.

L’animateur : « Avez-vous oublié le passé douloureux ? »

Les filles répondent en chœur : « Pas du tout ! Nous ne l’avons pas oublié. Il s’agit tout simplement de la courte mémoire des gens. Nous sommes au courant de tout ce qui s’est passé au Burundi aussi bien en 1965, en 1972 qu’en 1988. Même la très tristement célèbre crise de 1993 quand feu président Ndadaye a été assassiné et le sang d’innombrables Burundais versé. »

L’animateur : « Mbonerakure, est-ce que la page a été tournée ? »

Les filles en chœur : Ooh…chasser le naturel, il revient au galop. Des personnes aux intérêts insatiables sont toujours aux aguets. Les autres nous étonnent. Ils se font passer pour des redresseurs de torts alors qu’ils ne veulent que nous exploiter à l’image des poux dans des habits.»

Léonce Ngendakumana, vice-président du parti Frodebu, dénonce une manipulation, une instrumentalisation de la jeunesse. « Ce qui est mauvais, c’est de les instrumentaliser à des fins politiques.»

Il conseille au parti au pouvoir de ne pas copier les mauvaises pratiques de ses prédécesseurs. « Ce n’est pas parce que l’Uprona et le Frodebu l’ont fait qu’il faut le faire quand on est au pouvoir. » Et de dire que l’instrumentalisation de la jeunesse implique la destruction de cette dernière et pour ce faire, soutient-il, du pays tout entier.

« Il leur faut plutôt des projets de développement »

Abdoul Kassim, président du parti UPD Zigamibanga, doute de l’appartenance de ces jeunes filles à la ligue des jeunes du parti Cndd-fdd. « Ce ne sont pas des Imbonerakure comme elles le chantent. Ce sont des enfants qui n’ont pas encore l’âge d’adhérer aux partis politiques. » Et d’insister : « Ce n’est pas le moment de manipuler des enfants. Il faudrait leur enseigner plutôt des projets pour la construction du pays. »

Pour Térence Ntahiraja, porte-parole du ministère de l’Intérieur, les propos tenus par ces adolescentes dans la vidéo ne sont que vérité. «Le problème se pose quand l’on en fait une interprétation selon ses convictions. »

Ces personnes aux intérêts insatiables dont il est question, poursuit-il, c’est ce Hutu, ce Tutsi et ce Twa qui cherche toujours à se servir des clivages ou d’autres défis pour conquérir le pouvoir. «Ceux qui voulaient renverser les institutions en 2015, n’étaient-ils pas aussi bien Hutu que Tutsi ? Et aujourd’hui au sein du Cnared, n’y a-t-il pas des Hutu et des Tutsi ?» Et de demander aux gens de ne pas faire dire à ces filles ce qu’elles n’ont pas dit.

Au sujet de leur statut de mineures, il fustige l’implication directe des enfants dans la politique, avant de nuancer : « Cependant, des enfants naissent dans des familles d’appartenance politique. Et à la longue, ils finissent par se comporter comme des membres à part entière. » Et d’ajouter que toute formation politique a des adhérents, des sympathisants…. «Ces gamines font partie de cette dernière catégorie, elles n’étaient là que pour l’animation.»
Contactée, Nancy-Ninette Mutoni, chargée de communication au Cndd-Fdd, n’a pas voulu s’exprimer.

Forum des lecteurs d'Iwacu

17 réactions
  1. dodo

    hahahhaah pourtant certains ont utilisee les enfants durant les manifestations de 2015!!!! J`espere que ceux la vous lisent et comprennent le message

  2. Rurihose

    Mon homonyme qui justifie ce lavage de cerveaux (bien intentionné,car dans la ligne officielle de la nomenclatura au pouvoir) se moque de qui. Les fautes commises il y a 30 ou 40 ans ne doivent jamais cautionner les turpitides d’aujourd’hui.
    Sommes nous maudits alors?
    Nous ne pouvons jamais apprendre de nos fautes?
    La responsabilité est toujours i dividuelle. Il faut appeler un chat un chat.
    Moi j’ai 25 ans. Mais si mon frère commet un crime,j attends qu’il soit puni en respectant le droit et rien que le droit.
    L indignation sélective et abjecte.
    Pourquoi le pouvoir actuel refuse une CVR avec le volet Justice?
    Pourquoi il refuse les experts internationaux?
    That is the question

  3. Rurihose

    Merci Iwacu de ne pas avoir choisi d’escamoter mon commentaire personnel. Vous prenez une place inestimable dans mon estime personnelle. J’avais cru un moment que vous aviez choisi de le censurer. Ce n’est pas dans vos habitudes et je vous prie de persévérer dans cette voie. Seule la Vérité nous sauvera tous. Imana ibazigame

  4. Fofo

    Je pense que la loi n’interdit pas les enfants de participer aux activités d’animation culturelle peu importe l’organisateur. Si cette interdiction existe, je pense que même les défilés pendant les fêtes officielles devraient être interdits car ils ont aussi un caractère politique. Qui étaient et que faisaient les pionniers? C’étaient des enfants mineurs qui faisaient des défilés à caractère militaire? Et les groupes d’animation?

    • Yves

      @Fofo : il ne s’agit pas d’animation culturelle mais d’endoctrinement idéologique. Et au contraire, connaitre l’organisateur importe beaucoup ! C’est à l’école que l’on apprend l’histoire, et non par au coin d’une rue, sous les ordres d’un quidam travaillant à la solde d’un parti politique, peu importe lequel d’ailleurs. Vous êtes, comme à vous triste habitude, stupéfiant de mauvaise foi…

      • Fofo

        @Yves,
        Affirmons que c’est l' »’endoctrinement idéologique » comme vous le dites…. Est-ce la loi burundaise l’interdit? Si oui donne-moi la référence.

        • Yves

          @Fofo : la loi burundaise vous interdit-elle de vous jeter d’une falaise ? Sans doute pas. Et pourtant, il ne vous viendrait jamais à l’idée de le faire. Où l’on voit toutes les limites de l’approche légaliste derrière laquelle vous tentez désespérement de vous retrancher… ou pour le dire autrement, ce n’est pas parce qu’un acte n’est pas répréhensible d’un point de vue légal qu’il ne l’est pas d’un point de vue éthique ou moral. Ne me remerciez pas, c’est toujours un grand plaisir de vous éduquer, en dépit du fait que vous soyez un élève très têtu ^_^

          • Fofo

            @Yves,
            Si il n’y pas d’interdiction sur quelle base condamnez-vous cet acte. Vous évoquez l’éthique et morale mais chez vous quand les gens s’adonnent à des comportement déshonorant que je me réserve de citer, vous évoquez le droit de l’homme.
            Merci de nous éduquer!
            1. Vous nous avez appris la théorie que l’homme serait le résultat d’une évolution et que le premier homme serait venu des singes tanzaniens. Nous l’avons accepté comme ça mais malheureusement, plusieurs années plus tard, vos scientifiques ont contredit cette hypothèse. Les apprenants que nous sommes, nous ne savons plus quelle est la vérité.
            2. Malgré le nombre d’experts et institutions d’analyse, la crise financière est tombée sur vous comme un tremblement de terre (catastrophe naturelle) alors que vous affirmez maitriser tout.
            3. Toutes les entreprises de sondages sont à risques car tout le monde connait comment se joue le jeu. Les rapports sont produits chaque jour mais la vérité est tout autre. J’ai besoin d’apprendre bcp de vous mais dans certains domaines je ne vous ferai plus confiance.
            4. Vous nous apprenez à respecter les lois mais vous me critiquez quand je fais ce qui n’est pas interdit par la loi!
            Dieu est seul omnipotent, tous les restes ne sont que des êtres infaillibles!

          • Fofo

            Correction: être faibles.

    • Sankara

      C’est dommage que des enfants soient manipulés du genre.allez leur demander ce qu’ils savent de ces crises là!!!!elles n’en savent absolument rien.c’est les autres qui parlaient à travers ces pauvres

  5. roger crettol

    C’est à la fois scandaleux et tellement « normal », tellement dans la direction générale d’irréconciliable crispation sur un passé qu’on ne changera plus.

    Le régime essaie de se construire et de se légitimer en érigeant en holocauste ce qui furent des luttes politiques sanglantes, cruelles et éminemment regrettables. Le sang et la douleur deviennent les saintes reliques intouchables autour desquelles on rassemble une nation – qu’on empêche de regarder ailleurs, vers l’avenir.

    Le seul progrès concevable passe outre ces crispations pétrifiées. Les piètres élites qui (dé)tiennent le pouvoir-fétiche à Bujumbura ne semblent pas capables d’une telle évolution. Qui cela peut-il encore surprendre ?

    [ Et si mes paroles blessent, mes très humbles excuses. Mon intention n’est nullement de minimiser les souffrances et les injustices résultant de ces diverses crises, mais d’inviter des réponses personnelles à la question : « et maintenant, que fais-je ? » ]
    —————————
    Pourquoi ces manifestations réactionnaires et rétrogrades interviennent-elles au moment où une CVR commence un travail qui apportera une lumière peut-être moins passionnée sur les évènements du passé ?

  6. Rurihose

    J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer au sujet de cette video et ce que je vais dire aujourd’hui ne déroge pas à ce que j’ai déjà dit. J’avais déjà invoqué Berthold Brecht qui disait q’en tout temps, il faut chercher à donner au mal un nom et une adresse postale. C’est-à-dire denoncer le mal peu importe la main qui le commet ou ‘époque à laquelle il est commis. Seulement, il semble que pour certains, le seul mal qui mérite notre indignation est celui qu’on est extrêmement heureux de mettre sur le dos du pouvoir en place au Burundi, en oubliant (ou en feignant d »oublier) les pratiques abjectes et similaires qui ont eu cours dans le passé. À ceux et celles qui feignent d’avoir une mémoire courte, permettez-moi de vous rappeller qu’après 1972, les JRR et autres encadreurs des  »pionniers » (à peine plus âgés que les enfants que l’on voit dans la video) faisaient reciter à ces dernier des slogans du genre  » Umugano wa Mugamba warakoreye umugambwe: Micombero ganza mu Burundi!  » . Pour les plus jeunes qui ne comprennent pas le sens de ces propos, je voudrais préciser que lors du pogrom anti-Hutu de 1972, les Jeunesses Révolutionnaires Rwagasore JRR (un movement intégré au parti Uprona) qui pourchassaient les Hutu sur les collines du Mugamba tuaient ces derniers à l’aide de pics taillés dans des troncs de cette espèce de bambou qui prolifère sur les hauts plateau du Mugamba. Et c’est avec ce genre d »’exploits » (récités notamment dans la chanson sus-mentionnée) que les JRR formaient ensuite la conscience  »citoyenne » des tout-petits embrigadés dans le movement des  »pionniers » (un autre movement integer au parti unique à l’époque)

    Doit-on balayer ces pratiques sous le tapis au motif que la Convention des droits de L’Enfant n’existait encore à cette époque? Une fois qu’on admet le postulat selon lequel ce genre de pratiques sont de nature à alimenter la  »machine à tuer », au Burundi comme au Rwanda ou ailleurs, aujourd’hui comme hier, (et j’espère que nous somme tous d’accord là-dessus), au nom de quoi devrait-on faire l’impasse sur les pratiques similaires du passé (dont je viens de vous offrir un échantillon) à plus forte raison lorsque rien ne permet d’exclure que la situation traversée par notre pays actuellement constitue peut-être un retour de flamme des pratiques similaires de bourrage de crane opérées, dans le passé, sur nos enfants? En parlant d’enfants, je voudrais simplement rappeller que hier comme aujourd’hui, dans un cas comme dans l’autre, ce sont nos enfants qui sont pris dans l’engrenage. Ceux d’hier méritent-ils moins notre compassion et notre commisération que ceux d’aujourd’hui? Au Burundi, le cynisme et la mauvaise foi ont attaint des sommets depuis logtemps. J’anticipe déjà des reactions sur  »kuzura akaboze », intibagira ntibana » et autres fadaises du genre. J’invite les uns et les autres à laisser le cynisme et l’hypocrisie au vestiaire (ou à tomber les masques) pour se dire tout à fait lucidement qu’il n’y a qu’on ne peut chercher à faire de la  »petite politique » avec une problématique aussi tragique. L’indignation à sens unique n’honore personne.

    • juju

      Ooh mon Dieu! Delivre nous des idees qui detruisent. Aparemment « on doit demeriter » parce que les pouvoirs precedents « ont demerite »
      Ca equivaut a dire que certains ont pris les armes avec comme but de demeriter une fois au pouvoir. Quelle vision!

  7. Banza

    « Il faudrait leur enseigner plutôt des projets pour la construction du pays. » »

    Dire aux gens de participer à la construction du pays reste abstrait à mon goût: ne serait-il pas plus concret de leur dire de participer à leur propre construction? Dès que chaque citoyen est construit (épanoui), le pays est construit (développé)!

  8. Micombero

    Ko muharira Ndadaye arihe? Yariyahuye? Vous combattez la vérité oubliant que c’est la seule option pour guerrir les plaies des Burundais.

    • Happy

      @Micombero, La haine n’est pas un médicament mais un poison!!Un peu de jugeotte!!!

    • Nahimana Rose

      Tous le monde doivent connaître ce qui s’est passé au pays.Il faut enseigner au gens la verité., pour que l’horreur du passé ne se repète pas.Par la radio, la television les spectacles psc. Tous le monde ne lis pas.Mais svp. pas utilise les enfants ils ne comprennent pas

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

Une responsabilité de trop

« Les décisions prises par la CVR ne sont pas susceptibles de recours juridictionnels. » C’est la disposition de l’article 11 du projet de loi portant réorganisation et fonctionnement de la Commission Vérité et Réconciliation analysée par l’Assemblée nationale et le Sénat (…)

Online Users

Total 3 815 users online