Un public nombreux a répondu à l’appel du Rassemblement de la Diaspora Burundaise de France (RDBF). Cette audience diversifiée comprenait aussi bien des jeunes que des compatriotes plus âgés. Un enseignement majeur à retenir de cette conférence à Paris est l’exigence des Burundais de comprendre ce qui s’est passé le 21 octobre 1993.
Par Antoine Kaburahe
Un point positif : la majorité avait lu le livre, ce qui a permis de générer des questions pertinentes. Blaise Nijimbere, également connu sur les réseaux sociaux sous le nom de « Baconib », et Alice Hakizimana, ancienne directrice de Radio Bonesha, ont mené un entretien passionnant et rigoureux avec l’auteur, ce qui a permis aux personnes présentes qui n’avaient pas encore lu le livre d’en comprendre l’essentiel.
Puis, Joseph Rugigana, visiblement à l’aise, a répondu aux questions d’un public avide de vérités sur les événements du 21 octobre 1993. Un intervenant, ancien officier à la retraite, a observé que le livre semble globaliser, rappelant que « toute l’armée n’était pas impliquée. » Il a rappelé qu’il ne savait rien, que cette nuit, il était chez lui, lorsqu’il a entendu comme tout le monde les bruits des bombes qui s’abattaient sur le palais présidentiel.Rugigana a précisé, en citant la page, que contrairement à ce qui se dit sur les réseaux sociaux, il n’a jamais affirmé que” l’armée entière était responsable”. Il a insisté sur le fait que ce drame n’était pas l’œuvre de “toute l’institution militaire”. C’est écrit, a-t-il dit.
Un autre participant a souligné l’importance de ne pas oublier les autres victimes du putsch, citant notamment les massacres des Tutsi à Karusi par exemple. Interpellé, l’éditeur a répondu que les Éditions Iwacu sont ouvertes à tous les témoignages. Iwacu a déjà publié un livre sur les massacres au sud du Burundi. L’éditeur a mis en avant la diversité des auteurs et des témoignages figurant dans leur catalogue.
Malgré la sensibilité du sujet, le public parisien est resté courtois, mais ferme dans ses exigences. En ce qui concerne les événements abordés dans son livre, Joseph Rugigana semble avoir satisfait les attentes du public, tout en reconnaissant la difficulté de faire l’unanimité sur une histoire aussi complexe. « Je ne me fais aucune illusion là-dessus », a-t-il rappelé dans son livre.
Le temps des attaques
À la suite de la conférence, les attaques, souvent anonymes, ont émergé sur les réseaux sociaux, certains critiques s’en prenant à l’auteur plutôt qu’au contenu du livre qui est même travesti. Un ancien officier, par exemple, a dit que “Rugigana a habillé le Président”, bien que ce point soit clairement abordé à la page 92 du livre. L’officier a accusé Rugigana d’avoir « conduit le Président dans un camp alors qu’il risquait la mort. » Dans son livre, il explique bien les raisons de son choix. Malheureusement, ces critiques semblent ignorer délibérément le contenu du livre.
L’auteur, comme il a insisté, a apporté « sa » vérité et invite d’autres à compléter ou contredire son récit, loin des insultes qui ne construisent rien. Ce qui s’est passé le 21 octobre 1993 ne doit pas finir en « cold case ». Pour les Éditions Iwacu, ce témoignage enrichit le puzzle complexe de l’histoire du Burundi.
Ce livre a le mérite de soulever le débat. Certains le font avec honnêteté, merci à eux. Dans tous les cas, toute notre gratitude pour les Burundais de Paris pour les échanges dans un bon climat de tolérance. Cela les honore.
Rendez-vous à l’ULB ce samedi 9 novembre à 14 heures, pour un autre débat.