Jeudi 07 novembre 2024
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Journée internationale des droits de la femme : Honneur aux femmes batwa

Société

Journée internationale des droits de la femme : Honneur aux femmes batwa

Iwacu a dédié l’édition 2021 de la journée internationale de la femme, célébrée le 8 mars, à l’ethnie minoritaire twa. Voyage au sein de cette communauté toujours misérable et découverte de ces femmes modèles, les « premières de cordée ».

06/03/2021
Dossier réalisé par Clarisse Shaka, Dorine Niyungeko, Keyna Iteriteka, Ernestine Akimana, Jérémie Misago et Rénovat Ndabashinze. Images : @Iwacu

Province Muyinga, il est 12h30. Nous sommes dans la communauté des batwa de Rutoke, sur la colline Rugari, à 18 km du chef-lieu de la province Muyinga. Entouré par de grandes plantations d’eucalyptus et un cimetière, ce site se trouve au milieu des bananeraies à environ à 1km de la route Muyinga-Kobero (RN6). Une quarantaine de ménages des batwa y sont installés. Ils habitent dans de très petites maisonnettes misérables, des cahutes couvertes d’herbe séchée et de feuilles de bananiers.

Acha Hashazinka est une femme twa de ce site. Assise devant sa cahute, elle affirme que la journée du 8 mars ne lui dit rien. Maman de 7 enfants, elle subsiste tant bien que mal grâce aux petits emplois qu’elle décroche chez les « Burundaises », les femmes qui ne sont pas de l’ethnie twa. « Toutes les femmes batwa, nous devons cultiver pour les autres femmes d’une ethnie différente pour survivre. »

Acha mène une vie misérable. Son mari l’a quittée, il y a trois mois, et lui a laissé 7 enfants. C’est à peine si elle arrive à les nourrir et les habiller.

Cette femme affirme qu’elle a épousé son mari alors qu’ils étaient sur le banc de l’école primaire. Son mari était en 6e année primaire. La femme a dû abandonner l’école pour travailler et pouvoir payer les frais scolaires de son mari et nourrir la famille. A la fin de ses études secondaires, le mari a quitté sa famille. « Les enfants sont partis à l’école. Jusqu’à cette heure, je ne vois pas avec quoi je vais les nourrir», confie-t-elle.

« Nous ne sommes pas des Burundaises, nous sommes des Batwa »

Geneviève Kanyigama est une autre femme twa de la localité, maman de quatre enfants. Ces derniers ne vont pas tous à l’école, faute de moyens. Elle fait savoir que l’aîné de 10 ans a abandonné. « Nous vivons grâce aux Hutu. S’ils ne nous donnent pas du travail, nous ne pouvons pas vivre».

Geneviève déplore que les administratifs locaux ne fassent rien pour la communauté twa « alors que nous votons pour eux. » Ils ne plaident pas pour leur développement. Elles demandent au moins des maisons plus ou moins décentes.

Ces femmes sont convaincues qu’elles ne sont pas Burundaises, car elles n’ont pas de terre pour cultiver, aucune activité génératrice de revenus. « Nous ne sommes pas des Burundaises, nous sommes des Batwa. Nous n’avons rien », lancera Rehema Nyabenda, une voisine également Twa. Elle montre ses enfants qui arrivent : « Mes enfants viennent de l’école, mais je n’ai rien pour les nourrir. » Son mari n’est pas là, il est allé mendier pour que la famille puisse au moins manger le soir.

Buterere : Une vie misérable pour les femmes batwa
Une femme twa en train de fouiller dans le dépotoir de Buterere.

Fouiller dans le dépotoir de Buterere pour trouver de quoi mettre sous la dent est la vie au quotidien des femmes batwa du site de Nyarumanga à Buterere, dans la mairie de Bujumbura.

Il est 10 heures dans le site de Nyarumanga, zone de Buterere, au nord de la ville de Bujumbura. A l’entrée du site, se trouvent des fours à briques. Tout autour, des champs de riz, des chantiers en construction ou de nouvelles maisons fraîchement occupées. Ce site des Batwa compte 80 maisons alignées parallèlement. Des milliers de personnes batwa y vivent, depuis plus de 15 ans.

Dans ce petit coin reculé de la ville de Bujumbura, la plupart des jeunes filles se marient à 12 ans. Plusieurs familles ont une fratrie de 8 à 13 enfants. Certaines femmes sont maquillées, leurs cheveux sont lissés et elles portent des boucles d’oreilles.

Gloriose Miburo s’est mariée à 13 ans et a eu son premier enfant à 15 ans. Aujourd’hui, elle en a 6. « A cause des mauvaises conditions de vie, j’ai arrêté les études en 6e année primaire. Je ne pouvais plus avoir de matériel scolaire. Et par la suite, je me suis mariée. Mais rien n’a changé, nous survivons grâce au dépotoir de Buterere », raconte-t-elle.

Deux femmes du site ont initié un petit commerce. L’une vend des frites de patates douces, une autre des arachides. Pour elles, c’est moins que rien. Leurs enfants vont rarement à l’école et ces femmes disent que jusqu’aujourd’hui, aucun enfant n’a pu décrocher le diplôme des humanités générales.

« Chaque jour à midi, je dois aller au dépotoir pour chercher du charbon et je le vends à 500 BIF au minimum. Ou si je trouve une pâte de maïs, de manioc ou de blé, je l’écorche et Dieu merci, nous ne dormons pas le ventre vide», confie Ida Ndayisenga.

De temps à autre, ces femmes font des tâches dans les champs de riz avoisinant leur site pendant le sarclage ou la moisson. « Nous aimerions avoir nos propres champs, nous n’avons pas de terres cultivables », se lamentent-elles. « La vie d’une femme twa est toujours à un très bas niveau. Nous ne pouvons même pas intégrer des associations d’épargne et de crédit. Nous n’avons pas cette capacité », déplore-t-elle.

Pour elles, la fête du 8 mars ne veut rien dire. Elles n’ont pas de soutien des associations dites de la promotion de la communauté des batwa au Burundi ou du gouvernement.

Ces femmes twa qui ont émergé…
Membre de la CVR, Libérate Nicayenzi faisait partie de l’équipe qui a effectué une visite à Makamba, le 19/7/2017

Au Burundi, les Batwa ont longtemps été marginalisés. Pourtant, certaines femmes sont sorties du lot. Elles plaident pour la promotion des Batwa. Rencontre.

Libérate, l’ « Esther » des Batwa du Burundi

Interview avec Libérate Nicayenzi, ancienne députée et sénatrice, la première femme qui a mené un long combat pour le développement des batwa.

D’où vous est venue l’idée de défendre les droits des Batwa ?

Je le dois beaucoup à mon époux également twa, Stanislas Mashini. C’était un vrai défenseur des droits humains. Avant sa mort, il est même parti en Allemagne pour parler de l’injustice, de la discrimination… dont les Batwa étaient victimes. C’était dans un colloque des droits de l’homme, dans les années 90 ou 91. A vrai dire, j’étais sa secrétaire. Après sa mort, j’ai décidé de poursuivre son combat.

A l’époque, n’était-ce pas risqué pour lui ?

Vous savez qu’à cette époque, dénoncer les injustices était comme un suicide. Il a été persécuté après son retour d’Allemagne. Il a même passé des jours sous les verrous. D’autres prisonniers ont été tués sous ses yeux.

Comment est-il parvenu à survivre ?

Par chance, parmi les militaires, il y avait une connaissance. Un militaire qui venait d’une famille amie. Il l’a protégé. Après, il a été libéré. Mais il n’a pas renoncé à son combat.

Donc, vous avez pris la relève après son départ…

Oui. C’est mon inspirateur. De son vivant, chaque fois qu’il y avait une visite d’une autorité dans notre commune, il soulevait toujours cette question d’exclusion, de discrimination des Batwa. Idem dans les réunions des fonctionnaires. Ça lui tenait beaucoup à cœur.

Finalement, comment êtes-vous parvenus à créer une association ?

Quand j’ai été désignée sénatrice, Vital Bambanze, l’un des premiers étudiants twa, venait d’entrer à l’Université du Burundi. Et on s’est rencontré un jour. Des médias de l’époque ont beaucoup parlé de nous. Une sénatrice et un étudiant de l’ethnie Twa. Presque tous les Batwa de Bujumbura, de Kanyosha, … sont venus nous chercher.

Avec quel message ?

« Uratubera Esther » (Soyez notre Esther !). Un message qu’ils m’ont donné personnellement, Esther étant un personnage biblique qui représentait les juifs.

Une tâche facile ?

Difficile. Mais j’étais déjà engagée. Seulement, cela m’a montré qu’ils ont besoin d’un ‘’ sauveur’’. Avec Vital Bambanze, nous avons directement pensé à mettre en place l’organisation Uniproba (Unissons-nous pour la promotion des Batwa). Elle a été vite agréée et j’ai été élue présidente.

Les Batwa ne participaient pas dans les institutions comme d’autres Burundais. On disait que les Batwa n’ont pas étudié.

Après la création de l’Uniproba, des Rwandais et Congolais sont venus se ressourcer chez nous. Pour eux, une femme de l’ethnie twa nommée députée était comme un miracle.

Toutes les rencontres pour l’élaboration des textes se tenaient chez moi. A cette époque, les conditions de vie des Batwa étaient insupportables.

Comment ?

Ils étaient discriminés avec beaucoup de stéréotypes. Ils n’étaient pas scolarisés, etc. Même si chez nous, on avait de grandes propriétés, d’autres Batwa n’avaient pas de terres. Ils vivaient dans des huttes. Imaginez-vous des parents, des enfants dans une petite hutte pendant la nuit. C’est terrible. Et cela entraîne un mariage précoce chez les filles et garçons qui se marient à 12, 13 ou 14 ans.

Quand un homme rentre avec un verre de trop, il lui arrive de ne pas se maîtriser. Et l’on se dit à tort qu’à 1 heure ou 2 heures du matin, les enfants sont déjà en sommeil profond. Les enfants sont vraiment très curieux. Ils peuvent faire semblant de dormir alors qu’ils veillent sur vous.

Quelle a été la réaction des autorités de l’époque ?

Elles ont vraiment coopéré. L’agrément de l’Uniproba a été facile et rapide. Et le président de l’Assemblée nationale d’alors, Léonce Ngendakumana, nous a beaucoup aidés. Le gouvernement nous donnait des véhicules et de l’argent pour aller rencontrer les batwa à l’intérieur du pays. Notre message était clair à l’endroit des gouverneurs : octroyer des terres aux familles batwa et les convier aux réunions administratives et sensibiliser les batwa à l’éducation de leurs enfants.

Des défis à cette époque ?

Les défis n’étaient pas nombreux. Nous avions surtout un problème de moyens financiers. La première intervention financière est venue d’une église œcuménique de Suisse. C’est grâce à son appui que nous avons participé dans une réunion en Suisse. C’était notre premier voyage dans l’avion. Il y avait cinq Burundais dont deux batwa, moi et Vital Bambanze.

Quel est le bilan de votre combat ?

Très positif et encourageant. Parmi tous les gouverneurs, celui de Gitega, Louis Murengera, a directement octroyé des propriétés à toutes les familles batwa. Elle a été la première. Puis, nous avons organisé des réunions avec les batwa dans les communes. Avec comme message : changer de comportement, envoyer les enfants à l’école et arrêter de se sous-estimer. Nous leur disions que sans étudier, l’on ne peut pas se développer. Nous les avons invités aussi à adhérer dans les partis politiques.

Aujourd’hui, beaucoup de batwa ont de belles maisons en tôles. Et ce, grâce à l’appui des églises, des ONG, etc. Avant, ils ne pratiquaient pas d’activités agro-pastorales. Mais, actuellement, ils ont des porcs, des chèvres, etc.

Les femmes batwa sont dans les conseils communaux ou collinaires. Les Batwa sont dans les églises. Aujourd’hui, quand un Twa organise une fête, des Hutu et Tutsi viennent. Mais, avant, nos parents étaient servis à l’écart, dans les bananeraies. Mais, actuellement, ils partagent avec les autres, sur le même chalumeau. Nos jeunes diplômés n’hésitent pas aujourd’hui à épouser une fille de l’ethnie Hutu ou Tutsi. Même dans le monde rural, ces cas de mariages mixtes existent. Des enfants twa sont enregistrés à l’état-civil. Les familles batwa ne sont pas très pauvres. Ils cultivent.

Même en politique, je ne suis plus la seule. Aujourd’hui, la Constitution nous donne droit à trois députés et trois sénateurs. Ils viennent des associations qui militent pour la promotion des Batwa. Pour le moment, nous avons même un membre du gouvernement : Imelde Sabushimike, ministre de la Solidarité Nationale, des Affaires Sociales, des Droits de la Personne Humaine et du Genre.

Comment avez-vous accueilli cette nomination ?

C’est vraiment excellent. Elle est d’ailleurs vice-présidente de l’Uniproba. C’est la joie chez tout le peuple autochtone. C’est la première fois qu’un de leur ressortissant accède à un tel poste. C’est comme moi quand j’ai été désignée députée. Cela montre que nous aurons même des gouverneurs, des ambassadeurs et d’autres cadres. Une preuve que les batwa sont aussi capables. Mais je dois signaler que n’eût-été la volonté politique, la société civile, les médias, …toutes ces avancées n’auraient pas été possibles.

Qu’est-ce qui a changé chez les femmes ou jeunes filles batwa ?

Des filles batwa sont aujourd’hui présentes dans les écoles. Nous avons des universitaires. Et l’effectif des filles batwa au secondaire ne cesse de monter. Les femmes sont membres des associations, des coopératives. Même culturellement, la discrimination tend à disparaître. Il n’y a plus de moquerie dans les écoles. Aujourd’hui, les femmes batwa s’habillent bien, elles sont propres.

Les défis ne manquent pas, cependant. Certaines filles ne parviennent pas à poursuivre leurs études. Les revenus de leurs familles ne permettent pas de satisfaire tous les besoins. Avant, elles ne bénéficiaient pas d’assistance matérielle : des uniformes, des cahiers, etc.

Y’a-t-il quelque chose de prévu pour les femmes batwa le 8 mars ?

Avec l’appui du PNUD, 100 femmes batwa vont prendre part au défilé pour l’occasion. Et elles vont recevoir des pagnes. Elles sont de Gitega, Mwaro, etc. Et le lendemain, elles vont être formées sur le leadership et le développement local.

Quid de la situation actuelle de la poterie ?

Il y a vraiment un sérieux problème. Parce que les batwa ne trouvent plus de l’argile. On leur dit de l’acheter alors qu’ils n’ont pas de moyens. C’est un métier qui ne méritait pas de disparaître.

Qu’en est-il de sa modernisation ?

C’est déjà lancé dans la province Ruyigi. Maintenant, ils fabriquent des braseros. D’autres fabriquent des objets d’art, des casseroles, des gobelets, etc. Des ateliers sont déjà construits. Mais ceux qui fabriquent des pots ont de sérieux problèmes.

Qui est Libérate Nicayenzi ?

Née en 1957, à Gasanda, commune Kayokwe, province Mwaro, Libérate Nicayenzi est ancienne députée (1998-2005), sénatrice (2005-2008) et ancienne commissaire à la Commission vérité réconciliation (2014-2018). Elle a initié l’organisation Uniproba (Unissons-nous pour la promotion des batwa).
Mme Nicayenzi a connu une enfance aisée contrairement aux autres batwa. Ses parents avaient des terres cultivables, de belles maisons.

Depuis l’école primaire, à Kibumbu, la jeune fille s’est démarquée par son intelligence. Après avoir réussi au concours national, elle s’en va à Kiganda, province Muramvya, pour les études secondaires. Elle garde de très mauvais souvenirs de cet endroit. Elle a été maltraitée.

Un certain après-midi de dimanche, tout a basculé. Une élève dévoile son identité. Tout le lycée apprend qu’il y a une Mutwa. Immédiatement, elle se retrouve au milieu d’un groupe de jeunes filles qui l’encercle. « Elles ont commencé à me repousser. Elles me fixaient de la tête aux pieds».

Au réfectoire, se rappelle-t-elle, après la prière, tout le monde a crié : « Umutwa, umutwa, umutwa » (Une Mutwa, une mutwa, une Mutwa). Avec ce geste, il lui est impossible de se servir de la nourriture. Des responsables l’ont fait sortir et l’ont amenée dans le bureau de la directrice. Une blanche de nationalité belge.

Une autre scène traumatisante : « Elle a commencé à me poser des questions en rapport avec les ethnies. Par après, je lui ai déclaré mon identité.» Le lendemain, une institutrice remuera le couteau dans la plaie. Elle s’asseyait sur un banc pupitre de devant. Cette institutrice la place derrière tout le monde. « Je ne sais pas comment j’ai pu supporter ces moqueries incessantes, cette discrimination jusqu’à la fin de mes études… C’est un miracle. »

De l’enseignement au Parlement… En 1976, commence une longue carrière pour cette femme modèle twa. Elle devient enseignante au Lycée Kibumbu.
Convoitée par les Tutsi et les Hutu, elle préférera épouser un homme twa. « Je voulais fonder une famille modèle pour tous les Twa », explique-t-elle. De ce mariage en 1983, naîtront sept enfants. Elle assurait la prise en charge scolaire de huit autres enfants.
Après cette carrière d’enseignante, elle se lance dans la politique. Elle sera au Parlement puis à la CVR.


Nehema Niyibitanga, la députée déterminée

Nehema Niyibitanga, 35 ans, représente les Batwa à l’Assemblée nationale et représente la province Cibitoke. Elle a terminé ses études en 2008 et chômera pendant 7 ans, jusqu’en 2015. « Mais cela ne m’a pas découragée. Intelligente et motivée, j’étais membre de l’association des femmes batwa durant cette période. L’on apprenait comment cultiver les champs qu’on louait et on vendait nos récoltes au marché».

Par la suite, raconte cette députée, nous avons cherché un appui dans les différentes organisations qui œuvraient à Cibitoke. Une ONG internationale a apprécié notre travail et nous a appuyées dans notre projet en nous enseignant comment travailler nos champs en pratiquant les techniques modernes.

Pour Mme Niyibitanga, les Batwa font toujours face à de nombreux défis. Elles ne sont pas scolarisées et surtout elles ne sont pas soutenues en renforcement de capacités. Elles se sentent exploitées dans certaines associations.

Selon elle, les femmes batwa veulent travailler, mais certaines n’ont pas de terre pour cultiver et cela entraîne la mendicité. « Nous demandons au gouvernement de nous aider en nous octroyant des terres pour cultiver», insiste-t-elle.

Dans certaines activités de formation dans les associations qui se font dans les communes, déplore Mme Niyibitanga, nous remarquons que les femmes batwa sont toujours discriminées, elles ne sont pas souvent invitées dans ces séances de formation qui peuvent les aider à s’enrichir socialement et intellectuellement.

Elle affirme aussi que les femmes batwa ne sont pas présentes dans les coopératives.

Toutefois, des avancées s’observent depuis que les Batwa ont commencé à siéger au sein des institutions, d’après Honorable Niyibitanga. Grâce à l’association Uniproba, le taux de scolarisation des enfants batwa a augmenté grâce aux différentes sensibilisations dans toutes les provinces du pays.

Les femmes batwa ont franchi une grande étape, notamment pour le mariage légal. Les enfants sont inscrits par leurs parents à leur naissance dans les communes. Ils vont à l’école. Les mères accouchent dans les hôpitaux. Elle loue aussi l’accès facile aux soins de santé pour les Batwa.
De surcroît, la présence d’une femme twa au gouvernement est un grand honneur pour ce peuple autochtone.


Kenax Mutarutwa, cette étudiante au parcours semé d’embûches

Faire un cursus scolaire de la maternelle à la fin de l’université n’est pas un chemin facile pour une femme lambda. Pour celle issue de la communauté twa, c’est encore plus difficile.

Kenax Mutarutwa a mené une vie de guerrière jusqu’à terminer ses études universitaires en sciences politiques et relations internationales à l’Université du Lac Tanganyika en 2017.

Rencontrée à une église où elle assure plusieurs responsabilités surtout dans sa chorale, taille plutôt élancée, élégante, avec une fine touche de maquillage, elle est toute fière de son parcours : « C’est mon esprit de leadership qui fait qu’on me confie toutes ces tâches. »

De sa Kirundo natale à l’Université du Lac Tanganyika en passant par le lycée Jabe, le chemin a été long pour cette brave jeune femme. Financièrement appuyée par des associations comme Uniproba, elle aura la chance de terminer ses études universitaires. Cadette dans une fratrie de cinq enfants, elle est la seule à avoir fréquenté le banc de l’école dans sa famille.

Maltraitée, sous-estimée…mais pas question d’abandonner !

Kenax confie qu’elle a subi toute forme de discrimination à l’école primaire : « J’étais isolée, l’on disait que l’école n’était pas pour les Batwa. Au secondaire, l’on me disait que c’était largement suffisant pour moi comme études et qu’il fallait aller plutôt chercher les cooptations pour trouver une place à l’Assemblée nationale. » Ces mots blessants venaient parfois de la part des professeurs, confie-t-elle.

La jeune femme a été encouragée par d’autres femmes issues de la communauté batwa. Elle cite Libérate Nicayenzi qui a siégé à l’Assemblée nationale et la ministre Imelde Sabushimike, qu’elle côtoie depuis longtemps.

« Je ne voulais pas arrêter mes études. Cela aurait été une déception pour ma mère, qui a bataillé, malgré nos dures conditions de vie, pour que j’aille à l’école».

Mme Mutarutwa a déjà plusieurs projets pour le développement de la communauté batwa. C’est notamment la réintégration scolaire des femmes batwa qui ont eu des grossesses en milieu scolaire. Elle fait également des déplacements dans plusieurs provinces du pays pour octroyer des formations aux jeunes femmes batwa sur le leadership.

La très pieuse Kenax trouve que les études est la seule voie d’amélioration des conditions de vie de la communauté des Batwa. « Il est vrai que l’on donne souvent des aides, mais parfois certaines familles finissent par les vendre. L’éducation est la seule voie de sortie de la misère.»

Kenax Goreth Mutarutwa lance un appel à d’autres femmes twa et à sa communauté en général pour s’affirmer dans la société burundaise, entreprendre des projets de développement comme tous les autres.


Neila Mutoniwimana, la miss modèle des jeunes filles twa

Haut d’1m 40 environ, mince, teint noir… Neila Mutoniwimana sera couronnée Miss Kayanza 2020, le 1er janvier. De l’ethnie twa, cette jeune élève finaliste des humanités au lycée Busiga à Ngozi n’a pas manqué de secouer les réseaux sociaux. Deux jours après son élection, les photos et vidéos de l’élue ont fait le buzz sur les réseaux sociaux.

« Je suis intelligente. J’ai répondu à toutes les questions que le jury m’a posées. Mes projets ont convaincu… » Neila explique, d’une voix timide, pourquoi elle pense avoir gagné cette compétition qui requiert beauté et surtout intelligence.

Neila, originaire de la commune Muhanga, province Kayanza, affirme qu’avant de participer à concours de beauté, elle était convaincue qu’une Twa n’avait aucune chance de gagner une telle compétition. Elle ne s’est pas laissée découragée par la dure épreuve qu’elle venait de traverser quelques jours avant la compétition. Leur maison familiale venait d’être complétement détruite par la pluie.

Une couronne qui a changé sa vie et celle de plusieurs filles batwa. Avant de participer à ce concours, Neila confie qu’elle menait une vie misérable. Fille aînée d’une mère agricultrice et d’un père derrière les verrous depuis 16 ans, elle et ses petits frères ont grandi et ont été scolarisés grâce à des âmes charitables.

Depuis qu’elle est Miss Kayanza, Neila ne peine plus comme avant pour assurer sa subsistance : « J’ai été très connue. Les gens m’ont approchée et m’ont promis de m’aider. Et je n’hésite pas à leur demander de l’aide en cas de besoin. »

Neila Mutoniwimana a influencé d’autres filles twa. Depuis son élection, ces dernières ont développé leur estime de soi. Neila affirme que certaines filles qui étaient sur le point d’abandonner l’école se sont ravisées : « Elles ont dit qu’elles devaient étudier pour devenir comme moi, pour être célèbre… »

Forum des lecteurs d'Iwacu

4 réactions
  1. Rémy BUCUMI

    Le gouvernement pourrait mettre en place une commission chargée de proposer des terres aux batwa

  2. Chris Hara

    Merci à Iwacu pour ce dossier bouleversant sur le sort tragique des Batwa. N’oublions pas non plus celui des « Burundais » (sic) qui vivent aussi majoritairement dans des conditions infrahumaines. En cette Journée des droits de la femme, n’oublions pas non plus le sort pénible de la paysanne burundaise, bête de somme, exploitable et corvéable, affligée de maternités interminables. Souvent la seule activité dans laquelle l’homme intervient est lorsqu’il s’agit de lui faire des enfants. C’est déjà ça !
    Le seul malheur à laquelle la femme burundaise échappe est l’horreur des mutilations génitales féminines qui se pratiquent dans toute l’Afrique sauf dans les Grands-Lacs et l’Afrique australe. Partout ailleurs on charcute le sexe des petites filles dans des souffrances atroces. C’est le seul malheur que les Burundaises ne connaissent pas.
    Le Burundi est classé comme le pays le plus pauvre, le plus arriéré et le plus malheureux du monde. Depuis l’importation du virus rwandais du génocide, au lieu de nous occuper de l’essentiel à savoir transformer la société pour donner à la population une vie digne, notre activité principale est de tuer, tuer, tuer, tuer, tuer, pas seulement tuer… tuer des innocents, femmes et enfants. Dans mes moments perdus, je me surprends à penser que nous optons pour cette facilité par indigence intellectuelle et économique. Ayant échoué de développer la nation après 60 ans d’indépendance, l’action facile est la destruction des vies et des biens.

    • Yanikana

      C’est terrible comme j’ai le même sentiment que toi Chris; le manque d’empathie de la majorité de nos élites et le mépris des pauvres.

  3. Nana

    Ce n’est pas la journée internationale de la femme mais des droits de la femme

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