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Société

Le calvaire des employés de Sogestal Kirimiro

21/02/2019 Commentaires fermés sur Le calvaire des employés de Sogestal Kirimiro
Le calvaire des employés de Sogestal Kirimiro
Sur certaines stations de lavage du café, les employés furieux ont cessé leurs activités.

Les employés de la Sogestal Kirimiro sont dans le désarroi. Ils n’ont reçu aucun salaire depuis septembre dernier 2018. La mévente de la production de l’année dernière serait à l’ origine du retard de leurs salaires. Reportage.

Six mois que les employés des stations de dépulpage et de lavage du café de la Sogestal Kirimiro ne sont pas payés. Les retards dans le paiement des salaires sont récurrents depuis 2017.

C’est un véritable chemin de croix. Père de 4 enfants, E.N. a dû recourir à un découvert bancaire pour la dernière rentrée scolaire. Ses quatre enfants ont pu étudier pendant le premier trimestre. Mais il n’arrive pas à se débrouiller avec le deuxième trimestre. Un petit crédit a contracté auprès d’un usurier de la colline ne lui a pas permis de couvrir tous les besoins scolaires des quatre enfants. Deux ont dû abandonner l’école.

Même pour les deux qui ont pu aller à l’école, cet employé de la station de lavage de Ruvubu sur la colline Bukirasazi reste inquiet. «J’ai peur qu’ils n’y retournent pas pour le troisième trimestre. Je ne vois pas celui qui aura encore confiance en moi pour me prêter son argent».

Il est dégoûté par ce travail qui ne lui rapporte rien. « Ma famille me voit chaque matin me présenter au travail, mais à la fin du mois je n’ai rien.»

Un autre employé de la station de lavage de Mavuvu en commune Makebuko déplore ‘‘un job à la con’’. «Un emploi pour un petit salaire et qui n’arrive même pas. Je trouve qu’il faudrait simplement s’en passer». Lors de la dernière saison culturale, faute de salaire, il a manqué de l’argent pour se procurer de l’engrais chimique. Il n’a pas eu de récolte.

Cet employé a peur pour la prochaine saison culturale «Si dans une semaine nous ne sommes pas payés, nos familles vont simplement mourir».

Il supplie les responsables de la Sogestal de tout faire pour débloquer les rémunérations.
La détresse gagne tous les employés. Dans le quartier Nyabiharage de la ville de Gitega, J.L, un employé de la station de Nyanzari de la colline Songa en commune Gitega a perdu tout courage de se présenter au travail. «Nous devons chercher comment nous occuper autrement. Nous présenter à l’usine ne serait qu’une perte de temps »
Cet employé, pourtant permanent dans la Sogestal Kirimiro, est même allé pendant quelques mois dans une autre province « pour s’occuper utilement ».

Il dit ne pas comprendre pourquoi le personnel de la Sogestal Kirimiro n’est pas payé. «Sur une période d’au moins 5 ans, c’est la première fois que nous avons eu une très bonne récolte».

D’après tous les employés interrogés, les retards de salaire étaient devenus une habitude, et ils s’y adaptaient petit à petit, tant bien que mal. «Au plus après deux ou trois mois, un salaire d’un mois tombait». Mais, après 6mois, ils ne peuvent plus tenir. «C’est le calvaire», disent-ils.

«La prochaine campagne risque d’être gâchée»

Un des responsables de la station de lavage de Ruvubu partage les préoccupations des employés. Il confie que les veilleurs de nuit à cette station ont menacé d’abandonner la garde à partir de ce vendredi 15 février.
Il comprend leur colère. «Passer 6 mois dans le froid nocturne de ce marais, sous les piqûres des moustiques sans toucher un sou ».

Ce responsable appelle au secours toute autorité compétente pour faire sienne la question du retard des salaires. Autrement, la situation peut s’empirer d’un moment à l’autre. «Si par exemple les veilleurs de nuit partent, les machines seront exposées».

Tout le personnel de la Sogestal Kirimiro à Gitega n’est pas rémunéré y compris ceux du siège.

A son avis, si le personnel de la Sogestal Kirimiro n’a pas encore marché dans la rue pour protester, c’est uniquement par crainte d’être pris pour « des insurgés. »

Et de prévenir que pour la prochaine campagne de récolte, la situation risque d’être compliquée. Les employés temporaires qui font naturellement les travaux d’entretien et de réhabilitation des stations dans la période pré-campagne risquent de décliner l’offre. «Ils savent que nous ne sommes pas payés et ne voudront pas venir travailler pour rien, et la campagne sera perturbée».

Interrogé par téléphone sur les raisons de ces retards dans le paiement, des salaires, Samuel Nibitanga, directeur général de la Sogestal Kirimiro, n’a pas voulu s’exprimer. «Je ne donne aucune information sur téléphone ».
Toutefois, un cadre de la Sogestal Kirimiro souligne la mévente de la production. «Uniquement 25% de la récolte ont été vendus». Selon lui, la direction aurait son propre client. Pour cette année, ce dernier n’est pas venu acheter le café.

Ce cadre confirme les arriérés. «C’est pour tout le personnel de la Sogestal, des cadres aux sentinelles». Il raconte qu’il y a trois jours, une sentinelle, à l’œuvre au siège, est tombée en syncope à cause de la faim.
La Sogestal Kirimiro compte près de 400 employés, dont 240 contractuels. Elle est la première avec 31 stations de lavage.

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